Certains consommateurs ne jurent que par la paille. D'autres, comme Michel Bergeron, pionnier de la construction écologique, rappellent l'importance d'une main d'oeuvre qualifiée. La maison de paille est-elle là pour rester?

Certains consommateurs ne jurent que par la paille. D'autres, comme Michel Bergeron, pionnier de la construction écologique, rappellent l'importance d'une main d'oeuvre qualifiée. La maison de paille est-elle là pour rester?

Sylvie Plaire et Marc Chabot ont toujours voulu une maison en ballots de paille. Lorsqu'ils ont construit leur première demeure non loin de Sherbrooke, en 1996, ils y ont renoncé, faute de moyens. Mais ils ont réalisé leur rêve quand ils ont bâti leur seconde maison, à Sainte-Catherine-de-Hatley, près de Magog.

Ils désiraient faire eux-mêmes une bonne partie de la construction, selon des techniques écologiques. Déjà très soucieux de l'environnement, ils évitent tout produit synthétique depuis que leur fils Thomas, né en 1997, s'est mis à faire des crises d'asthme vers l'âge de 2 ans.

L'utilisation de ballots de paille les tentait beaucoup. «C'est un matériau isolant super efficace, explique Marc Chabot avec enthousiasme. Les murs massifs sont très écologiques. Et c'est simple à faire.»

Optimisme

Les travaux ont débuté en novembre 2002, lorsque la dalle flottante a été coulée. Ils ont repris en mars 2003 et se sont échelonnés jusqu'en octobre 2004. À l'époque, l'industrie de la construction écologique était embryonnaire et il n'y avait pas assez de main-d'oeuvre.

Le couple, qui croyait consacrer 2000 heures à la construction de sa maison, y a finalement mis plus de 5000 heures.

«Un optimisme naïf planait dans le milieu», dit Marc Chabot. L'aide de bénévoles, intéressés à construire leur propre maison de façon écologique mais ne sachant trop comment s'y prendre, s'est avérée fort précieuse.

Deux couples, qu'ils ne connaissaient pas, sont mêmes venus du Nouveau-Brunswick pour leur donner un coup de main. «Ce fut très bon pour le moral», se rappelle M. Chabot.

Après avoir vécu deux hivers dans leur maison, Sylvie Plaire et Marc Chabot n'ont aucun regret. Oui, l'isolation avec des ballots de paille coûte plus cher que la construction de murs de six pouces recouverts d'un déclin de vinyle, dit M. Chabot, un brin railleur. «Mais cela ne se compare pas!»

Les ballots de paille, compressés au maximum pour obtenir un matériau uniforme, compact et isolant, ont 14 pouces d'épaisseur, explique l'ingénieur. Ils sont recouverts, à l'intérieur et à l'extérieur, d'une couche de crépi d'argile de deux pouces d'épaisseur.

Pour la finition, les murs sont ensuite enduits de chaux, à l'intérieur et à l'extérieur. «Les murs sont complètement scellés, précise M. Chabot. Il n'y a aucune fuite d'air.»

Il a lui-même posé les ballots de paille et c'est sa compagne qui a appliqué le crépi d'argile. «Faire exécuter ce travail par un entrepreneur coûte évidemment plus cher, mais les prix ont baissé depuis deux ans. Cela demeure toutefois un travail artisanal et les propriétaires doivent mettre la main à la pâte.»

Cloisons

À l'intérieur, le couple ne pouvait se résoudre à avoir des cloisons parfaitement droites. Le contraste, avec les murs extérieurs aux formes ondulées, aurait été trop grand. Au début, Sylvie Plaire a comblé la charpente des murs d'un mélange de terre et de paille, puis a recouvert le tout d'une barbotine d'argile, puis, enfin, de chaux. Un processus très long. Elle a utilisé vers la fin un produit écologique permettant d'appliquer un enduit et la chaux directement sur le gypse.

Dans la salle de bains, les lavabos et la douche sont en tadelakt, un enduit à la chaux brillant et imperméable, réalisé selon une technique utilisée traditionnellement au Maroc. Dans la cuisine, les armoires sont faites d'aggloméré de fibre de paille.

Le cottage est chauffé à l'électricité, à l'aide de planchers radiants, au rez-de-chaussée. À l'étage, le système radiant a été installé du côté intérieur des murs extérieurs.

«Grâce aux fenêtres, qui profitent du jeu solaire passif, et à l'isolation supérieure, la facture annuelle d'électricité pour notre maison de 1500 pieds carrés, tout compris, se chiffre à 1500, dit fièrement M. Chabot. Les murs conservent la fraîcheur l'été et l'air est sain, on le sent. Notre fils de 9 ans fait beaucoup moins d'asthme depuis que nous habitons ici!»

Près de l'entrée, la «fenêtre de vérité» rappelle la présence de la paille, qui autrement, n'est plus visible.

Inconvénient

Y a-t-il un inconvénient à utiliser la paille comme isolant? Non, répond M. Chabot, catégorique.

«Comme elle est recouverte de crépi d'argile, il n'y a aucun risque de moisissure. Je suis très content de notre choix.»

Il encourage les autres à le faire. Fort de son expérience, il a insufflé une nouvelle vie à l'organisme Archibio, voué à la promotion de la construction et l'architecture écologiques.

«De plus en plus de gens veulent isoler leur maison avec des ballots de paille, constate-t-il. Le réseautage s'amplifie.»

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Sur Internet: www.archibio.qc.ca