«On invoque toujours la règle de l'art, mais elle n'est écrite nulle part», souligne André Gagné, directeur de la formation et de l'expertise technique à l'APCHQ. L'Association a donc décidé de rédiger un manuel de tolérance qu'elle a présenté à ses membres lors de son 44e congrès, qui s'est tenu en septembre.

«On invoque toujours la règle de l'art, mais elle n'est écrite nulle part», souligne André Gagné, directeur de la formation et de l'expertise technique à l'APCHQ. L'Association a donc décidé de rédiger un manuel de tolérance qu'elle a présenté à ses membres lors de son 44e congrès, qui s'est tenu en septembre.

Ces lignes directrices cherchent à établir la marge de manoeuvre raisonnable des constructeurs lors de travaux, puisque jamais «rien n'est parfait parfait», fait valoir M. Gagné.

Par exemple, le guide, qui devrait sortir en 2006, délimitera la distance, et même l'angle dans certains cas, de laquelle on doit observer un mur de briques ou une surface peinte pour juger de l'uniformité de la couleur. Il indiquera aussi le décalage acceptable d'un motif, à la jonction de deux morceaux de tapisseries ou de tuiles.

Actuellement, ces règles ne sont pas enchâssées dans le Code du bâtiment, puisqu'elles ne se rapportent pas à la santé et sécurité, précise M. Gagné. Cette zone grise cause des problèmes lors de conflits. «Ça va aider tout le monde à éviter les tribunaux», croit André Gagné. Et cet ouvrage pourrait éventuellement constituer une jurisprudence lorsque le dossier se rendrait jusqu'en cour. Précisons qu'il n'édictera pas de nouveaux standards, mais uniquement des références basées sur l'expertise.

Le manuel s'avérera un outil pour les constructeurs et les consommateurs, estime l'APCHQ. Ainsi, en constatant une fissure dans la fondation, un consommateur pourrait savoir si la grosseur de la faille est tolérable, c'est-à-dire comprise dans les bornes prédéfinies. Le client sera rassuré et n'aura «pas besoin de monter sur ses grands chevaux», illustre M. Gagné.

Mais une telle bible ne fait pas l'unanimité auprès des entrepreneurs. Certains y voient une arme à double tranchant. Pour reprendre l'exemple cité ci-haut, un client dont la taille de la fissure dépasserait d'un simple millimètre les paramètres établis pourrait alors envoyer une mise en demeure au constructeur, et aurait peut-être plus facilement gain de cause.

C'est ce que craint Claude Lortie, président de Lortie Construction. Il estime que l'industrie a besoin de ce livre, mais qu'il sera un atout précieux pour les «bons entrepreneurs et les bons clients». Les individus de mauvaise foi des deux camps pourraient s'en servir à la fois pour être plus négligents, ou encore pour exiger réparation dès qu'il y a une petite dérogation des tolérances. M. Lortie souligne l'aide précieuse de ce document pour les entrepreneurs, surtout ceux moins expérimentés.

Le propriétaire de Constructions SMB, Sylvain Tremblay, pense que c'est «un outil qui va devenir indispensable». Il n'a pas peur qu'un tel ouvrage nuise aux constructeurs. En bout de ligne, M. Tremblay fait valoir qu'il risque d'y avoir plus d'avantages que d'inconvénients.