Du 19 juillet 2004 au 18 juillet 2005, suivant les données de la Chambre immobilière de Québec, les courtiers et agents immobiliers auraient vendu, dans l'ensemble de l'île, 20 propriétés de 200 000 $ à 1 million $. Or, on en dénombre actuellement 53 à vendre dont 13 entre 500 000 $ et 1 million $.

Du 19 juillet 2004 au 18 juillet 2005, suivant les données de la Chambre immobilière de Québec, les courtiers et agents immobiliers auraient vendu, dans l'ensemble de l'île, 20 propriétés de 200 000 $ à 1 million $. Or, on en dénombre actuellement 53 à vendre dont 13 entre 500 000 $ et 1 million $.

En contre-partie, du 30 juin de l'an passé au 1er juillet de cette année, deux maisons de 500 000 $ à 1 million $ ont été soldées à Saint-Laurent et à Sainte-Pétronille seulement. Tandis que sept sont présentement en vente.

Enfin, cinq de 200 000 $ à 500 000 $ ont trouvé preneurs durant la même période et dans les mêmes localités. Pendant que 15 sont «actives» sur le marché de la revente.

Par ailleurs, selon la Société d'habitation du Québec, c'est à l'île d'Orléans qu'on trouve la plus grande proportion de propriétés de plus de 150 000 $ (34 % dans l'ensemble du territoire administratif de la capitale nationale.

Explications

Certains particuliers de l'île, qui n'ont plus ni le goût d'entretenir leur propriété ni l'âge de le faire, décident de s'en aller. C'est l'explication d'Anne Turcotte, agente immobilière et designer au service de RE/Max 1er Choix Y.D. de Québec.

«Cela donne lieu à une forme de mouvement migratoire vers les logements en copropriété», croit-elle.

D'un autre côté, Alain Gravel, vendeur sous la bannière Royal Lepage Inter-Québec, est enclin à penser que quelques lucratives ventes «instantanées» de propriétés ces derniers temps ont provoqué des ondes de ventes dans leurs environs.

D'après lui, des propriétaires impressionnés ont voulu à leur tour profiter de la conjoncture et se sont hâtés de passer un contrat de courtage pour la vente de la leur.

La vue sur le fleuve est un argument extraordinaire de vente, à l'île d'Orléans comme ailleurs.

Il y a une demande pour les propriétés de 700 000 $ et plus, mais elle a ses limites. Qui connaît des gens qui ont les moyens de s'offrir des maisons de ce prix, fussent-elles sur le bord du fleuve?, demande, comme un défi, l'agent immobilier.

L'accroissement soudain du nombre de propriétés à vendre peut entraîner une baisse des prix. Et l'inclination naturelle qu'ont les particuliers de surestimer la valeur de celle qu'ils ont et de tenir à leur prix pourraient en laisser certaines invendues.

Repos

Un citoyen de Sainte-Pétronille, qui veut que son nom soit tu, est sur le point de quitter l'île. Dans la soixantaine, sa santé ne lui permet plus d'entretenir sa maison ancestrale, le terrain, les dépendances.

«Ce n'est pas une question de taxes, ni de désaffection eu égard à la beauté de l'île. C'est que je n'en puis plus et je suis en quête de repos après une laborieuse carrière», détaille-t-il.

Il déménage dans un immeuble d'habitations en copropriété du côté de Beauport. «Avec vue sur le fleuve. Jamais on ne m'enlèvera ça», clame-t-il.

Il précise qu'à Sainte-Pétronille, il ne reste plus qu'une couple de terrains constructibles. «Cela pourrait exacerber les prix des maisons existantes», raconte-t-il.

N'empêche qu'à l'île, les propriétés riveraines du fleuve sont très recherchées. Certains sont prêts à payer cher pour en avoir une.

«C'est une carte postale, devant la fenêtre, que s'offrent des gens à l'aise», pense Mme Turcotte.

«Voir passer les bateaux, c'est un plaisir ineffable», selon M. Gravel. La fascination est semblable à celle qu'exerce la flamme d'un foyer. On ne s'en lasse pas.

Des baby-boomers ont acheté durant leur vie quatre à cinq maisons. Ils vendent leur dernière 400 000 $, suppute Mme Turcotte. Et à la faveur des taux d'intérêt qui ne cessent d'être avantageux, ils s'en offrent une autre sur le bord du fleuve à 700 000 $.

Le montant résultant de la vente de leur propriété précédente leur servant de mise de fonds, ils contractent un prêt hypothécaire pour le reste. C'est pourquoi ils voudront une maison déjà toute rénovée.

Ils veulent avoir le fleuve à leurs pieds, dans l'intimité, loin de la rumeur urbaine. Ils y ont longtemps rêvé. La maison cependant s'accordera à leurs habitudes de confort, leur culture raffinée en matière d'aménagement intérieur. Ils l'habiteront 10 ans, peut-être 15. À moins qu'elle ne leur serve de résidence secondaire. Ensuite, il gagneront la ville.

Entre-temps, certains l'auront transformée en B & B, voire en galerie d'art. Non pour s'enrichir, mais par plaisir.

«Il n'y a pas que les baby-boomers à l'aise qui ont les moyens de s'offrir une résidence de luxe sur le bord du fleuve. Il y a des jeunes aussi qui, dans le sillage ou non de leurs parents, ont réussi en affaires», pense Anne Turcotte.

Un citoyen depuis 35 ans de Saint-Pierre constate que plusieurs acquéreurs de propriétés ancestrales ou architecturales de grand prix s'en vont après quelques années.

Dans un monde où triomphe l'éphémère, le tour de l'île et la même vue sur le fleuve finit par les ennuyer; le pont et son affluence les tourmente; l'hiver, ils se sentent isolés.