Dans le Nouvo Saint-Roch, rue Saint-Joseph, quelques boutiques portent la marque de leurs créateurs. La conception de ces boutiques-ateliers ne relève pas d'une mode, ni de tendances passagères. Ici, l'esprit des lieux et les produits forment un tout qui interpelle le visiteur. Au 537, rue Saint-Joseph, ce sont les complets, les vestons et les pantalons du couturier Philippe Dubuc qui affichent leur style à fois moderne et rebelle dans un environnement aéré, industriel et minimaliste. Les présentoirs - de simples barres d'acier - forment des lignes droites, centrées et parfaitement alignées qui mettent en valeur la griffe Dubuc.

Philippe Dubuc, un des grands noms de la mode masculine québécoise, a délibérément choisi le Nouvo Saint-Roch pour l'ambiance de ce vieux quartier qui s'urbanise sans dénigrer le passé. La boutique occupe une partie de l'ancien Zellers, un 5, 10, 15 (Dollorama) qui a vécu les années glorieuses de la rue Saint-Joseph, alors que des Québécois de tous les coins de la provin- ce venaient y magasiner. De ce passé subsistent certains éléments, dont un mur de briques et des poutrelles d'acier.

«Ces éléments sont apparents et c'est voulu parce que l'objectif était d'habiter le site, d'y voir la matière. C'est ce qui met en valeur le côté brut des lieux», explique au téléphone l'architecte Gilles Saucier, de la firme Saucier Perrotte, qui a participé au concept de la boutique Philippe Dubuc à Québec ainsi qu'à celles que le couturier a ouvertes dans la métropole.

Presque un atelier

L'architecte rappelle que la mode haute couture a une façon personnelle de s'exposer qui n'a rien à voir avec les boutiques multimarques. C'est un espace plus proche de l'atelier où on sent le travail de l'artisan. Vues d'en bas, les poutrelles d'acier de la boutique s'apparentent à la structure métallique d'un pont ou d'un train aérien. Mais l'important, c'est d'imaginer sa propre fiction, souligne l'architecte. La disposition des éléments y contribue. Ainsi, l'église Saint-Roch juste à côté a alimenté la réflexion des créateurs, d'où le design en croix qui parcourt le plafond sur sa longueur et dont les bras semblent se prolonger à l'infini par un jeu de fluorescents et de miroirs.

Mais avant d'atteindre cette zone de lumière, l'architecte a tracé une bande noire qui définit des zones, dont celles des salles d'essayage, du comptoir de services. La zone centrale d'un gris poussiéreux et au plancher de béton poli sied bien aux collections Dubuc, qui traduisent un esprit à la fois moderne, intemporel et rebelle.

La boutique-atelier de la rue Saint-Joseph appartient à Jean-Daniel Lapierre. Ce diplômé de l'école supérieure de mode s'est spécialisé en commercialisation avant d'entreprendre un stage chez Dubuc à Montréal. Pour lui, ce fut un coup de foudre professionnel. Et son cheminement dans l'entreprise du couturier l'a amené à proposer l'ouverture d'une boutique à Québec.

lfournier@lesoleil.com