Un assemblage d'oeuvres encadrées, d'images et d'objets ne se fait pas sans une minutieuse préparation, assure Amlyne Phillips qui, avec Tania Perreault, a aménagé un mur de cadres au bar 3643 St-Laurent Apt. 200, à Montréal. Toutes deux ont conçu une composition de cadres dans leur propre logement. «J'en ai fait une autre au chalet», ajoute Tania. «Et j'en complète deux pour un resto qui sera bientôt inauguré dans le Vieux-Montréal», révèle Amlyne.

Voici donc 10 de leurs meilleurs conseils pour une composition murale qui fera de l'effet.

D'abord, faire l'essai au sol

Pour trouver une disposition harmonieuse et avant de faire le moindre trou au mur, il est recommandé de préparer la composition de cadres au sol. On évite ainsi l'aspect brouillon! «À l'Apt. 200, j'ai testé une trentaine de cadres différents pour en retenir à peine 15. Pour la maison, il n'est pas nécessaire d'en essayer autant», explique Amlyne.

Autre méthode: poser des feuilles de papier de la taille des tableaux au mur afin de trouver le meilleur regroupement, qu'il soit réalisé au-dessus d'un canapé, d'un manteau de cheminée, dans une salle à manger, une chambre, un couloir ou même une salle de bains!

Créer un centre

Surprise! Au bar du boulevard Saint-Laurent, la pièce centrale du mur de cadres est... un téléviseur! «Une demande des propriétaires», précisent Amlyne et Tania. Heureusement, l'écran plat se fond dans la composition. Autrement, il est avisé de placer le plus grand cadre au centre et de compléter avec les plus petits. Un grand miroir peut aussi agir de point central.

Amlyne Phillips, designer d'intérieur et fondatrice de La Chambre Design, a créé une composition de cadres dans son appartement, à Montréal. Notez la forme ovale de l'ensemble.



Rechercher une forme ovale


Pour s'assurer d'un résultat attrayant, Amlyne préfère, d'abord, positionner les cadres au centre du mur et finir aux extrémités, afin de former un assemblage ovale très allongé. Dans une montée d'escalier, une forme plus triangulaire est indiquée.

Équilibrer

«C'est mathématique! Il importe d'équilibrer visuellement les formes, les couleurs et les finis. D'où l'importance de contrebalancer grâce à des rappels, préférablement en diagonale, croit Amlyne. Ici, par exemple, le grand cadre ornementé blanc a été contrebalancé avec un miroir rétro, installé plus haut, de l'autre côté. Un cadre plus simple aurait pu convenir.»

Opter pour la variété

C'est la quantité et la variété des oeuvres et des cadres qui créent le style de cette déco murale. «Au bar, nous avons mélangé des oeuvres d'art - signées par l'artiste montréalais Whatisadam et du Londonien A.CE, notamment - avec des images de vieux journaux, des affiches, une assiette antique et même une maison canadienne brodée par la mère de l'un des propriétaires», énumèrent les designers. «La majorité des cadres proviennent de brocanteurs, de marchés aux puces et même de greniers», confie Amlyne.

Identifier un fil conducteur

Une astuce pour se faciliter la tâche: le principe d'unité de couleurs dans les images. Autre solution: des cadres de finition identique procureront un effet plus homogène.

Miser sur la touche vintage

Amlyne et Tania préfèrent les cadres vintage. «Ils ont beaucoup de caractère», disent-elles. Chinés (dans les marchés aux puces, les brocanteurs...) ou récupérés, certains peuvent être repeints à la peinture en aérosol alors que d'autres affichent leur splendide patine.

Éviter la concurrence

De vieilles chaises peintes en blanc entourent de longues tables (faites de bois de grange verni), à l'Apt. 200. Ainsi uniformisées, elles n'entrent pas en «concurrence» avec le côté éclectique des tableaux au mur. Une façon de prévenir l'excès de couleurs et de textures.

Tania Perreault, designer ébéniste, à la tête de l'atelier Lovasi, a réalisé un assemblage de cadres et d'objets sur une longue tablette en bois de grange.



Unifier avec une longue tablette


Pas envie de clous au mur? Pourquoi ne pas disposer vos oeuvres et vos objets sur une longue tablette. Cette enfilade tend à unifier la disparité. «C'est ce que j'ai fait dans mon salon, à Montréal, indique Tania. J'ai une grande toile qui agit comme point focal et une série de trouvailles (ancienne photo de famille, vieilles lunettes, balance, cadre vide et rabot rétro...) le long d'une tablette en bois de grange.»

Intercaler des objets

À mi-chemin entre le tableau d'inspirations et le cabinet de curiosités, le mur de cadres regroupe non seulement des visuels (tableaux, sérigraphies, photos...), mais aussi des objets qui «racontent» une histoire. On n'hésite donc pas à intégrer et mettre en valeur des souvenirs de voyage et des coups de coeur: du miroir aux clés en passant par la carte postale.

Tout compte fait...

Quelle que soit la démarche adoptée, il n'y a pas de règles strictes dans l'accumulation d'oeuvres encadrées sur un mur, pense Marcel Marcotte, technicien aux installations, au Musée des beaux-arts de Montréal.

«C'est l'art de la surcharge visuelle et, à la fin, c'est l'oeil qui est le dernier juge», dit-il. Ce dernier rappelle qu'une composition de tableaux harmonieuse comporte des cadres de niveau, tous bien droits. «Optez pour deux points d'appui plutôt qu'un seul, recommande-t-il. Peu importe votre système d'accrochage (fil métallique, oeillets...) et d'ancrage (crochets, clous, vis ou bandes adhésives), assurez-vous que vos cadres demeurent stables au fil du temps.»

«Aussi, n'ayez pas peur de déplacer vos tableaux», enchaîne Emily Robertson, historienne d'art et directrice de Station 16, une galerie montréalaise qui représente la relève dans le milieu de l'art urbain.

En effet, un assemblage de tableaux peut évoluer...

«Nous encourageons ce type d'accrochage auprès de la jeune génération, poursuit-elle, car il est plus facile de commencer une collection d'oeuvres d'art avec de petits tableaux, plus abordables. Ceux-ci peuvent être insérés parmi des sérigraphies, des photos, des miroirs et même des cadres sans toile.»

Enfin, une composition trop symétrique ou contrôlée n'est pas souhaitable, considère Amlyne Phillips. «Il est essentiel de planifier, mais il ne faut pas que ça paraisse!» conclut-elle.

Photos Marco Campanozzi, La Presse