Dans la vie de tous les jours, on touche du bois pour appeler la chance. Dans cette rubrique, on le touchera pour en faire des meubles et d'autres objets délicats et ornés. «Toucher du bois», c'est entrer dans le sillage de l'ébénisterie. À partir des rudiments. Cela, avec le concours de deux ébénistes et professeurs d'ébénisterie à l'école Artebois, rue de la Concorde, à Québec. L'un, Éric Thériault, est spécialisé en sculpture d'ornementation; l'autre, Pierre Pagé, en finition.

Quel art méconnu au Québec que la marqueterie! Dans la quasi-totalité des cas, lorsqu'on aborde ce sujet, la personne est sûre de son fait : la marqueterie, c'est du plancher. Erreur! Voilà plutôt de la parqueterie. Un recouvrement de plancher en bois, ça s'appelle un parquet, point à la ligne. La marqueterie est un art des plus délicats qui n'a rien à voir avec un plancher.

 

Démystifions les mythes

Qui dit marqueterie dit placage. Qui dit placage ne dit pas nécessairement piètre qualité. Pour la petite histoire, le travail des placages entame son véritable essor à la Renaissance; tant et si bien qu'au XVIIIe siècle, âge d'or des arts décoratifs, la noblesse n'est entourée pratiquement que de meubles plaqués. Pourquoi? Parce qu'au tournant de la Renaissance, avec l'exploration du globe, de nouvelles essences de bois sont rapportées en Europe. Ces essences coûtent cher et leur stabilité au gré des changements de saisons laisse à désirer. Pour pallier ces inconvénients, on scie les billes de bois en feuilles de trois à quatre millimètres d'épaisseur, même davantage, et on les colle sur un panneau de bois massif : le principe du contre-plaqué était né. On peut diviser le travail des placages en deux branches : le frisage, plus géométrique, et la marqueterie, beaucoup plus complexe. On pourrait résumer la marqueterie à un casse-tête dont chacune des pièces est faite d'une essence de bois.

Au XVIe siècle, les premiers menuisiers en meubles à fabriquer des cabinets plaqués d'ébène seront appelés des «menuisiers en ébène», puis des «ébénistes». Au fil du temps, le terme finira par s'appliquer aux artisans fabriquant des meubles plaqués.

Ce qui fait la qualité d'un meuble dépend de deux choses : la qualité des matériaux employés et le choix des techniques. Et plaquer un meuble n'est pas une mauvaise technique. Pour prendre un exemple concret, il est clair que les restaurateurs des siècles futurs vont s'arracher la tête pour essayer de conserver nos meubles de panneaux de particules plaqués d'un feuil de bois de 0,5 mm d'épaisseur. Ce n'est pas la technique le problème, c'est le matériau. Et le problème ne vient pas non plus des entreprises puisque les artisans offrant de meilleurs produits ne roulent pas sur l'or, faute de clients intéressés à payer davantage pour un meilleur produit...