L'école de rang no 8 de Saint-Henri de Lévis célèbre aujourd'hui ses 100 ans. Jusqu'en 1962, elle a accueilli des élèves dans la classe qui occupait la moitié de son rez-de-chaussée. La maîtresse, qui logeait dans la seconde partie, serait sans voix si elle la voyait maintenant, dans ses coquets atours de résidence secondaire.

L'école de rang no 8 de Saint-Henri de Lévis célèbre aujourd'hui ses 100 ans. Jusqu'en 1962, elle a accueilli des élèves dans la classe qui occupait la moitié de son rez-de-chaussée. La maîtresse, qui logeait dans la seconde partie, serait sans voix si elle la voyait maintenant, dans ses coquets atours de résidence secondaire.

En fait, l'une des dernières maîtresses d'école, Lisette Lacasse, est sans doute sur les lieux ce matin même, alors que se déroule l'Amicale de la petite école no 8, organisée par Jean-Marie Lalande, propriétaire depuis 1992. Pour le centenaire de sa maison, il a convié plus de 125 personnes, dont une trentaine ont troqué le jean pour la redingote et la robe à froufrous.

 Lui-même s'est laissé pousser les cheveux et la moustache afin de tenir son rôle de maître de cérémonie. Sa fille Geneviève revêt la robe noire de soeur Sainte-Hélène, la supérieure de l'époque. «On reconstitue la rentrée de 1908», résume M. Lalande. Avec le carton d'invitation, il a glissé des photocopies d'un vieux catalogue de Sears Roebuck pour qu'il serve de guide vestimentaire.

Jean-Marie Lalande est un retraité actif. Dans sa maison du rang Jean-Guérin Ouest, il y a plusieurs chaises berçantes anciennes, sur lesquelles il ne s'assoit pas souvent.

Quand il a acheté cette ancienne école, elle ne payait pas de mine. Il lui a fait un sacré lifting, en lui laissant ses attributs originaux, mais en la transformant en confortable pied-à-terre de campagne. À l'époque, elle répondait à des normes gouvernementales qu'il a tenu à respecter.

 Ce bâtiment de bardeaux est maintenant doté d'un second niveau où se trouvent une chambre, un dortoir et une salle de bains. Il y a 11 ans, c'était un grenier poussiéreux.

Quand sa femme Cécile est morte, en janvier 1997, Jean-Marie venait de prendre sa retraite. «J'ai entrepris de finir le haut pour me changer les idées», a-t-il confié.

On imagine ses sept petits-enfants s'y ébattre quand il pleut. Parce que par beau temps, ils se réfugient dans la charmante maisonnette que grand-papa a construite dans la cour. L'été, ils prennent leur douche dans un cabinet extérieur fermé sur trois côtés, le quatrième donnant sur un immense champ. Séduisant concept...

Cette incursion dans l'univers d'une école de rang nous ramène à Émilie Bordeleau, l'héroïne du roman Les filles de Caleb, magistralement transposé au petit écran. À l'époque, les jeunes maîtresses n'avaient pas le droit de se teindre les cheveux ni de recevoir de garçons. Elles vivaient et travaillaient dans leur école, que chauffait un gros poêle à bois.

Un poêle qui a voyagé

Jean-Marie Lalande a déniché à Inverness un poêle de fonte qui, par le plus incroyable hasard, trônait dans la petite école du village de Belle-Rivière (maintenant Mirabel), fréquentée par son père, Donatien. Le mastodonte occupe le coeur du rez-de-chaussée, dont le plancher porte encore les marques des pattes de pupitre.

Les murs de petites lattes et les moulures sont encore là. Les fenêtres à six carreaux, de modèle français, ont été changées, mais elles ont gardé leur apparence originale. La grande pièce est pleine d'antiquités : chaises de babiche de l'arrière-grand-père Presseault, petit banc ayant appartenu à sa mère, table à pointes de diamant taillées au couteau, sculptures de Pierre Bourgault (de Saint-Jean-Port-Joli), chaises de Bellechasse.

Au fond, la nouvelle annexe - baptisée le «haut côté» par Jean-Marie - a conservé un mur de bois de grange original. Cette pièce amplement fenestrée comporte elle aussi son lot d'antiquités, notamment une encoignure de Verchères dont les portes de bois de planches datent de 1750.

Un calendrier de 1962 a été collé au mur. Il témoigne du temps révolu où les numéros de téléphone n'avaient que deux chiffres, où un poisson était dessiné sur chaque vendredi pour symboliser le jour maigre prescrit par l'Église, et où la caisse populaire pouvait publier des calendriers bilingues sur le thème du chemin de croix.

 

Photo Érick Labbé, Le Soleil

La mère de Jean-Marie était maîtresse d'école. Ce banc lui appartient.