Quand Raphaële Leclerc a pris possession de son loft, ses yeux d'étudiante en architecture en ont tout de suite repéré le potentiel: les murs de brique, les immenses fenêtres, les plafonds vertigineux. Mais le reste du charme de son loft, c'est elle qui l'a insufflé. Elle s'est retroussé les manches et, avec l'aide de son père sculpteur, l'a transformé de ses propres mains. Et sans que cela lui coûte les yeux de la tête. Car presque tout, dans son loft, a été construit à partir d'objets recyclés, trouvés, donnés. Le système D dans toute sa splendeur, quoi.

Quand Raphaële Leclerc a pris possession de son loft, ses yeux d'étudiante en architecture en ont tout de suite repéré le potentiel: les murs de brique, les immenses fenêtres, les plafonds vertigineux. Mais le reste du charme de son loft, c'est elle qui l'a insufflé. Elle s'est retroussé les manches et, avec l'aide de son père sculpteur, l'a transformé de ses propres mains. Et sans que cela lui coûte les yeux de la tête. Car presque tout, dans son loft, a été construit à partir d'objets recyclés, trouvés, donnés. Le système D dans toute sa splendeur, quoi.

 >> En photos: visitez le loft aménagé de façon ingénieuse par Rafaële Leclerc.

Le loft de Raphaële Leclerc n'a pas toujours eu autant de panache. Quand elle y a emménagé, à la fin de 2004, il existait déjà deux mezzanines bringuebalantes. Elle en a solidifié la structure et en a construit une troisième. Les escaliers, qui prenaient beaucoup de place, ont été démolis et remplacés par de délicates - mais vertigineuses! - échelles. Quant au plancher des mezzanines, elle l'a recouvert de feuilles de plancher flottant dénichées dans un centre de liquidation de construction. «C'était beaucoup moins cher», affirme-t-elle.

Raphaële a installé sa chambre sur l'une des mezzanines. La vue, par la gigantesque fenêtre, est superbe.

Même sa salle de bains se décline sur deux étages: toilettes et douche en bas, baignoire au deuxième. Elle a recyclé une ancienne baignoire de physiothérapeute. On peut s'immerger jusqu'au cou dans l'immense cuve en inox. «On est vraiment bien en haut, fait remarquer Raphaële. On est comme dans une bulle, dans un autre environnement. Au lieu de voir les toilettes, on peut regarder dehors, par la petite fenêtre...»

Le mobilier de cuisine a été récupéré d'un ancien couvent de soeurs. Le réchaud est devenu îlot de cuisine. Raphaële a logé son garde-manger dans un ancien séchoir à linge à vaisselle en remplaçant la pôle qui s'y trouvait par des tablettes.

Mille et une idées

Le loft recèle mille autres idées maison: la peinture provient d'un centre de récupération, la table du salon en ardoise a jadis été une table de billard, les tableaux qui ornent les murs ont été peints par des amis de la famille, la lampe de la salle à manger est une création de son père et les rideaux ont été confectionnés par sa mère. Et Raphaële a coulé elle-même la dalle de béton qui constitue sa table de cuisine.

D'autres éléments qui faisaient déjà partie du décor ont simplement été déplacés. Par exemple, un gros néon était accroché au plafond. Trouvant l'éclairage déprimant, Raphaële l'a placé à la verticale sur le mur. Un détail délicat qui change complètement la dynamique de l'espace.

Certes, Raphaële Leclerc provient d'une famille d'artistes et elle oeuvre elle-même dans le domaine de l'architecture, ce qui lui facilite les choses. Mais selon elle, n'importe qui peut se fabriquer des meubles uniques. «Les matériaux sont beaux par eux-mêmes, souligne-t-elle. Suffit de prendre la peine de le faire. Mais il ne faut pas être pressé!»

L'expropriation plane sur le loft

 Le projet de reconstruction de l'échangeur Turcot pourrait bouleverser la vie des gens qui vivent dans les quartiers limitrophes. Les résidants du 780 Saint-Rémi, où habite Raphaële Leclerc, sont du lot. Rien n'est encore coulé dans le béton, mais tout indique que le bâtiment tombera sous le pic des démolisseurs. Lors des sessions d'information qui ont eu lieu cet automne, le ministère des Transports du Québec (MTQ) a annoncé aux gens du quartier que le 780 Saint-Rémi serait démoli. Le bâtiment avait même été rayé des plans.

 Des ajustements

 Interrogé à ce sujet, le MTQ affirme qu'il est trop tôt pour fournir une réponse exacte, puisque les travaux ne débuteront que dans la deuxième moitié de 2009. Le 780 Saint-Rémi «fait partie des immeubles touchés par le projet Turcot, mais il y aura plusieurs ajustements avant le plan final», affirme Mario St-Pierre, le représentant du Ministère.

 Pas très optimistes

 Mais les résidants du quartier ne sont pas trop optimistes. «D'une façon ou d'une autre, le bâtiment est dans le chemin et il va falloir le démolir», croit Jody Negley, du Comité des citoyens du village des Tanneries, un groupe de résidants du quartier. Selon elle, si le 780 Saint-Rémi est détruit, près de 400 personnes perdront leur logement. Une clientèle bigarrée d'artistes, d'étudiants et même de familles et de personnes âgées y a élu domicile.

 Chose certaine, les résidants pataugent dans le flou depuis plusieurs mois. Mais ils en ont vu d'autres. «Certaines gens du quartier ont vécu la construction de l'échangeur, et maintenant, ils vont être touchés par la déconstruction», constate Raphaële Leclerc, qui perdra aussi son loft si le 780 Saint-Rémi est rasé.

 

Photo Robert Mailloux, La Presse

Le 780 Saint-Rémi est un ancien bâtiment industriel situé entre l'autoroute Ville-Marie et les voies du CN, à l'extrémité ouest de Saint-Henri. Il pourrait être démoli dans la construction du nouvel échangeur Turcot.