Impressionnante, cette colonne de marbre Portor! Cette porte en chêne, cette bibliothèque en acajou, ces armoires patinées par l'usure et le temps. De toute beauté!

Vous dites qu'on peut toucher?

Ciel, c'est bien vrai, tout est faux!

Peindre l'illusion, c'est ce que Fabrice Le Guern fait depuis plus de 35 ans. Sous sa touche, un mur de gypse, une porte quelconque ou un vieil ascenseur se métamorphosent et prennent du galon. Son job de peintre décorateur est à la fois un art et un métier.

Le peintre a d'abord exercé son métier en France, d'où il est originaire, avant de venir s'établir au Québec au début des années 90. Ici, il a fondé l'entreprise Illusions Textures, spécialisée dans les faux finis, les teintures, la restauration patrimoniale et tutti quanti. Il travaille dans des maisons privées, des institutions, des églises et des commerces. Pas de décors de théâtre? «Le théâtre, le cinéma, c'est une autre technique, explique-t-il. C'est fait pour que le 3D soit vu de loin. Moi, il faut que le 3D soit vu tout de suite. Si c'est une fausse moulure, un faux marbre, il faut presque que la personne y touche pour se rendre compte que c'est peint.»

Les gens qui font appel à un peintre décorateur veulent avoir des choses très précises, explique M. Le Guern. «Ils vont chercher une texture qui va aller avec un tissu ou avec un papier peint, une patine qui va donner de l'ambiance. Au lieu que la maison ait l'air neuve, on va lui donner 30, 40, 100 ans. Le vieillissement va lui donner de l'âme.»

Techniques variées

Les techniques utilisées sont variées et souvent très anciennes, dit celui qui, à 16 ans, a d'abord fait une formation de peintre en bâtiment à Paris. Après, il est allé se spécialiser en peinture décorative au réputé Institut supérieur de peinture Van Der Kelen-Logelain, à Bruxelles. Il a ainsi canalisé son intérêt pour l'art et la création.

«La peinture décorative est un métier très technique, précise M. Le Guern. Ça existe depuis très longtemps, on n'a rien inventé. C'est un travail de précision. Toutefois, après la formation, on exploite ça beaucoup tout seul. On joue avec le plâtre, le stuc, la peinture, on cuisine... Moi, j'ai toujours besoin de chercher, d'apprendre, sinon je vais m'ennuyer.»

Le peintre Le Guern travaille avec «tout ce qui peut se travailler»: la peinture, des pigments, de la colle, du ciment, du papier, du plâtre, du sable, de la chaux, des feuilles d'or, de cuivre, d'argent, du coton... Il a créé d'innombrables échantillons qu'il peut montrer aux clients. La plupart du temps, il travaille directement sur le support, chez le client.

Photo Hugo-Sébastien Aubert, La Presse

Dans le marbre, le faux est utilisé depuis des siècles.

Le vrai beau faux

Pourquoi le faux? «Les bois riches, ce n'est pas possible d'en avoir partout, ça coûterait trop cher. Même chose avec le marbre. On n'avait pas la technologie pour mouler plein de formes. Le faux est utilisé depuis des siècles.»

L'ancien est toujours d'actualité. Le peintre cite l'exemple d'un client à Montréal qui avait de somptueuses embrasures de fenêtres en marbre, alors que les fenêtres elles-mêmes étaient en aluminium blanc. Après le passage de M. Le Guern, tous les châssis étaient en marbre.

«Le plaisir du métier, c'est de créer des textures pour les clients. On joue avec les couleurs, les produits, les transparences... C'est quand même magique», lance-t-il avec conviction.

Photo Hugo-Sébastien Aubert, La Presse

Le peintre Le Guern travaille avec «tout ce qui peut se travailler»: la peinture, des pigments, de la colle, du ciment, du papier, du plâtre, du sable, de la chaux, des feuilles d'or, de cuivre, d'argent, du coton...