Pour plusieurs, la poterie rime encore avec l'artisanat de l'époque du retour à la terre ou des ateliers des cercles de fermières. Or, sans crier gare, ce savoir-faire connaît un nouvel élan, tout en maîtrise, en délicatesse et en audace. Beaucoup se laissent aujourd'hui séduire par cette matière que certains qualifient de très... sensuelle. Serez-vous du nombre ?

Sensuelle terre cuite

Dans les restaurants qui soignent leurs présentations, dans les salons de jeunes artisans, comme le Souk@SAT et Puces Pop, et un peu partout où l'on célèbre le « beau » fabriqué à la main, la poterie fait fureur. Découvrez la sexy céramique d'aujourd'hui !

« On est loin du potier qui part avec sa brouette pour aller creuser lui-même son argile », lance Catherine Auriol, céramiste et propriétaire de l'atelier-boutique Gaïa, avenue Laurier Est. Les artisans qui ont choisi ce sensuel métier ont accès à de nouveaux ingrédients, comme des terres et des glaçures plus faciles à travailler, des couleurs funky, etc. », explique-t-elle.

Ces jours-ci, on peut manger dans la belle vaisselle mate de Mme Auriol lorsqu'on fréquente les restaurants Le Mousso, La Prunelle, La Récolte et Branzino, entre autres.

Les créations épurées de Céramik B mettent en valeur la cuisine de John Winter Russell, au restaurant Candide, et d'Émilie Rizzetto, à l'Auberge Saint-Gabriel. Joe Beef fait affaire avec Benoît Daigle depuis un moment. Quant au Bouillon Bilk, il a passé une belle commande à la jeune Gaële Dufaux-Mathieu.

« C'est difficile de vivre de la céramique. Le travail fait à la main n'est qu'une toute petite portion de ce que les gens achètent. Heureusement, une fois qu'on l'a développée, la clientèle est très fidèle », affirme Basma Osama, la fondatrice de Céramik B., qui n'est pas malheureuse de l'engouement que suscite son art par les temps qui courent.

Une des premières céramistes à être tombée dans l'oeil des restaurateurs québécois est la réputée et prolifique Pascale Girardin. On retrouve ses pièces au Laurie Raphaël, au Toqué !, aux 400 Coups, chez Hoogan et Beaufort, etc.

« Depuis que Noma a été nommé meilleur restaurant au monde (2010) et qu'il a utilisé de la céramique locale, beaucoup de chefs ont décidé de se procurer un type de vaisselle qui ressemblait à celui utilisé dans le célèbre restaurant vu dans leur restaurant. Particulièrement le grès gris, mat, avec une terre apparente, raconte Mme Girardin. Le mouvement "farm to table" a aussi eu un impact sur la manière dont les chefs réfléchissent à leurs pratiques. Ils veulent se procurer des produits locaux, donc la vaisselle en céramique fait partie de cette mouvance. Nous sommes arrivés tardivement dans le mouvement, mais des chefs comme Daniel Vézina avaient tout de même pris cette décision bien avant Noma. J'ai signé la première collection de table pour le Laurie Raphaël de Québec en 2006. »

Et quand ils n'ont pas les moyens d'acheter du fait à la main québécois, les restaurants achètent des pièces industrielles qui imitent le style des potiers ! Ce n'est donc pas surprenant que bien des gens aient maintenant envie, à la maison, de manger dans de belles assiettes qui portent une signature d'artisan.

De la table aux tablettes

À la fois utilitaire et décorative, la vaisselle de céramiste embellit la table, certes, mais elle peut également habiller les murs de la cuisine ou de la salle à manger. Il suffit d'aménager des tablettes, des boîtes murales ou un autre support pour mettre ses trouvailles en valeur.

Et qui a dit que ces petites tasses à thé n'étaient faites que pour recevoir des boissons chaudes ? Un mini-cactus y trouvera également son bonheur. Comme dirait Catherine Auriol : « Nous les faisons. Vous les remplissez. »

Conseils pour premiers acheteurs

Comme le prix est de 30 $ à 80 $ le bol ou l'assiette, acheter tout un ensemble de vaisselle en céramique faite à la main vous coûtera un bras et une jambe. « On s'entend, de toute manière, sur le fait que les sets qui matchent, c'est fini, ça ! », lance Catherine Auriol. Nous avons demandé à la propriétaire de l'atelier-boutique Gaïa de guider les gens dans leurs premiers achats.

Les ensembles dépareillés

« Chez moi, il n'y a pas deux assiettes pareilles, affirme la céramiste et boutiquière. Quand je monte une table, mes invités choisissent leur place en fonction de l'assiette. Des fois, ils font des échanges. C'est ludique et dynamique ! »

Choisir ses couleurs

On peut choisir sa palette et décider de s'en tenir à ça, lorsqu'on achète des pièces. Ça donne déjà un cadre. Tout blanc ? Gris et rose, peut-être ? Ainsi, les amis qui veulent faire des cadeaux savent également dans quelle palette piger.

S'en servir!

Les pièces utilitaires sont justement faites pour être utilisées. « Mais les gens ont souvent peur de casser leur belle vaisselle. Vous les portez, vos souliers à 300 $ ? Alors, pourquoi ne pas se servir d'un bol à 20 ou 30 $ ? »

Ne pas avoir peur de ses coups de coeur

« Les gens me disent parfois : "C'est beau, mais qu'est-ce que je vais mettre dedans ?" Si vous aimez une pièce, vous trouverez bien comment vous en servir. » Au pire, elle sera décorative.

Mettre sa vaisselle en valeur

Vous ne voudrez sûrement pas enfermer votre collection en devenir dans les armoires de cuisine. À mesure qu'elles s'accumulent, posez vos pièces sur des tablettes ou dans une étagère qui les met en vedette.

Événements à venir

Les bols du partage

L'événement, qui permet d'amasser des fonds pour l'autonomie alimentaire, fête cette année son 10e anniversaire. On paie 25 $ à l'entrée, ce qui donne droit à la soupe, au pain et au bol de potier dans lequel vous mangez ! Le samedi 2 avril à la Boucherie Lawrence, le 3 avril à la synagogue Dorshei Emet, le 5 avril au Café Zéphyr et le 9 avril au Dépôt alimentaire NDG.

La Virée des ateliers

L'expo-vente aura lieu du 5 au 8 mai, cette année, dans les nombreux ateliers de la rue Parthenais. Les céramistes Makiko Hicher, Marianne Chénard, Marianne Chemla, Isabelle Huot et Loïc Therrien y travaillent.

www.lavireedesateliers.com

1001 pots

C'est la 28année de cette grande expo-vente de céramique en plein air. Du 8 juillet au 14 août, à Val-David, on pourra se laisser tenter par les pièces d'une centaine de créateurs. Ça va faire mal au portefeuille !

1001pots.com

Ceramik B.

Avec des études en psychologie et en sociologie, Basma Osama se destinait à une carrière qui sollicitait avant tout sa tête. Mais ses mains s'impatientaient. Elle a donc décidé d'apprendre le métier de céramiste. « C'est une passion, pas un métier », reprend celle qui a ouvert son studio en 2006 mais qui a dû trimer afin de pouvoir en vivre décemment. Mme Osama travaille principalement avec des moules pour créer ses magnifiques formes organiques. Elle tâte aussi de pigments très purs. « J'ai toujours été minimaliste. La ligne, les formes, l'ergonomie de la pièce sont à la base de mon travail. » Bref, les carafes, bols, tasses et autres assiettes de Ceramik B. sont conçus afin d'être aussi agréables pour les mains que pour les yeux.

En plus de son importante production d'objets utilitaires, la céramiste crée des murales sur fond de bois, où la porcelaine devient une langue inventée d'un très grand lyrisme visuel.

>>>Consultez le site de Ceramik B. (en anglais)

PHOTO ÉDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, LA PRESSE

Signé Ceramik B.

Christian Roy

Bien que sa collection personnelle soit sur le marché depuis peu, Christian Roy tourne depuis bientôt 20 ans. Il a surtout travaillé dans l'ombre, comme tourneur pour Pascale Girardin, entre autres. « J'ai mis du temps à être prêt à faire ma propre production. Pascale m'a beaucoup aidé à développer mon style. Elle m'a dit : "Pars des gestes que t'aimes faire et non du résultat auquel t'aimerais arriver". »

À regarder ses pièces, on devine donc que les gestes que le céramiste affectionne le plus se pratiquent avec des tournassins, ces outils qui permettent de « sculpter » l'argile. Sur ses bols, tasses et pichets, il trace des lignes et des chevrons. Ses gobelets reprennent la forme classique du verre à bistrot, mais avec les charmantes imperfections propres à la poterie faite à la main.

Lorsque nous l'avons rencontré, le potier travaillait jour et nuit afin de produire suffisamment de pièces pour sa participation à la très courue exposition One of a Kind, à Toronto.

>>>Consultez le site de Christian Roy.

PHOTO ÉDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, LA PRESSE

Signé Christian Roy.

Gaëlle Dufaux-Mathieu

La jeune femme de 25 ans a terminé sa formation de trois ans en technique de métiers d'art - option céramique il y a exactement un an. Déjà, elle a reçu des commandes d'un des meilleurs restaurants à Montréal, le Bouillon Bilk, et de son petit frère, Cadet, un bar à vin qui ouvrira ses portes à la fin avril.

Son style s'exprime en formes simples, sans fioritures, et en couleurs modernes. « Je suis encore à l'étape de vouloir tout essayer et partir dans toutes les directions. Mais il ne faut pas que je me perde », avoue la potière.

Question de faire un peu le vide et d'aller s'inspirer ailleurs, Gaële profite de la fin de son année dans l'Atelier transit du Centre de céramique Bonsecours pour faire un voyage en Amérique latine.

Elle sera de retour en juin, pour exposer ses pièces aux 1001 pots cet été, à Val-David, et s'occuper du salon de thé du plus couru événement de céramique au Québec.

>>>Consultez le site de Gaëlle Dufaux-Mathieu.

PHOTO ÉDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, LA PRESSE

Signé Gaëlle Dufaux-Mathieu

Catherine Auriol

La propriétaire de l'atelier-boutique Gaïa est un des piliers du milieu de la céramique québécois. Tout à tour, elle expose et vend les pièces d'une dizaine d'artisans québécois. Le grand atelier à l'arrière sert d'espace de travail et de salle de cours.

Quant à Catherine Auriol céramiste, elle a déjà été qualifiée de « David Bowie de la poterie », pour ses qualités de transformiste. Si elle a sa signature, avec des pièces superbement passe-partout, qui servent entre autres de canevas aux plats de plusieurs chefs montréalais, la céramiste est particulièrement polyvalente et s'adapte aux désirs et aux besoins des clients. Elle a d'ailleurs longtemps travaillé à perfectionner toutes sortes de techniques.

Gaïa a vu le jour en 1999 et a connu plusieurs transformations depuis ses débuts. La boutique vaut la peine d'être (re)découverte, comme vitrine sur la variété des styles aujourd'hui pratiqués par les céramistes de chez nous.

>>>Consultez le site de Catherine Auriol.

PHOTO ÉDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, LA PRESSE

Signé Catherine Auriol.

Marjorie Camiré

Les pièces de Marjorie Camiré sont on ne peut plus dans l'air du temps, avec leur glaçure vert tendre et leurs détails dorés. On se les arrachait aux Puces Pop d'avant-Noël. Son travail est d'une élégance et d'une fraîcheur qui parlent à toutes les générations.

C'est après des études plus théoriques en beaux-arts que la jeune femme s'est tournée vers un métier plus manuel. L'argile l'attirait. Elle s'est donc retrouvée au Centre de céramique Bonsecours elle aussi, jusqu'en 2013.

Bien que ses pièces soient droites et précises, Marjorie apprécie la part de mystère que comporte la cuisson de ses pièces. « Quand je travaille avec l'oxyde d'étain, par exemple, c'est blanc à l'application, puis ça rosit. J'aime ne pas avoir tout le contrôle sur ce que je fais. »

>>>Consultez la page Facebook de Marjorie Camiré.

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Signé Marjorie Camiré

Marianne Chemla

Potière, sculpteure, enseignante, Marianne Chemla n'est pas une nouvelle venue. Elle a vécu en Corée et au Japon, ce qui lui a permis d'ajouter plusieurs techniques à son répertoire. Récemment, elle a décidé de se consacrer principalement à son travail de céramiste.

« J'en suis encore à voir à quel rythme je peux travailler. Je suis assez lente ! », constate-t-elle, en rigolant.

Après avoir fait beaucoup de bols avec son tour de potier, celle qui a manifestement un tempérament d'artiste a développé une très jolie « série coquillages » faite d'assiettes blanches façonnées et très texturées. Au dire d'un de ses clients, elles retiennent merveilleusement bien la sauce dans leurs petites cavités, ce qui les rend idéales pour ceux et celles qui aiment éponger leur assiette avec du pain !

>>>Consultez le site de Marianne Chemla.

PHOTO ÉDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, LA PRESSE

Signé Marianne Chemla