Restaurer un meuble ancien et lui donner une seconde vie, voilà un des gestes les plus écologiques qui soient. Parfois, en plus, c'est bon pour le portefeuille. Parfois non. «Si on se procure un meuble de collection, c'est un investissement plus qu'une économie, explique France Cliche, designer, antiquaire et passionnée du patrimoine québécois. Mais il y en a pour tous les budgets.»

Cette «chineuse de style», selon sa propre expression, s'emploie depuis sept ans à développer l'esprit de campagne d'ici, qu'elle juge aussi beau que celui d'Europe, maintenant que le rustique est aussi devenu élégant.

De plus, pourquoi consommer du neuf qui imite le vieux, quand on peut avoir l'original en bon état? «On trouve dans les grands magasins des coffres en pin neufs, usinés en Chine et antiqués de blanc pour faire champêtre, dit France. Mais pour le même prix, disons 895$, je peux trouver et restaurer un authentique coffre en pin à clous de forge.»

France est particulièrement touchée par les meubles du terroir en pin du XIXe siècle. «Ces objets ont une âme, dit-elle. Ils sont émouvants comme un tableau, avec un côté naïf. Les gens recherchent leur authenticité.» C'est ainsi qu'une modeste table à traverse, lavée et cirée, devient une chic console d'entrée. Une huche à pain se convertit en porte-journaux, en classeur, en table à café (avec une vitre sur le dessus), en support à plantes. Dans une salle de bains, elle contient des serviettes joliment roulées.

Féminine patine blanche

Un deuxième volet de sa production, exposé dans sa boutique Bleu Patine de L'Acadie, à Saint-Jean-sur-Richelieu, est consacré aux meubles commerciaux qu'on achetait par catalogue au début du XXe siècle. En patinant leur relief à la caséine (peinture de lait), France Cliche obtient sa collection «blancs de chaux», d'inspiration shabby-chic. «Il y a un côté apaisant, doux et féminin à la blancheur. Il faut donner plusieurs couches de blanc, avec une couleur plus foncée en-dessous, pour qu'une luminosité se dégage de l'objet.»

Troisième corde à son arc, le réemploi de vieux matériaux: une fenêtre de chapelle devient un miroir, un chariot industriel se transforme en table à café, un coffre à outils en coffre à épices, une armoire à tartes en vaisselier, une boîte de cireur en petit podium à poupées, etc. Dans l'atelier, des objets hétéroclites attendent d'être revalorisés: une tête de lit, une balance à cochon, un lavoir à cochon, un évier sec, de la tôle embossée, un escalier de meunier, des portes d'armoires... Dans une maison de North Hatley décorée sur ses conseils (et premier prix 2011 du magazine House&Home), les armoires de bois récupéré côtoient les électroménagers en acier inoxydable.

Où France trouve-t-elle tous ces trésors? En écumant les boutiques d'antiquaires. «À force, on finit par connaître les meilleurs endroits.»

Un conseil: ne pas acquérir un meuble couvert de peinture au plomb, laquelle est toxique et ne s'enlève pas. «Personnellement, je n'achète pas non plus un meuble peint à l'intérieur, ajoute France. Je ne veux pas respirer de près les émanations du décapant, même naturel.»

Un livre de base: Meubles anciens du Québec, par Michel Lessard (Éditions de l'Homme). Deux ressources pour la peinture de caséine: www.artdec.ca et www.tockay.com





Neuf, chic, écolo

Des meubles neufs peuvent aussi s'avérer écologiques. À condition d'être fabriqués localement, à partir de matériaux renouvelables et résistants. Dans ce domaine, Montréal abrite, entre autres, deux entreprises gagnantes: Montauk et À Hauteur d'homme.

Le premier, fabricant et détaillant, confectionne des fauteuils et sofas en bois FSC, rembourrés de plumes d'oie d'élevage, avec un choix de tissus naturels et, si désiré, sur mesure. À partir de 3000$ pour un canapé, plus le tissu. «Même les vis sont biodégradables, affirme le designer Dany Chartier. Placé à l'extérieur, notre sofa disparaîtrait totalement en cinq ans, recyclé par la nature.»

À Hauteur d'homme, de son côté, fabrique des meubles en bois du Québec, presque tous en érable, d'une esthétique sobre qui traversera toutes les modes. «Pour remplacer le bois pris à la nature, nous faisons planter des arbres chaque année, fait valoir Louis-Philippe Pratte, le fondateur. Nous engageons également des personnes en voie de réinsertion sociale.» (L'équité sociale est une valeur fondamentale du développement durable.) Cette entreprise, qui n'a pas encore pignon sur rue, vend en ligne (www.hh.ca) et dans quelques commerces.

Photo fournie par Monde Ruelle

Banc de bois recyclé éclairé par une lampe solaire par Véronique Lamarre chez Monde Ruelle. 650$