L'architecte Édouard Fiset l'a conçue pour lui en 1962, dans un secteur cossu de Sillery. Elle a une façade de panneaux d'amiante. Elle nous laisse tiède. Il faut surmonter cette impression.

L'architecte Édouard Fiset l'a conçue pour lui en 1962, dans un secteur cossu de Sillery. Elle a une façade de panneaux d'amiante. Elle nous laisse tiède. Il faut surmonter cette impression.

Une maison aux lignes pures, dont les parois s'ouvrent et se ferment entre les pièces. De la salle à manger, vue sur le salon et sur le bureau.

Une architecte a été «éblouie» par ses lignes pures et par ses parois qui s'ouvrent et se ferment entre les pièces. Elle l'a achetée en juin. Sa maison présente une esthétique épurée. C'est le propre de son style moderne. Priorité est donnée à l'utilité et à la simplicité. Elle n'est pas à la mode. «Le style moderne rejette la décoration pour la décoration, le détail pour le détail», explique la propriétaire.

Elle a arraché le tapis et, misant sur un look plus industriel, posé du linoléum, dont les rayures, d'un classicisme raffiné, font toute la longueur de la maison et rythment les pas vers la piscine, à l'arrière, puis vers le verger du bois de Coulonges.

La maison de l'architecte a peut-être une façade d'amiante mais ses côtés sont en granit et en cèdre.

Édouard Fiset a recouvert le plafond de tuiles acoustiques. Elles absorbent le son. Il a aménagé un mur de fenêtres qui donnent sur l'arrière, au sud-ouest. Les «pièces de service», comme la cuisine, le vestibule, la salle d'eau, le bureau et la salle de bains, ont été alignées à l'avant, côté nord. Là, quelques fenêtres givrées laissent passer la lumière. Elles préservent aussi l'intimité.

Voilà exprimé le «fonctionnalisme sans ornementation» du style moderne.

Couleurs fluides

La fantaisie de cette demeure vient de ses couleurs, très «années 60». Quand les parois sont ouvertes, la chambre, le bureau, le salon et la salle à manger dialoguent grâce à leurs coloris fluides.

La cuisine est d'origine, sauf le linoléum et le comptoir de stratifié.

Dans la salle à manger, le mur du fond est vert. Il se prolonge dans la cuisine, à l'avant. «Je voulais une continuité avec la haie de cèdre», explique la propriétaire. Elle a appliqué du violet sur les deux faces du mur entre la salle à manger et le salon; du turquoise des deux côtés de celui séparant le salon du bureau; puis de l'orangé entre ce bureau et la chambre. Une fenêtre est percée sur un mur violet. L'automne, les feuillus l'illuminent de leurs orangés.

Vastes, inondées de lumière, unies par les rayures du linoléum et par les tableaux bigarrés de Kitty Bruneau et Hélène Gamache, que l'oeil embrasse de loin en loin, ces pièces en enfilade apaisent, ravissent et surprennent.

Madame a restitué à sa demeure l'esprit des années 1960. «Ça me crève le coeur quand les gens dénaturent des maisons, confie-t-elle. C'est notre patrimoine.»

Elle a préservé tout ce qu'elle pouvait. Elle n'a rien retouché dans la salle de bains attenante à sa chambre. Très tendance, ce lavabo semi-encastré et cette céramique de verre, d'un bleu piqué de doré.

La cuisine est d'origine. Elle a encore ses armoires de contreplaqué, ses poignées chromées et sa cuisinière vieillotte.

La salle de bains à la belle céramique de verre, d'allure très tendance.

«Avant d'emménager ici, j'étais dans les boiseries et les carpettes», raconte la propriétaire. Aucun de ses anciens meubles n'avait sa place ici. De marchés aux puces en antiquaires, d'Ozanam à De retour, elle a déniché des trésors. Une table ovale de chêne biseauté signée Florence Knoll, des chaises Bertoia et un ensemble de dînette de laque blanche l'attendaient chez De retour, rue Saint-Paul.

L'architecte Édouard Fiset se sentirait chez lui dans cette maison. Il remercierait sa collègue d'avoir respecté son aménagement en plan libre et ouvert. Et il irait flatter la chatte, que les enfants ont baptisée Fisette en l'honneur d'un homme dont ils ont beaucoup entendu parler.