C'est là sans doute, que Maryse Cantin a compris que l'objet domestique doit aussi être beau, car sans beauté la vie quotidienne s'étiole. Elle parle de beauté naturelle, simple qui constitue le véritable raffinement.

C'est là sans doute, que Maryse Cantin a compris que l'objet domestique doit aussi être beau, car sans beauté la vie quotidienne s'étiole. Elle parle de beauté naturelle, simple qui constitue le véritable raffinement.

En 1975, le premier Arthur Quentin voit le jour sur la rue Saint-Denis. La jeune entrepreneure déjà collectionneuse, fouilleuse, fouineuse, curieuse et amoureuse d'objets, entreprend de se lancer dans une grande aventure commerciale. Ce fut entre la boutique et ses clients, un coup de foudre immédiat. On y entrait à pas de loup par crainte de briser les verres précieux et les jolies faïences, en s'émerveillant de tout, de ces rappels de France surtout, de ces rideaux de dentelle, des bols à café qu'elle importait par centaines, de ces abat-jour de verre, de ces lampes début du siècle. Et la brocante qu'elle proposait renforçait le caractère nostalgique du décor.

Maryse Cantin voit dans les 30 ans d'Arthur Quentin et les 25 ans de Bleu Nuit, l'occasion idéale de se replonger sans honte dans cette atmosphère et cette âme qu'elle a voulu créer. C'est d'abord la maison qui l'intéresse, toutes les maisons, sans discrimination, car c'est là qu'on a le plus de chance de trouver un peu de bonheur. «Ne soyons pas obsédés par la décoration. Il y a trop de décors réalisés en fonction du regard des autres, dit-elle, il faut plutôt le faire pour soi.»

Une résistance aux modes

Maryse Quentin est restée la même dans ce qu'elle croit. Ce n'est pas de l'obstination, mais une résistance aux modes. Il y a eu des moments difficiles, récessions notamment, mais la boutique a tenu le coup, grâce à la fidélité de sa clientèle. La première génération étant «maintenant bien équipée», dit-elle en riant, ce sont les filles, celles de 30 ans qui viennent renifler l'odeur du savon le Chat, et des draps de coton. Les hommes, eux, reluquent les objets de cuisine et les casseroles en cuivre.

«L'élégance n'est pas ostentation.» La simplicité bien sûr toujours gagnante, mais sans pour autant renoncer à la fantaisie. «Recevoir en faisant des mélanges», ne pas toujours se réfugier derrière les diktats. Affirmer sa personnalité. Une armoire à vaisselle recèle souvent un contenu poétique, «une véritable boîte aux trésors», où l'imagination peut régner.

«Les beaux torchons, une vaisselle qui dure, des coups de coeur sans cesse renouvelés. Mais pas pour une consommation à outrance. C'est plutôt un art de vivre par des biens durables, des objets d'artisans passionnés.» Elle tient en inventaire de belles vaisselles, de beaux objets, cadeaux et autres, qui ont du panache et dont les prix peuvent parfois rebuter. «Un verre à 10$, pourquoi pas? Si on veut se faire plaisir. Et il y a toujours la possibilité d'acheter petit à petit, car j'ai de bonnes réserves.»

Maryse Quentin a fait plaisir aux voyageurs nostalgiques, à ceux qui ont côtoyé un certain esthétisme et ont cru ne jamais pouvoir se l'offrir. Et il y a peu de ces objets vendus qui n'ont pas traversé le temps. Si elle ne se considère pas une femme d'affaires en dépit de ce succès d'estime et de durée, elle se fie à son intuition, conduit son affaire bon an mal an, sans se soucier ni des autres ni des risques. Maryse Quentin n'entend pas laisser la barre car elle entretient toujours la même passion de l'objet qui passera de l'étagère de la boutique à celle de notre maison.