«Les gens ne connaissent pas ce qu'ils ont. Ils viennent nous montrer des choses qu'ils ont trouvées dans des ventes de garage. Ils découvrent qu'ils se sont trompés incroyablement», affirme le commissaire-priseur Iégor de Saint-Hippolyte, de Iégor-Hôtel des encans.

«Les gens ne connaissent pas ce qu'ils ont. Ils viennent nous montrer des choses qu'ils ont trouvées dans des ventes de garage. Ils découvrent qu'ils se sont trompés incroyablement», affirme le commissaire-priseur Iégor de Saint-Hippolyte, de Iégor-Hôtel des encans.

Parfois, les objets les plus inusités peuvent avoir une valeur mirobolante: 20 000 $ pour une girouette, 1200$ pour un vieux bâton de golf, 300 $ pour un leurre qu'on place au bout du fil de la canne à pêche.

Mais les surprises vont dans les deux sens. Le plus souvent, les gens s'imaginent qu'ils possèdent des objets beaucoup plus vieux qu'ils ne le sont en réalité.

«Et ce n'est pas parce que c'est vieux que c'est automatiquement intéressant», prévient Yves Bourget, propriétaire de la boutique À la Capucine, rue Saint-Paul à Québec. Par exemple, des outils agricoles anciens n'ont pas de valeur. Pas plus que les rouets et les dévidoirs, qui valaient pourtant de 150 à 200 $ il y a 30 ans. Les modes changent!

Qu'est-ce qui donne de la valeur à un objet? «Sa rareté, son esthétique, et ses conditions de conservation. L'objet doit être en bon état (sans avoir été trop restauré) et doit avoir toutes ses pièces», dit M. Bourget.

En immobilier, on répète toujours que c'est l'emplacement qui compte. Dans l'univers des antiquités et des arts, le mot d'ordre est «qualité, qualité, qualité», martèle Gilles Brown, propriétaire de la Galerie d'art Clarence Gagnon, rue Laurier à Montréal.

«Les galeries préfèrent les oeuvres de haute qualité. Et si vous avez une oeuvre d'un artiste qui est devenu plus commercial, c'est pratiquement invendable», dit M. Brown. Il raconte que des artistes très populaires au Québec dans les années 70 sont totalement oubliés aujourd'hui. Par exemple, Vidal ou Stefanoff vendaient leurs toiles pour des milliers de dollars il y a 25 ou 30 ans, ce qui représentait toute une somme à l'époque! Maintenant, leurs tableaux sont presque sans valeur.

À l'inverse, les oeuvres de certains peintres, comme Fortin, Lemieux ou Richard, ont vu leurs prix multipliés par 100. Dans les années 60, on payait 100 $ pour une toile qui en vaut aujourd'hui 100 000 $.

«Mais ça, personne au monde ne peut le savoir à l'avance, dit M. Brown. Comme personne n'aurait pu se douter de la carrière qu'aurait Charles Aznavour, lorsqu'il était à ses débuts.»

Où vendre ses trésors, et à quel prix?

De vrais petits trésors dorment dans vos placards? Mais comment déterminer la valeur précise de ses antiquités, oeuvres d'art, bijoux anciens, pièces d'argenterie et autres raretés? Et, surtout, comment les vendre? Pour commencer, rien de tel que de comparer.

«Identifiez des pièces semblables aux vôtres chez un antiquaire. Internet ouvre aussi des portes. Mais il faut faire attention de se fier seulement sur le prix final de l'enchère», dit Christian Denis, coordonnateur du programme Patrimoine à domicile, lancé en 1996 par le Musée de la civilisation. Ce programme a pour mission de sensibiliser le public à la conservation et la transmission du patrimoine.

Depuis 2000, l'émission Trouvailles & Trésors s'est greffée au programme. Calquée sur un concept anglais, elle attire près de 100 000 téléspectateurs, ce qui en fait l'émission la plus populaire du canal Historia.

En outre, Patrimoine à domicile organise à chaque année à Québec une séance d'évaluation où les gens peuvent apporter des objets ou des photos. Ailleurs dans la province, on peut obtenir des renseignements en marge de différents événements. Patrimoine à domicile participera au Festival des vieux métiers à Longueuil et sera au Musée McCord cet automne.

D'autres musées ont des services d'évaluation gratuite tout comme certains spécialistes. Par exemple, le commissaire-priseur Iégor de Saint-Hippolyte organise annuellement une journée d'estimation au Ritz-Carlton, à Montréal, où pas moins de 7000 objets lui sont présentés. On peut aussi lui faire parvenir des demandes directement sur son site Internet (www.iegor.net).

Pour se faire une idée précise, il existe une foule de livres de références de prix, portant sur des sujets aussi pointus que la céramique de Beauce produite vers 1935-40. On peut se procurer ces ouvrages de références au Collectophile, une librairie de l'est de Montréal. «Pour un collectionneur, c'est un investissement qui vaut la chandelle», assure M. Denis.

Mais soyez alertes car les prix changent vite. «Une seule transaction à l'encan et, tout à coup, nos chiffres tombent en désuétude. Dans les jours qui suivent, tous les galeristes ajustent leurs prix», raconte Gilles Brown, propriétaire de la Galerie d'art Clarence Gagnon.

Des prix variables

Il faut dire que certains objets ont pris une valeur incroyable. «On a vu des prix spectaculaires à l'encan pour des oeuvres du Groupe des Sept, de Jean-Paul Riopelle, de Marc-Aurel Fortin ou de Jean-Paul Lemieux», dit M. Brown. Leurs tableaux se vendent entre 50 000 $ et 2,5 millions. «Depuis deux ou trois ans, les prix d'un Lemieux ou d'un Fortin ont facilement gagné 50 %», ajoute M. Brown.

Autre exemple: le mobilier traditionnel en pin a pris beaucoup de valeur depuis 10 ans. «Une armoire en pin authentique qui valait 2000 $ il y a dix ans, vaut maintenant 5000 $. Mais il faut qu'elle ait conservé sa couleur d'origine, avec l'usure et les traces de vie. C'est ça qui est intéressant», explique Yves Bourget, de la boutique À la Capucine, rue Saint-Paul à Québec.

D'ailleurs, le risque actuel de contrefaçon est de tomber sur une véritable armoire d'époque, mais dont la couleur a été reproduite. «Les gens sont très habiles. C'est facile de tomber dans le panneau», dit M. Bourget.

Selon M. Denis, l'intérêt est très fort pour les antiquités depuis quelques années. «Les baby-boomers disposent de plus de fonds. Ils aiment investir dans quelque chose d'autre qu'un REER, dans un bien avec lequel ils vivent et dont ils profitent», dit M. Denis.

Mais selon d'autres intervenants, la relève manque: les clients de 30 ou 40 ans sont rares. Peut-être sont-ils plus attirés par les offres de crédit pour l'ameublement neuf, ou par le faux vieux bon marché fabriqué en Asie? Ou peut-être cherchent-ils plus de confort? «Il faut vivre avec de vieux meubles, mais en bon état. Il faut faire réparer le vieux tiroir pour qu'il glisse bien!» dit M. Bourget. Mais les bons restaurateurs sont presque aussi rares que les antiquités!

Chose certaine, la personne qui achète des antiquités ou des oeuvres d'art seulement dans le but d'investir, n'a pas un très bon réflexe. «Il faut le faire d'abord et avant tout par passion, c'est ce qui nous donne notre meilleur jugement», dit M. Denis. Si des tableaux hors du commun peuvent fracasser des records à l'encan, les pièces plus ordinaires risquent d'être vendues à un prix plus décevant. Dans une galerie, on sait davantage à quoi s'attendre. Mais encore faut-il trouver la bonne. Il faut choisir une galerie qui possède une solide réputation d'intégrité, avec un personnel en mesure de prouver l'authenticité et la qualité des oeuvres.

Idéalement, on choisit une galerie qui a déjà représenté l'artiste ayant réalisé l'oeuvre qu'on souhaite vendre. La plupart du temps, les galeristes prendront le tableau en consigne. S'ils le vendent, ils garderont une commission de 20 à 30 % du prix de vente.

Antiquaires ou encans

Chez les antiquaires, c'est l'inverse. Ceux-ci sont plutôt portés à acheter ferme, plutôt qu'à prendre des biens en consigne. La marge de profit sera beaucoup plus élevée, de 40 à 60 % de la valeur du bien. Par exemple, un antiquaire vous prendra cette petite statue de la vierge en bois, qui date peut-être de 50 ans, après l'avoir regardée quelques secondes: il vous offrira 20 $, sachant qu'il la revendra 45 $.

«Mais comme les bonnes pièces ne sont jamais difficiles à vendre, l'antiquaire sera prêt à réduire sa marge de profit (jusqu'à 20 %, par exemple) s'il sait qu'il revendra l'objet très rapidement», explique M. Denis.

Pour éviter les intermédiaires et les frais, on peut tenter de vendre par Internet.

Récupérer des vies

Une multitude d'organismes, qui font de la récupération de meubles ou d'autres biens ont aussi un mandat de réinsertion sociale de travailleurs qui ont connu de grandes difficultés personnelles. À titre d'organismes de charité, ils donnent des reçus à ceux qui leur font des dons.

C'est le cas de l'Atelier de meubles et de recyclage Ahunstic Cartierville (AMRAC), qui recueille les meubles et les revend à prix modique dans sa boutique Bric-à-brac. Le mobilier qui a plus de valeur est restauré et vendu dans sa boutique Bois Urbain, rue Saint-Denis. L'AMRAC restaure aussi des meubles pour des particuliers et fabrique des meubles de toutes pièces. Son objectif premier est de faciliter la réadaptation d'une quarantaine de personnes à la fois. «Quand ils arrivent, ils ne savent pas ce que c'est que le mot travail. Il faut leur dire que c'est important d'arriver à 8h et non pas à 8h15», dit Serge Rouzaud, directeur vente et marketing.

Les trois quarts de ceux qui terminent leur formation retournent aux études ou trouvent du travail. «C'est un taux de succès très encourageant», dit M. Rouzaud.

Autre exemple? Éco-Réno vise la préservation du patrimoine architectural. En plus de créer des «emplois durables», sa mission consiste à détourner de l'enfouissement les matériaux de construction et de rénovation qui ont encore une valeur: portes, poignées, bains sur pieds, moulures d'époque...

Donner pour recevoir... une déduction fiscale

Outre la vente, il existe une autre solution pour ceux qui souhaitent se départir de biens patrimoniaux ou d'oeuvres d'art: donner à une oeuvre de charité ou à un musée. Étonnamment, cette solution peut être assez payante.

Les dons de bienfaisance donnent droit à un crédit d'impôt de 16 % sur les premiers 200 $ et de 29 % sur l'excédent, au fédéral. Au Québec, le crédit est de 20 % sur les premiers 2000 $, puis de 24 % sur l'excédent.

Ainsi, le crédit combiné (en tenant compte de l'abattement) est de 33 % jusqu'à 200 $, de 44 % pour la tranche de 200 à 2000 $, et de 48 % pour 2000 $ et plus, explique Sylvain Chartier, directeur de la planification fiscale à Planification financière Banque Nationale.

Notez qu'un couple peut combiner ses dons, pour atteindre les tranches de crédit plus élevées. On peut aussi réclamer le crédit pour l'année où le don est effectué ou attendre au cours des cinq années suivantes.

Disons que vous donnez une armoire traditionnelle d'une valeur de 10 000 $ à un organisme de bienfaisance enregistré qui produira un reçu pour fins d'impôts. Vous aurez alors droit à un crédit de 4698 $ (66 $ pour la première tranche de 200 $ + 792 $ pour la deuxième tranche de 1800 $ + 3840 $ pour la troisième tranche de 8000 $). Ce crédit réduira d'autant vos impôts.

Mais attention! Même s'il s'agit d'un don, il faut payer les impôts sur le gain en capital, sauf si le bien vaut moins de 1000 $, souligne Caroline Renaud, avocate fiscaliste chez Raymond Chabot Grant Thornton.

Reprenons votre armoire, acquise il y a plusieurs décennies pour une bouchée de pain. Le gain en capital s'élèvera à 9000 $, car la première tranche de 1000 $ ne compte pas. La moitié (4500 $) de ce gain sera imposable au taux d'imposition du contribuable (disons 48 %). Cela fait donc une facture fiscale de 2160 $.

Bonne nouvelle: après avoir payé cet impôt, il vous reste encore 2538 $ dans vos poches en provenance du crédit d'impôt.

Si vous possédez des biens qui ont une valeur culturelle et que vous les donnez à un musée, la transaction devient encore plus avantageuse, car vous n'avez plus à déclarer le gain en capital. En outre, les dons aux musées du Québec permettent de majorer la valeur du bien de 25 %, aux fins du calcul du crédit.

Toutefois, la valeur culturelle du bien doit être certifiée par les commissions provinciale et fédérale.

Et n'entre pas qui veut au musée. «Même si ce sont des dons, nous appliquons les mêmes critères que pour des achats. Nous n'acceptons pas tous les artistes, toutes les époques. Parfois, certains artistes sont déjà assez représentés», dit Suzanne Lemire, responsable du développement de la Collection du Musée d'art contemporain de Montréal, qui accepte des dons pour une valeur de 2 millions par année.

Des conseils pour préserver vos trésors

TABLEAUX : ne placez jamais un tableau (toile, peinture sur bois) au-dessus du foyer ni en plein soleil.

PHOTOS : si vous ne voulez pas que les couleurs de vos photos précieuses s'estompent en l'espace d'une génération, disposez-les dans des cahiers à anneaux de qualité «archives» ou dans des enveloppes non acides.

OBJETS EN FONTE : ne pas les laver avec de l'eau ou des produits domestiques. Ne pas utiliser de laine d'acier pour enlever la rouille.

DISQUES : ne soumettez pas les vieux disques à l'humidité ou la chaleur. Ne les empilez pas.

MEUBLES : époussetez soigneusement vos meubles en bois avec un chiffon propre sans charpie, en évitant d'utiliser les polis en aérosol, qui risquent d'endommager le fini.

ARGENTERIE : pour rendre son lustre à l'argenterie, utilisez le produit le moins abrasif possible, car chaque nettoyage enlève une légère couche d'argent. Évitez à tout prix le trempage intégral.

CÉRAMIQUE : comme la céramique est très cassante, ne la perchez pas sur le rebord des tablettes ou à des endroits très passants. Lavez chaque pièce séparément. Ne les prenez pas par la partie la plus faible (ex: bec, anse).

ANIMAUX : dépoussiérez soigneusement les animaux naturalisés pour éviter qu'ils soient infestés par des insectes. Manipulez-les toujours avec des gants, car certains contiennent de l'arsenic ou d'autres produits dangereux.

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Source : Patrimoine à domicile

(www.mcq.org/patrimoine)