Les objets de notre quotidien sont les témoins de l'histoire, avancent les auteurs de l'ouvrage Histoire et actualité du design au Québec. Leurs formes, leurs matériaux et leur conception sont le reflet d'une époque précise et des particularités d'une société.

Les objets de notre quotidien sont les témoins de l'histoire, avancent les auteurs de l'ouvrage Histoire et actualité du design au Québec. Leurs formes, leurs matériaux et leur conception sont le reflet d'une époque précise et des particularités d'une société.

Ainsi, le design du XXe siècle a été marqué par l'ère des usines, où les objets étaient reproduits en série par des techniques mécaniques et fonctionnelles. Que ce soit une causeuse, une table, une lampe, un vase ou tout autre objet de consommation, la production de masse permet de réduire les coûts de production dans le but de vendre le plus grand nombre d'unités possible.

Avec le développement de nouvelles technologies, d'autres possibilités s'offrent dorénavant aux créateurs. La conception par ordinateur se fait de différentes façons, toujours dans le but de diminuer le temps de fabrication et ses étapes et de repousser les limites de la création. «Plusieurs techniques permettent aux designers d'augmenter la vitesse de production en éliminant la phase de transfert. En fait, le produit se forme directement à partir d'un dessin conçu virtuellement», affirme le chargé de projets de l'École de design de l'Université du Québec à Montréal, Georges Labrecque. En résultent alors des formes complexes issues de calculs de surfaces courbées qui seraient impossibles à réaliser manuellement.

Stéréolithographie

Parmi ces techniques révolutionnaires, la production numérique, ou la stéréolithographie, permet de créer des objets d'art aux formes les plus complexes. Les designers spécialisés dans la production de formes organiques utilisent cette technique qui repousse les lois mathématiques.

Le processus est relativement simple. L'objet est conçu à partir de multiples couches numériques, ou acétates, fabriquées par ordinateur. Un laser vient ensuite balayer ces acétates en y insufflant un polymère liquide ou en poudre qui se durcira au contact de l'air. Se formera alors une résine résistante qui deviendra le premier objet d'une série illimitée.

Selon le magazine de design Azure, qui consacre un article à cette nouvelle technologie dans son numéro de mai, cette technologie de pointe marque une rupture avec les méthodes mécaniques traditionnelles. Dorénavant, les designers peuvent appliquer les formes numériques à des objets tridimensionnels en élargissant le potentiel des formes complexes.

Formes complexes?

Se créent ainsi des objets d'aspect futuriste, aux multiples cavités et aux courbes prononcées ainsi que des effets trompe-l'oeil saisissants. Mais toujours d'une couleur blanchâtre, à cause de l'utilisation de la résine. On ne change pas les matières par cette technique, mais bien les formes, rappelle le magazine Azure.

Toutefois, le développement des technologies n'est pas garant de la création, prévient Georges Labrecque. «Il y a un risque à tendre vers le très complexe inutilement. Ça peut être intéressant, mais le design n'est pas la recherche du plus complexe.» Surtout que le design actuel tend souvent vers une simplicité de conception et un esprit zen. Le dépouillement et le retour aux sources sont aussi très présents.

Il encourage par contre ce développement technologique, «en autant qu'il ne brime pas le sens artistique». «Une fois qu'on a apprivoisé ces outils, il est intéressant d'explorer les possibilités d'assemblage de matériaux différents», cite-t-il en exemple.

Outre la technologie numérique, l'utilisation de logiciels informatiques avancés permet également d'élargir les frontières du design. «Pour concurrencer les designers européens, les étudiants québécois doivent bien maîtriser les nouvelles technologies. Le potentiel artistique est là, on le constate dans les cours. Mais il faut aussi que ces jeunes aient une plus grande visibilité», croit pour sa part le professeur en design de l'UQAM, Maurice Cloutier.

En fait, les prochaines décennies devraient être riches et effervescentes pour le design québécois, si l'on en croit Marc H. Choko, coauteur de l'ouvrage Histoire et actualité du design au Québec, qui rappelle l'évolution de la conception artistique au Québec.

Le design québécois s'est lentement formé, selon les auteurs de l'ouvrage, à la suite de quelques montées créatrices lors de l'Expo 67 et des Jeux olympiques de 1976. «Il prend à peine son envol, soutient M. Choko. Mais le potentiel est présent et les nouvelles technologies vont favoriser son émergence.»

Relève québécoise

Le professeur en design Maurice Cloutier croit lui aussi à ce développement. «En moins de 10 ans, on a vu apparaître des technologies de conception qui ne nous effleuraient même pas l'esprit», dit-il. On assiste d'ailleurs à la formation d'équipes multidisciplinaires québécoises où les designers de carrière s'adjoignent les services de jeunes designers maîtrisant les compétences informatiques.

Selon M. Choko, les designers québécois se démarquent déjà dans un domaine de pointe, soit celui des nouvelles technologies de l'image animée. Ce qui a un impact non seulement sur l'industrie du multimédia, mais aussi sur la conception et la fabrication d'objets courants et sur les styles. Par exemple, certaines formes créées par le multimédia ont un esprit ludique, des couleurs vives et quelques détails trompe-l'oeil.

Les étudiants québécois sont également à l'affût des nouvelles technologies. Et ils les manipulent avec habileté et précision. Le département de design et arts numériques de l'Université Concordia utilise d'ailleurs les plus récents logiciels de programmation et multimédia. On insiste également sur le design en réseaux, c'est-à-dire sur les liens qui unissent l'image, l'objet et le multimédia.

De plus, Concordia a créé ces dernières années une Chaire de recherche du Canada sur les nouveaux arts médiatiques. L'objectif de cette chaire est de favoriser des milieux de création interactifs orientés vers la gestuelle. Certains jeux virtuels, à titre d'exemple, sont un des résultats de la combinaison du design et des technologies.