Chaque année, les étudiants en architecture se réunissent autour d'un «événement de design sur l'objet». Pour souligner le 40e anniversaire de l'École d'architecture, une exposition de leurs créations a été présentée au Musée de la civilisation, au début du mois. Et la vente aux enchères, qui finance les activités de fin d'études des futurs architectes, a été rehaussée d'un concours présidé par un jury de prestige: les architectes Pierre Thibault et Jacques White, le designer industriel Michel Dallaire, le concepteur-ébéniste Edwin Akué, le chroniqueur Réjean Lemoine, et la directrice du service de muséographie du Musée de la civilisation Louise Bélanger.

Chaque année, les étudiants en architecture se réunissent autour d'un «événement de design sur l'objet». Pour souligner le 40e anniversaire de l'École d'architecture, une exposition de leurs créations a été présentée au Musée de la civilisation, au début du mois. Et la vente aux enchères, qui finance les activités de fin d'études des futurs architectes, a été rehaussée d'un concours présidé par un jury de prestige: les architectes Pierre Thibault et Jacques White, le designer industriel Michel Dallaire, le concepteur-ébéniste Edwin Akué, le chroniqueur Réjean Lemoine, et la directrice du service de muséographie du Musée de la civilisation Louise Bélanger.

Soixante-quinze étudiants ont fabriqué une cinquantaine d'objets — chaises, lampes, horloges, chandeliers, etc. — pour faire valoir leurs talents de concepteur. Mais c'est à l'unanimité que le jury leur a préféré «La robe de bois» de Julie et Esther, des fanas de la mode de 25 et 24 ans.

«J'ai voté avec mon cœur et mon émotion, a confié Michel Dallaire. Quand j'ai vu cette robe, je l'ai prise par la taille, je lui ai fait une caresse et j'ai ressenti un frisson intérieur.» A fortiori, il s'est demandé s'il n'avait pas vécu une «carence affective» dans son enfance. Puis il s'est souvenu du mannequin de couturière qu'il a toujours vu dans la chambre de sa mère et qu'il a lui-même récupéré une fois adulte. La robe de bois, à ses yeux, c'est la féminité qui s'exprime, en contraste avec son rude aspect d'armure, c'est «une présence volumétrique qui invite à la caresse».

«J'ai pensé à Jana Sterbak en la voyant», poursuit-il. Cette artiste mont-réalaise avait fait scandale avec la robe de viande de bœuf qu'elle avait exposée au Musée des beaux-arts d'Ottawa, en 1991.

Pour créer leur robe, Esther Labalette et Julie Pilote se sont plutôt

inspirées des architectes suisses Herzog et De Meuron, qui jouent avec la transparence et qui se soucient à la fois de l'effet produit par leurs bâtiments, et de la sensualité qu'ils dégagent. «On peut apercevoir la peau à travers la robe, a expliqué Esther. C'est comme si on pouvait voir aussi la vraie nature de la personne qui la porte.»

À l'instar de Paco Rabanne qui, dans les années 1960, assemblait des rectangles de métal avec des pinces et un chalumeau pour en tirer des robes «futuristes», les deux étudiantes ont percé des «baguettes de pin en haut et en bas» et les ont entrelacées avec de la broche et des œillets d'acier. Ne pas confondre avec les baguettes de pain de Jean-Paul Gaultier... Une bretelle d'acrylique permet un certain ajustement. «Le défi était de pouvoir bouger en la portant», mentionne Esther. Elles l'ont relevé, puisque «la robe fait à Julie».

L'architecte Marc Letellier l'a obtenue à l'encan pour 550 $. «C'est l'objet qui s'est vendu le plus cher», s'est réjouie Esther.

Poésie de la patère

Le jury a aussi craqué pour «Le porte-manteaux» d'Anabel Arsenault, d'Émilie Pinard et de Joanie Turcotte, à qui il a décerné son deuxième prix. Michel Dallaire a été séduit par la poésie de cette «patère magnifique», fabriquée à partir d'une «vraie porte et de vraies poignées de porte». D'où l'idée de «porte-manteaux»!

Avec les 50 $ fournis par l'association étudiante, les trois designers en herbe ont acheté chez Québec Antique une vieille porte qu'elles ont découpée en ruban. La base est en contre-plaqué et les poignées servent de crochets. Émilien Vachon, le directeur de l'École d'architecture, l'a acheté pour 420 $. «Il l'a placé bien en évidence à l'extérieur de son bureau», a relaté Joanie Turcotte qui, comme ses deux copines du baccalauréat, ne portait plus à terre après avoir accepté les félicitations de Michel Dallaire.

La Commission de la capitale nationale du Québec a offert une bourse de 1000 $ que se sont partagée les cinq conceptrices des deux objets lauréats.

Mentions

Michel Dallaire est reparti chez lui avec la paire de chandeliers en étain d'Érick Rivard et d'Émilie Garneau, à qui le jury a accordé sa première mention. Il a déboursé 330 $ pour cette œuvre baptisée «Plomberie d'occasion» qui, affirme-t-il, «débourgeoise le chandelier». Bricolée avec des bouts de tuyaux, elle peut être vissée sur la table. Michel Dallaire a apprécié son potentiel de polyvalence. «On pourrait la visser au sol et lui donner différentes hauteurs», suggère-t-il.

Pour sa fille qui est en appartement, il a acquis l'objet «Du garage à la maison», une lampe fabriquée par Arianne Grondin avec de la tôle, du grillage métallique et une baladeuse de garagiste.

La deuxième mention du jury est allée à la lampe amusante que sa conceptrice, Annie Dubé, a nommée «(A)lu-minance». «Elle m'a fait penser à un nid d'oiseau», a commenté Michel Dallaire. «Intensité errante» de Samia Touma a mérité la troisième mention. Avec «Temps et Lumière», Rebecca Brochu et Simon Pelletier-Boucher ont obtenu le prix du public et se sont, de ce fait, partagé une bourse de 500 $ de la Caisse populaire de Québec.

«Les designers sont des gens bien difficiles», convient Michel Dallaire. Leur appréciation n'en rehausse que davantage l'événement design des étudiants en architecture.