Et si vous installiez un poumon au coeur de votre maison? Du grand mur végétal qui attire tous les regards au petit cadre de plante pour décorer une pièce, voici tout ce qu'il faut savoir pour s'entourer de verdure sur les murs.

«Ce sont de vraies plantes?», demandent, incrédules, les invités de Félice Saulnier et de Martin Beauséjour, de Saint-Lambert. Un luxuriant pan de mur, vert de vie et de santé, s'épanouit au carrefour de la cuisine, de la salle à manger et du salon, très présent dans les aires de vie, comme un membre de la famille.

«Nous cherchions un élément fort comme point focal de la maison, explique Martin Beauséjour, diplômé en architecture. Le côté polluant d'un foyer nous embêtait. Nous avons pensé à un cellier: tendance mais, dans notre cas, un peu artificiel. Et puis, le flash: un mur végétal produit de l'oxygène au lieu d'émettre des gaz polluants! Il amène de la vie et du punch dans notre décor, par ailleurs lisse, contemporain.» Actualisée par des rénovations majeures, la résidence date de 1893.

Le couple a confié la réalisation du mur vert à Éric Bond, ancien ébéniste et fondateur d'EnviroZone, entreprise vouée aux murs végétaux intérieurs. «Un mur vivant ne se fait pas en criant ciseau, rapporte M. Beauséjour. Éric Bond est venu évaluer l'intensité de la lumière naturelle, prendre des mesures, etc.» Une fois le tableau végétal installé, avec un raccordement à l'eau de la maison et un moniteur pour l'irrigation, il a fallu procéder à quelques ajustements. «La première pompe donnait un coup de bélier dans la tuyauterie, quand elle entrait en action, relate Martin Beauséjour. Graduellement, nous sommes passés de deux irrigations bruyantes par jour à quatre arrosages presque inaudibles, juste un petit bruit d'eau qui coule. Depuis, tout marche comme sur des roulettes, presque sans entretien. Environ trois fois par année, j'ajoute des nutriments liquides dans l'eau d'arrosage.»

Les deux enfants du couple, Agathe, 9 ans, et Gustave, 6 ans, adorent le nouveau système végétal. «Quand ils dessinent une maison ou font des «plans d'architecte», ils mettent un carré vert dedans, rapporte leur père. Ma fille, en 3e année, a choisi notre mur végétal comme sujet de présentation orale, photos à l'appui.»

Un autre client d'EnviroZone, Charles-Antoine Gosselin, promoteur immobilier (KnightsBridge), se dit très satisfait du mur végétal installé dans l'appartement qui lui sert de bureau des ventes. «C'est superbe, exactement ce que j'attendais, dit-il. La technologie hydroponique est propre, sans terre ni insecte. Le mur végétal est offert en option aux acheteurs de nos condos, au prix coûtant, soit environ 6500$, pour une surface de 8,5 pi sur 8 pi.»

Murs végétaux: mode d'emploi

On peut classer les jardins verticaux intérieurs en trois catégories, grosso modo: les murs verts intégrés, branchés à l'eau domestique pour une irrigation automatisée, les parois mobiles et les jardinières à suspendre comme des cadres.

«Tous ces systèmes ont leur intérêt et leur esthétique, indique l'agronome Claude Vallée, professeur en horticulture à l'Institut de technologie agroalimentaire de Saint-Hyacinthe (ITA). Tous procurent une ambiance calme et apaisante. On choisit en fonction de ses besoins et de ses moyens.»

Chez EnviroZone, jeune entreprise de murs végétaux fondée à Montréal par l'ébéniste Éric Bond, on couvre toute la gamme, du simple cadre végétal au mur hydroponique de haute technologie. «En début de gamme, on fait des tableaux en lichen stabilisé, entre 55$ et 180$, explique M. Bond. Ce lichen, traité à la glycérine, conserve un aspect vivant, même s'il ne l'est plus.»

Murs verts intégrés

Pour un mur végétal intégré sur mesure, avec système d'irrigation caché, il faut compter entre 150$ et 250$ du pied carré, indique Claude Vallée, dépendant, notamment, des plantes. On a le choix entre plusieurs modes de culture, soit: hydroponique, les racines poussant sur un support de feutre, de laine de roche ou de fibre de coco, matériaux qui absorbent bien la solution nutritive; avec une motte de substrat (terreau, agrégats) dans une pochette peu absorbante (les racines demeurent alors dans la pochette) insérée dans le panneau de feutre humide; ou encore un compromis entre les deux, avec substrat et pochette très absorbante.

Le plus souvent, la mécanique d'irrigation se trouve dans un placard éloigné du mur végétal, par exemple au sous-sol. Le contrat peut être assorti ou non d'une entente d'entretien. Les méthodes hydroponique et mixte accueillent une plus grande variété de végétaux.

Plantes dans leurs pots

Une autre approche de mur végétalisé laisse la plante dans un pot. C'est le cas des unités murales modulaires Breathe, d'EnviroZone, adaptables à toutes dimensions, avec arrosage manuel ou automatisé. On les retrouve autant sous forme de cadre, de cloison végétale mobile que de tableau mural fixe. Munis d'une mèche qui trempe dans l'eau sous-jacente, les pots, reposant sur des rails d'aluminium, laissent le végétal s'hydrater par capillarité. On arrose les modules par le haut, peut-être une fois par semaine, et un collecteur au bas du mur reçoit l'excédent. «Une personne méticuleuse pourrait quasiment se passer de collecteur, observe M. Bond, en versant la quantité d'eau exacte.» Ces unités modulaires se vendent entre 100$ et 150$ du pied carré, avec les plantes.

Des kits à monter soi-même sont offerts, sans contenu, à partir de 480$ pour une surface de 2 pi sur 2. Un éclairage horticole aux DEL peut s'ajouter, et coûte entre 80$ et 300$. Pour un système d'irrigation sophistiqué, compter de 500$ à 1500$.

À Gatineau, l'homme d'affaires Dominic Dallaire, qui vient de mettre sur pied une entreprise de murs végétaux intérieurs, utilise les panneaux modulogreen, distribués par ByNature. Fabriqué en Allemagne à partir de plastique ABS recyclé, le panneau est moulé en petites cellules très légèrement inclinées. Chaque alvéole peut accueillir deux plantes avec substrat. M. Dallaire évalue à 4000$ le coût d'un mur de 6 pi sur 5, comme il en a réalisé un dans sa cuisine, avec 128 plantes, un cadre d'aluminium, un bassin, un système d'irrigation automatique et un éclairage artificiel.

Comment choisir?

«Si une personne désire un tableau végétal artistique, avec des jeux de coloris et de courbes, un système hydroponique répondra à ses besoins, explique Claude Vallée. Il faudra toutefois attendre plusieurs semaines ou mois avant que le tableau atteigne tout son potentiel. Par contre, si on désire un résultat rapide, les systèmes avec substrat (en pot ou en pochettes) permettent d'installer des plantes plus volumineuses. L'effet est superbe dès le lendemain ou quelques jours après l'installation.»

Un mur-poumon?

«On manque de données pour évaluer la fonction de purificateur d'air d'un mur végétal», fait observer Claude Vallée. Les résultats obtenus en laboratoire, comme l'élimination de polluants, comme le formaldéhyde, ne peuvent pas se transposer à la réalité d'une maison, où, souvent, il y a émission continue de formaldéhyde.

L'ITA de Saint-Hyacinthe offre des cours de formation continue en horticulture, formation qui inclut les murs végétalisés.

www.ita.qc.ca

Photo fournie par Tinker

Mur végétal dans une maison modle de Les Collections Dubreuil, à Mirabel.

PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE

Le drain de ce mur végétalisé est contenu dans un cadre d'acier inoxydable et couvert de galets décoratifs.