Comme c'est le cas d'une foule de plantes, il faut des années de travail, souvent une dizaine, entre le moment où une rose est hybridée et l'apparition d'un de ses rejetons dans votre jardin.

Chez Weeks Roses, Christian Bédard et son équipe procèdent à la plantation de 250 000 graines chaque année pour n'obtenir au bout du compte qu'une douzaine de plantes présentant un intérêt commercial. Et de ce nombre, trois ou quatre variétés passeront à l'étape de la sélection afin d'être testées durant deux ans dans les jardins d'essai de la All-America Rose Selection. Les plus méritantes obtiendront peut-être une médaille d'or à la fin de leur séjour.

L'aventure commence par la sélection d'environ 150 roses (d'autant de variétés) qui serviront à féconder manuellement environ 50 000 fleurs, un travail qui s'échelonne d'avril à la mi-juillet. On prélève d'abord les étamines de peur que le plant ne s'autoféconde. Ensuite, on récolte méticuleusement le pollen en prenant soin évidemment d'en établir la provenance. Ce pollen sera ensuite déposé à la main sur chaque stigmate des roses que l'on veut féconder.

Trois semaines plus tard, les fruits commenceront à se former. Ils seront prélevés à pleine maturité, à la fin septembre. Ils produisent en moyenne 15 à 25 graines chacun, parfois 50 à 70 et à quelques occasions, aussi peu qu'une seule. Celles-ci seront extirpées de leur enveloppe, classées selon leurs parents d'origine et mises au frigo durant un hiver artificiel de six semaines afin de favoriser la germination, un processus connu sous le nom de stratification.

Détenant un bagage génétique unique, chaque graine est plantée à la main. La germination exige autour de trois semaines et le taux de succès ne dépasse guère les 40%. Mais miracle, quatre à six semaines après le semis, le plant d'une dizaine de centimètres donne une première fleur, petite et imparfaite, qui fournit déjà une foule d'indices intéressants aux hybrideurs.

À cette étape, de nombreux plants sont éliminés automatiquement, notamment ceux qui manifestent une sensibilité aux maladies. Des 250 000 en observation, à peine 800 à 1000 seront sélectionnés pour cette première année d'expérimentation. Les heureuses élues seront greffées pour obtenir dix plants identiques qui seront ensuite testés en plein champ et évalués deux fois par semaine. Après trois à cinq années d'observation, les rares variétés aux caractéristiques recherchées seront de nouveau évaluées en vue d'une commercialisation.