L'univers des tomates est incroyablement vaste. Imaginez! On en compte seulement une dizaine d'espèces, toutes originaires de l'Amérique du Sud, mais le nombre de variétés atteindrait aujourd'hui autour de 10 000 dont environ 4000 sont cultivées plus ou moins intensivement. Et chaque année, que ce soit pour le potager domestique, la production commerciale en champ ou la culture en serre, des dizaines de nouvelles variétés font leur apparition sur le marché.

Non seulement est-elle un des légumes (ou un des fruits) les plus consommés au monde mais au Québec, par exemple, elle reste la plante la plus cultivée au potager. Dans les centres de jardin, il se vend habituellement plus de plants de tomates que l'ensemble des autres plantes potagères. La proportion serait encore plus grande aux États-Unis.

Considérée comme un aliment santé de première importance, la tomate contient une tonne d'antioxydants dont le lycopène, un enzyme réputé pour prévenir notamment le cancer de la prostate. Incidemment, la tomate cuite sous une forme ou une autre peut libérer jusqu'à 10 fois plus de lycopène qu'une tomate crue.

Fait intéressant, des hybrides qui datent de plusieurs décennies sont souvent considérés comme beaucoup plus goûteux que les variétés de création récente. Dans le but de vérifier la qualité gustative de plusieurs nouvelles tomates, nous avons réuni un comité de «goûteurs» au Jardin botanique de Montréal, tous des horticulteurs travaillant au jardin des plantes alimentaires. Une dégustation sans prétention pour vous aider à choisir l'an prochain les variétés les plus prometteuses.

Sélectionnées l'hiver dernier par la responsable du jardin, Nathalie Leuenberger, ces variétés étaient toutes présentées comme nouvelles dans les catalogues. Mais il arrive fréquemment que ce qui est annoncé comme nouveauté par les uns est parfois vendu depuis un certain temps par les autres, ce qu'il nous a été impossible de vérifier.

Par ailleurs, deux variétés ont été classées dans une catégorie à part. La raison? Dans un cas, le comité n'a pas eu la chance de tester la tomate et dans l'autre, les conditions de culture n'étaient pas optimales. C'est le cas justement de la plus étonnante de toutes, la «USO Blue Tomato», la tomate bleue, comme son nom l'indique, cultivée dans mon potager cette saison.

Du bleuet à la tomate

En dépit de sa couleur inusitée, la tomate bleue n'a rien à voir avec un organisme génétiquement modifié (OGM). Elle est plutôt le résultat d'une recherche de plusieurs années menée à l'Université d'État de l'Oregon en vue justement d'augmenter la quantité de lycopène dans le fruit. Elle a été présentée en 2004, mais les semences restent très difficiles à trouver. Au Québec, il semble que seule la jardinière Manon Collard en offre (www.jardinpotager.com).

Il s'agit d'une variété issue d'une tomate sauvage originaire du Pérou et d'un hybride commercial dont le nom n'a pas été divulgué. La création de cette variété avait pour but ultime d'augmenter la consommation d'antioxydants par les Américains. La «USO Blue Tomato» a, en effet, un taux d'antioxydants très près du bleuet, le fruit qui en contient le plus. Le hic avec le bleuet, c'est que la consommation par personne est d'environ 500 g par année par rapport à 40 kg pour la tomate. Reste à voir l'impact commercial de cette nouveauté.

Pour l'instant, le patrimoine génétique de la plante semble bien instable. La partie supérieure du fruit est bleue lorsque la tomate n'est pas à maturité, mais cette coloration devient brunâtre quand la partie inférieure rougit. Le plus intrigant, c'est que le plant, qui devrait être entièrement vert, produit parfois des feuilles bleues.

Quant à son goût, le comité l'a trouvé plutôt «ordinaire». Par contre, les tomates bleues cultivées chez mon ami Ricardo Larrivée et goûtées dans le cadre de son émission télé étaient beaucoup plus savoureuses, légèrement sucrées.