De grands bacs carrés et rectangulaires forment un labyrinthe ayant pour centre une fontaine et son petit étang. À la surface des bacs, des cordelettes marquent les pieds carrés, assignant leur place aux choux, courges, zuchinis, radiccios... et autres laitues de ce potager surélevé.

«C'est bio, c'est frais et je n'achète que peu de légumes l'été», fait valoir la propriétaire, d'origine bavaroise, d'ou le plant de houblon et la variété de chou Kaitlin, qui sert à faire la choucroute.

Marie-Claude Riel, en charge de ce potager biologique, n'achète aucun plant et commence ses semis dès la mi-mars, dans la serre. «J'utilise du compost ou du fumier de cheval, du savon insecticide, du bicarbonate de soude, de la farine de sang séché ou tout autre produit homologué pour l'agriculture biologique. Quand le sol est bien équilibré au départ, il n'y a besoin de rien d'autre.»

On congèle - les pois mange-tout, les zuchinis et les aubergines en ratatouille-, on transforme - les groseilles en gelée- et on donne - la laitue, les concombres, l'ail.

Et dans la ruelle...

Aux antipodes des grands espaces campagnards, Lorraine Boisvenue incarne l'optimisation potagère d'une surface minérale «mouchoir de poche». Elle jardine bio dans quelque 70 pots cordés serrés sur la galerie et la place de stationnement de bitume, à l'arrière du logement qu'elle habite avec son compagnon, Alfred, rue Berri, dans Villeray.

Bras émergeant de la verdure, Lorraine vous presse de goûter cette tomate  raisin de corinthe» blanche, puis une tomate-cerise noire, une autre jaune et une tomate cerise «Sprite», toutes savoureuses, toutes uniques, dont les surplus font des soupes incomparables. Et cette tomate «vigne-de-la-paix»: «je ne sais pas d'où vient le nom mais c'est poétique!» «J'aime essayer de nouvelles choses chaque année, dit cette fée des légumes. Cet été, j'ai des petits épis de maïs asiatiques.»

Tapies au sein de deux allées lilliputiennes, une débauche de fines herbes -thym rampant, au citron, anglais, à l'orange, français, quatre variétés de sauge, origan grec, doré, italien, livèche, trois variétés de basilic, cerfeuil, coriandre, romarin, pimprenelle- et des aubergines.

D'un côté, les plants en pots verdissent l'escalier des voisins. De l'autre ils laissent tout juste passer le locataire du garage. Sur le garde-corps de la galerie et suspendus: basilic, laurier et bégonias (jolies fleurs dans les salades) sont rejoints par des plants de concombre qui n'ont rien à envier au haricot magique de Jack, grimpant allègrement sur des treillis achetés au magasin du dollar. Restée au ras du sol, une bette à carde («les gens confondent: ils me félicitent pour ma rhubarbe!») déploie ses larges feuilles veinées de rouge. Il faut environ une heure, le matin, pour arroser les plantes au boyau.

Au printemps, la table de cuisine se transforme en petite serre. Lorraine mélange l'ancienne terre avec de la farine de crabe et du compost marin (algues, krill et crevettes). L'été, les jeune mamans s'arrêtent pour donner des explications à leurs petits.

Le plaisir secret de Lorraine: les catalogues. Celui de la ferme Zéphyr pour les plants biologiques patrimoniaux, et de Lee Valley pour les accessoires de jardinage et de cuisine. Au marché Jean-Talon, elle trouve «imbattables» la variété de plants de la Ferme Jacques et Diane, de même que les semences et plants de chez Birri et Frères. De l'Ontario: les fines herbes de Richters et les semences de The Cottage Garden.