J'ai toujours un faible pour les marmottes. Elles sont jolies, attendrissantes même, et leurs «marmottons» sont mignons comme tout.

Mais il y a le revers de la médaille. Elles considèrent nos platebandes comme un buffet «Mangez à volonté» et se font un festin de nos potagers. Un cauchemar. Chez moi, la situation est d'autant plus étonnante que la propriété est limitée par un parc où la nourriture abonde. Manifestement, quand il a le choix, notre rongeur apprécie davantage la plante domestique que sa sauvage cousine. Plus encore, le mammifère gruge le tronc des thuyas et autres arbres décoratifs pour se faire la dent et parfois même, comme cela m'est arrivé à quelques reprises, il jette son dévolu sur les barreaux du balcon. N'oublions pas: gruger est le leitmotiv du rongeur. Voilà donc qui explique que des amateurs de jardinage ont pris la bête en grippe, comme l'indiquent de nombreux courriels à ce sujet.

 

Le ministère des Ressources naturelles et de la Faune insiste cependant sur le fait que la marmotte fait partie de la chaîne alimentaire, que citadins et banlieusards doivent apprendre à cohabiter avec elle. Elle est protégée par la loi même si elle bouffe les laitues ou les annuelles du jardin.

«La situation est paradoxale, explique le porte parole Alain Rioux, du Service de la protection de la faune au bureau régional du ministère des Richesses naturelles et de la Faune, à Saint-Jérôme. On veut se débarrasser des marmottes alors que nous avons presque tout fait pour leur créer un environnement idéal: une galerie en béton ou un cabanon sous lesquels l'animal peut se réfugier en cas de danger, un emplacement idéal aussi pour creuser un terrier bien au sec afin d'élever sa petite famille. Et le bouquet, c'est que ce paradis est doté d'un garde-manger toujours bien garni.»

Si la Loi sur la protection de la faune permet à un citoyen d'abattre un animal qui s'en prend à ses biens, il doit prendre tous les moyens pour le faire fuir avant d'en arriver à cette étape fatale. Et si vous devez abattre la bête, vous êtes tenu d'en aviser le service de protection de la faune. Selon M. Rioux, l'objectif ultime est donc d'amener la marmotte à quitter votre propriété.

Pas au Jardin botanique

Dans un premier temps, il faut protéger nos plantations en utilisant des répulsifs. Le poivre en poudre ou encore le poivre de Cayenne saupoudré sur les plantes donne les résultats attendus dans la mesure ou le saupoudrage est refait après chaque pluie. Il existe aussi des répulsifs commerciaux et certains jardiniers ont déjà obtenu du succès en disposant des boules de naphtaline dans le potager. On peut faire la même chose à l'entrée du terrier de la bête.

Plus complexe et plus coûteux, il est possible aussi de construire autour du jardin une petite clôture d'environ 30 cm surmontée d'un fil électrique. Autre tactique: inondez le terrier. N'ayez crainte, non seulement la marmotte se sauvera pour éviter la noyade, mais elle délaissera probablement son gîte parce qu'il sera devenu inhabitable, explique l'agent de protection de la faune.

Les solutions plus radicales, maintenant: oubliez les pièges à pattes, le fusil 12, la carabine 22 ou encore la bombe fumigène. Le mieux est d'utiliser la grande trappe Havarhart pour raton laveur et marmotte. Vous pouvez l'acheter dans certaines grandes surfaces (autour de 100$), ou encore l'emprunter à un ami ou, parfois, à votre municipalité. L'animal y entre et la trappe se referme sans le blesser.

Il faut appâter de préférence avec des morceaux de pomme. Si le beurre d'arachide a une certaine efficacité, les carottes, elles, sont décevantes. Peu importe, le succès n'est pas garanti. Évidemment, plus vous êtes patient, plus vos chances de capture augmentent.

Une fois l'animal capturé, vous êtes tenu par la loi de le libérer (et non pas de le noyer, comme le font plusieurs). Voilà donc notre marmotte sur le chemin de l'exil. On utilise parfois le terme plus élégant de «relocalisation». Évidemment, vous éviterez de relâcher votre victime dans un champ agricole, ce qui pourrait causer des dommages importants à la machinerie. Si vous habitez dans l'île de Montréal, de grâce n'allez pas porter votre marmotte au Jardin botanique, comme cela se produit de plus en plus fréquemment depuis deux ou trois ans, ce qui cause d'importants problèmes, notamment aux potagers. Vous pouvez aussi demander à un exterminateur de faire le travail à votre place. On parle d'une facture de plus de 200$, mais le montant diminue pour la capture d'une deuxième bête.

Une fois la marmotte capturée et disparue, n'allez pas croire que vos soucis sont terminés, insiste Alain Rioux. «Si vous n'empêchez pas les marmottes ou encore les mouffettes de loger sous votre cabanon à l'aide d'un bon treillis métallique (qui sera partiellement enfoui sous terre à 30 cm de profondeur), vous aurez inévitablement de la nouvelle visite, tôt ou tard.»