Dégustation de raisins la semaine dernière au Jardin botanique de Montréal, un exercice sans prétention organisé pour les lecteurs de Mon Toit.

Dégustation de raisins la semaine dernière au Jardin botanique de Montréal, un exercice sans prétention organisé pour les lecteurs de Mon Toit.

 À vrai dire, je voulais vérifier si les nouveaux raisins de table offerts sur le marché québécois au cours des récentes années sont aussi savoureux qu'on le prétend. Cette dégustation visait aussi à comparer les variétés de vignes cultivées pour la vinification, aux fruits souvent savoureux lorsqu'ils atteignent leur pleine maturité, à celles destinées à être consommées comme raisins de table.

La dégustation s'est déroulée à l'aveugle (les grappes étaient numérotées) pour éviter que les juges ne soient influencés par certains noms qui pouvaient leur être familiers.

Les raisins testés, tous avec des pépins, provenaient du Jardin des plantes utiles du Jardin botanique. Cinq des huit cépages sont des hybrides de l'Université du Minnesota, une institution reconnue en Amérique du Nord pour la sélection d'une foule de vivaces et d'arbustes très rustiques. Les ceps ont été plantés en 2003 et produisent depuis trois ans. Les autres variétés sont des hybrides d'origine française plantés en 2002. Elles exigent une protection hivernale et sont utilisées sur une grande échelle dans nos vignobles.

Nos dégustateurs étaient: Gilles Vincent, directeur du Jardin botanique; Robert Mineau, contremaître responsable des jardins extérieurs; Nathalie Leuenberger, horticultrice responsable du Jardin des plantes utiles et ses collègues de travail, les horticulteurs Yves Bérubé et France Pelletier, de même que le journaliste de La Presse.

Avant de présenter nos conclusions, il importe de souligner que la période de maturité optimale de ces cépages varie évidemment dans le temps, ce qui a pu affecter la qualité de certains des raisins goûtés. Mais à l'oeil, au toucher et en bouche, tous semblaient avoir atteint leur plein potentiel.

Des raisins à vin déclassés

Première constatation intéressante: les raisins destinés avant tout à la vinification - «Seyval Blanc», «Ste-Croix» et «Cayuga blanc» - ont été les moins appréciés. Manque de personnalité, trop acide ou pépins trop volumineux, ont indiqué les juges. Une exception: le «Maréchal Foch», un raisin bleu à vin populaire au Québec qui s'est retrouvé avec un pointage moyen. Mais on lui a reproché notamment la grosseur de ses pépins et son manque de saveur. Même si les grappes étaient joufflues, le raisin était possiblement un peu trop vieux puisque son taux de sucre, mesuré 15 jours plus tôt, était très élevé.

Les cépages «Louise Swenson» et «ES4-7-25», respectivement deuxième et troisième dans notre palmarès, ont été créés par l'hybrideur Elmer Swanson. Un goût de poire, rafraîchissant, fruité, ont indiqué nos dégustateurs en ce qui concerne «Louise Swanson». Même si le «ES4-7-25» affichait le plus haut taux de sucre lors des analyses précédentes (c'est un de mes raisins de table préférés), notre groupe a estimé qu'il manquait de personnalité et était un peu acide.

Et les gagnants sont deux raisins verts, «Briana» et «Aldalmiina», classés ex aequo, loin devant tous les concurrents. Les juges n'ont pas tari d'éloges: très sucrés, fruités, juteux, fermes, au parfum de rose et même au goût léger de litchi en finale, a indiqué l'un d'eux. Ces deux variétés aux grappes compactes conviennent très bien aux jardins domestiques et peuvent, comme les autres cultivars destinés à la table, servir à faire du vin. Leur distribution est toutefois limitée, mais on peut les trouver chez Vignes du Québec.

Vignes sans protection

Rappelons que depuis quelques années, plusieurs nouveaux cultivars sélectionnés par l'Université du Minnesota pour la production de fruits frais sont vendus au Québec, des vignes qui n'exigent pas de protection hivernale (même en zone 4). Ces hybrides produisent habituellement un raisin sucré, délicieux, d'un goût souvent très différent des raisins importés vendus dans les marchés d'alimentation. La pionnière dans ce domaine est Marie-André Breault, de Vignes du Québec (www.vignesduquebec.com), une petite entreprise de Brigham, en Estrie. Mais des centres de jardin, ou encore des catalogues postaux, peuvent aussi en offrir. On pourra trouver les variétés suivantes: «Somerset», couleur rougeâtre, sans pépin et très sucré; «Montreal Blue», bleu, pépins très petits; «Prairie Star», doré, au goût de fruits tropicaux et «Kay Gray», vert, au goût d'agrumes.Des variétés qui n'ont pas été testées lors de notre dégustation.

 Mme Breault offre aussi le «Troll Haugen», un raisin bleu sans pépin. La ferme de la Pointe-du-Moulin à L'Île-Perrot, (www.fruittreenursery.ca; site en anglais seulement) vend aussi plusieurs cultivars peu connus, des hybrides obtenus en Ontario, à l'Université Cornell, dans l'État de New York ou encore au Minnesota par le chercheur Elmer Swenson. Ces vignes sont cultivées depuis plusieurs années par le proprio Ken Taylor, et certaines s'annoncent fort intéressantes, du moins dans la grande région métropolitaine. Le hic, c'est qu'il faut se rendre sur place le samedi seulement. Pour en avoir fait l'essai, il est très difficile d'obtenir des informations par téléphone ou par l'internet.

Vignes d'automne

Le mois d'octobre convient parfaitement pour planter des vignes lorsqu'elles sont vendues en pot, mais il est préférable de couvrir leur pied d'un léger paillis pour les protéger durant le premier hiver leur chez vous. Cette protection ne sera plus utile par la suite.

La vigne exige une position ensoleillée et un sol bien drainé. Même si les racines sont très profondes, l'horticultrice Nathalie Leuenberger conseille d'arroser les jeunes plants en période de canicule en juin et juillet, mais de réduire l'arrosage à partir d'août. Elle recommande aussi un apport de compost, de même qu'une fertilisation à base de potassium et de magnésium (Sulpomag), l'automne ou le printemps.

Si l'objectif n'est pas de produire des fruits en grande quantité, on peut éviter de tailler la vigne. Dans le cas contraire, une taille printanière s'impose. L'horticultrice suggère d'installer un tuteur lors de la transplantation afin de former un tronc vertical au cours de l'été suivant. Puis la seconde année, on choisit les deux branches les plus vigoureuses à environ 45 cm du sol et on les attache à un fil horizontal. Le printemps suivant, on taille les branches pendantes au premier noeud à partir du fil horizontal. D'ailleurs, tout bon pépiniériste devrait fournir un dépliant sur la taille au moment de l'achat d'une vigne.

Quand le plant atteint 4 ou 5 ans, il vaut mieux limiter la production à une trentaine de grappes pour assurer la maturité du raisin. Il va sans dire que si vous voulez obtenir des récoltes abondantes, vous devrez protéger vos vignes des oiseaux avec un filet approprié.

 

Photo Ivanoh Demers, La Presse

Une grappe de raisins «ES4-7-25», un cultivar originaire du Minnesota. Fruit doux et très sucré.