Si le kiwi est aujourd'hui un fruit de consommation courante, on ignore souvent que plusieurs de ses petits cousins sont rustiques au Québec.

Si le kiwi est aujourd'hui un fruit de consommation courante, on ignore souvent que plusieurs de ses petits cousins sont rustiques au Québec.

Mieux encore, ils poussent dans un sol ordinaire, grimpent allègrement sur les treillis et pergolas, sont peu sujets aux maladies, en plus d'être vivaces en zone 4 sans protection hivernale. Certains produisent un feuillage décoratif où le vert se mélange au rose et au blanc.

Et pour couronner le tout: la plupart des kiwis rustiques mènent aussi une vie de couple exemplaire, ce qui leur permet évidemment de donner des fruits, des minikiwis verdâtres, de la grosseur d'une cerise douce, telle la cerise de «France», mais un peu plus allongés et sans poil. On peut donc les manger sans les peler. Et surprise finale: même s'il n'a aucunement l'allure de son cousin poilu, le goût du fruit est identique.

Pourquoi alors le kiwi rustique est-il si peu connu alors que le kiwi du supermarché est si populaire?

«C'est une question de méconnaissance. Parce que le public associe avec raison le kiwi à une plante tropicale. Parce que bon nombre d'amateurs de jardinage ignore toujours que les kiwis rustiques poussent facilement au Québec et qu'ils se vendent un peu partout», explique Jocelyn Gratton, responsable de la production à la Pépinière Mont-Yamaska, de Saint-Paul-d'Abbotsford, près de Granby. Le producteur-grossiste tient trois espèces de kiwi dont voici les caractéristiques. Actinidia polygama, originaire du Japon, est la moins connue au Québec même si on la considère parfois comme la plus rustique. La variété «Vera's Pride» produit des fruits à la peau et à la pulpe jaunâtres, très sucrés.

Originaire de l'est de l'Asie, l'espèce la plus populaire au jardin est l'Actinidia kolomikta, plus particulièrement les variétés «Arctic Beauty» et «Pacha». Au printemps, leurs feuilles se couvrent à moitié ou totalement de rose ou de blanc, parfois les deux, et la proportion des coloris varie habituellement d'une année à l'autre. Vers la fin juillet, les feuilles verdissent, à l'exception de celles qui viennent de faire leur apparition. Comme les autres kiwis, il grimpe facilement de 1,5 m par année si on lui fournit un appui. Contrairement à la vigne vierge (Parthenocissis quinquefolia) par exemple, il ne peut adhérer sans aide aux murs.

Histoire de couple

«Arctic Beauty» et «Pacha» sont évidemment fort jolis mais ils ne peuvent donner de fruits. Ce sont des mâles. Sauf exception, les kiwis sont des plantes dioïques, certains plants produisant des fleurs mâles et d'autres des fleurs femelles qui, elles, produiront des fruits. La vie de couple est donc essentielle pour donner des bébés kiwis. Si vous voulez profiter de la beauté de Monsieur et de la générosité de Madame, il faudra donc les unir, ou du moins les planter non loin l'un de l'autre. Ce sont les insectes qui s'occuperont de la pollinisation. Mais souvent, mâle et femelle kolomikta sont vendus dans le même pot pour assurer une récolte.

L'union est aussi obligatoire dans le cas d'Actinidia arguta, aux feuilles vert foncé parfois bordées de rouge ou de pourpre, une espèce plus productive que la précédente.

De tous les kiwis, un seul peut produire des fruits sans devoir unir sa destinée à un autre végétal: le cultivar Actinidia arguta «Issai». Il a contourné la difficulté en produisant des fleurs femelles et mâles sur les mêmes branches. Très productif, rustique en zone 3 si on le plante dans un lieu protégé des grands vents d'hiver, il peut donner ses premiers fruits un ou deux ans suivant la plantation, selon l'âge du plant.

Les kiwis exigent le plein soleil et peuvent atteindre 6 à 7 m de longueur, parfois plus si on ne peut mettre un terme à leur ambitions. Leurs fleurs forment de minuscules clochettes blanchâtres. Dans tous les cas, la récolte a lieu vers la mi-août.

Comme la plante est volubile, on conseille une fertilisation avec un engrais balancé ou de compost. Il faut éviter tout excès d'azote, ce qui favoriserait la production de feuillage aux dépens de la récolte. Une taille printanière (mars ou avril) est nécessaire si on veut obtenir une grande production de fruits. Il faut alors couper les tiges secondaires au troisième ou au quatrième bourgeon, sur le vieux bois, comme on dit. Les fleurs pousseront sur les nouvelles pousses. Évidemment, si les bourgeons floraux sont endommagés par un gel tardif, il n'y aura pas de fruits l'été qui suit.

Si l'expérience vous tente, il n'est pas trop tard. Vous avez encore quelques semaines pour planter vos kiwis. Qui sait si vous n'obtiendrez pas vos premiers fruits le printemps prochain.

Un néozélandais de Chine

Considéré comme une liane, le kiwi du supermarché n'est pas originaire de la Nouvelle-Zélande comme on a tendance à le croire mais bien de la Chine. Actinidia deliciosa, de son nom scientifique, produisait alors des fruits semblables à ceux de nos kiwis rustiques. Ce sont les Néo-Zélandais qui ont développé des cultivars à gros fruits et qui ont aussi donné le nom commercial de kiwi à la plante dans les années 70, en l'honneur des oiseaux nocturnes et aptères du même nom, endémiques à la grande île.

Si la Nouvelle-Zélande reste un des principaux exportateurs au monde, les plus importants producteurs aujourd'hui sont dans l'ordre l'Italie, la Nouvelle-Zélande, le Chili, la France et les États-Unis. Plusieurs cultivars sont offerts sur le marché dont le plus récent d'origine néozélandaise, le «Hort16A», à chair jaune, commercialisé sous le nom de «kiwi doré» en anglais et devenu l'une des plus importantes productions horticoles du pays en termes de revenus.

 

Photo Patrick Sanfaçon, La Presse

Le feuillage du kiwi «Arctic Beauty» est vivement coloré durant une bonne partie de l'été.