«Quels arbustes devrais-je planter pour faire une haie qui cacherait la clôture délimitant le terrain du voisin et le nôtre. Une haie pour nous assurer une intimité, ne dépassant guère les deux mètres, facile d'entretien et si possible, qui donne des fleurs?»

«Quels arbustes devrais-je planter pour faire une haie qui cacherait la clôture délimitant le terrain du voisin et le nôtre. Une haie pour nous assurer une intimité, ne dépassant guère les deux mètres, facile d'entretien et si possible, qui donne des fleurs?»

Une question qui revient à plusieurs reprises chaque année, sous une forme ou une autre. Le hic, c'est qu'il n'existe aucun arbuste satisfaisant toutes ces exigences, du moins sous nos climats.

J'ai consulté plusieurs experts à ce sujet: Pierre Paquette, de la Pépinière Abbotsford, un des plus importants producteurs d'arbres et d'arbustes au Québec; l'agronome Guy Laliberté, de l'Institut de technologie agroalimentaire de Saint-Hyacinthe; l'architecte-paysagiste Chantal De Menezes, de Boucherville, et des représentants du jardin Daniel A. Seguin, de Saint-Hyacinthe. Leur réponse a été unanime: même si le thuya peut sembler démodé en matière d'aménagement paysager, notre bon vieux «cèdre» demeure la plante idéale pour faire une haie sans trop de soucis.

Formant un écran parfait, hiver comme été, il pousse rapidement. Il suffit de le tailler annuellement pour maintenir la hauteur désirée. Le thuya exige peu de soins, si ce n'est un arrosage soutenu lors de la plantation (comme toute autre espèce d'ailleurs) et un apport de compost sur les pieds au printemps ou en automne. De plus, il est peu sensible aux maladies et aux insectes ravageurs. Autres facteurs importants qui militent en sa faveur: il est peu coûteux et offert partout. Par ailleurs, si vous installez vos plants le long d'une clôture en treillis, elle disparaîtra dans le feuillage après trois ou quatre ans.

Évidemment, il existe d'autres espèces de conifères qui peuvent remplacer le thuya. L'if conviendra parfaitement dans un endroit ombragé ou semi-ombragé, mais il pousse lentement et se vend plus cher que le thuya. Par contre, il se taille davantage et plus facilement. Quant au genévrier, il est coûteux et sujet aux maladies, notamment à la rouille.

Feuillus et graminées

Voyons maintenant du côté des feuillus.

De nombreuses espèces sont utilisées comme haie. Mais dans ce cas, oubliez le côté intimiste, du moins huit mois par année, quand l'arbuste est délesté de ses feuilles. Un argument que réfute Chantal De Menezes, qui souligne que durant cette longue période, les propriétaires sont rarement dans leur cour... Selon l'architecte-paysagiste, certains lilas de Preston comme le «Donald Wyman» et le «James McFarland» aux fleurs roses et tardives (mi-juin), ou encore l'érable de l'Amour et l'aronia, peuvent donner des résultats intéressants même s'ils n'offriront pas l'écran d'une haie de conifères en hiver.

Les haies de feuillus ont souvent des branches cassantes, elles sont sensibles au poids de la neige et doivent être rajeunies régulièrement. C'est le cas du saule «Hakuro Nishiki». Non seulement faut-il réduire ses ambitions (il atteint facilement 4 m et non 2 m comme plusieurs ouvrages l'indiquent), mais il faut rajeunir le plant car son joli feuillage rosâtre du printemps a tendance à perdre ses couleurs au fil des années.

D'autres espèces comme le cornouiller blanc (tiges rouges, feuillage panaché de blanc), les viornes, certains rosiers et cotonéasters peuvent atteindre les 2 m requis, mais ne forment pas d'écran lorsqu'il sont dépouillés de leurs feuilles, bien que les rameaux du cotonéaster sont parfois très denses.

Haie en liberté

Par ailleurs, les graminées, fort populaires au cours des récentes années, se prêtent mal à l'exercice, exception faite peut-être du calamagrostis «Karl Foerter», qui grandit vite et montre son plumeau dès le mois de juillet. Mais il ne dépasse guère les 1,5 m.

Les autres graminées prennent plusieurs semaines avant d'atteindre une taille raisonnable, souvent pas avant la mi-juillet. L'hiver, elles s'écrasent sous la neige abondante et au printemps, il faut les couper rapidement, sinon elles s'envolent au vent sur le terrain des voisins.

Évidemment, quand on parle de haie, c'est l'image d'un écran végétal uniforme qui vient à l'esprit. Pourtant, on peut varier son paysage tout en conservant la verdure et l'intimité recherchées. Il suffit d'opter pour la haie... libre.

Plutôt que d'aligner vos arbustes, plantez-les de façon irrégulière en laissant aller votre imagination. C'est ce que privilégient plusieurs architectes-paysagers. On peut très bien faire une haie libre avec des thuyas (c'est ce que j'ai chez moi), mais aussi en utilisant diverses variétés de conifères ou encore en mélangeant des conifères avec quelques feuillus. L'aménagement sera plus naturel et au cours des années, il en viendra à former un écran végétal. Et qui sait si vous ne voudrez pas planter à sa base quelques fleurs annuelles ou vivaces pour ajouter de la couleur.

Le labyrinthe de Daniel A. Seguin

Vous voulez savoir à quoi ressemble une haie de conifères ou de feuillus? Allez faire un tour à partir de la fin mai au jardin Daniel A. Seguin, à Saint-Hyacinthe. En plus de faire une visite fort agréable, vous y découvrirez le Labyrinthe, un aménagement qui compte une dizaine de haies composées d'autant de variétés, murs vivants faits de saules, lilas, viornes, spirées, rosiers, cornouillers ou encore de cotonéasters. Vous pourrez aussi les comparer avec les grandes haies de thuyas qui délimitent le jardin français, celui où l'on retrouve les platebandes d'annuelles.

 

Photo Alain Roberge, La Presse

L'if produit un beau feuillage en plus de donner de jolis fruits. Il pousse très bien à l'ombre, mais coûte plus cher que le thuya.