L'une des plantes les plus bizarres de la planète est sûrement le dragonnier des Canaries. C'est un arbre mythique, né dit-on du sang du dragon à cent têtes Ladon, que Hercule a dû tuer pour avoir accès au jardin des Hespérides (filles d'Atlas) et où l'attendaient les trois pommes d'or qu'il devait rapporter pour son 11e travail.

L'une des plantes les plus bizarres de la planète est sûrement le dragonnier des Canaries. C'est un arbre mythique, né dit-on du sang du dragon à cent têtes Ladon, que Hercule a dû tuer pour avoir accès au jardin des Hespérides (filles d'Atlas) et où l'attendaient les trois pommes d'or qu'il devait rapporter pour son 11e travail.

Les Grecs utilisaient la sève rouge sang du dragonnier comme un puissant médicament ainsi que comme teinture. De nos jours, on utilise sa résine pour vernir les violons. Jadis le dragonnier poussait sur tout le pourtour de la Méditerranée, mais était déjà disparu à l'époque de l'âge du bronze, quand les forêts riches et denses de la région furent toutes détruites, provoquant la disparition des bonnes terres et qui laisse encore aujourd'hui la région aride et rocailleuse.

Jusqu'à récemment, on le croyait limité à l'état sauvage à deux îles des Canaries ainsi qu'à l'île du Cap Vert, mais on a récemment retrouvé une petite population reliquaire au Maroc dans les Atlas. Et le mystère de la localisation du jardin des Hespérides, longtemps discuté parmi les historiens, se trouve donc aussi résolu : il se trouve au Maroc, au pied des Atlas, là où poussent encore quelques dragonniers sauvages.

Un géant unique

Le plus grand spécimen de dragonnier au monde, qui aurait plus de 2000 ans, pousse au coeur du village Icod de los Vinos sur l'île de Ténérife aux îles Canaries, mesure 20 m de haut et sa cime, 15 m de diamètre. Avec son tronc enflé semblant être couvert d'écailles et ses nombreuses branches tassées les unes sur les autres, on comprend pourquoi on pouvait méprendre un tel dragonnier pour un dragon à 100 têtes.

D'ailleurs le nom botanique du dragonnier, Dracaena draco, renforce cette idée de dragon, puisque dracaena et draco veulent dire la même chose, soit «dragon». Le dragonnier n'est cependant pas un arbre comme les autres. Il ne forme aucun véritable bois, donc pas de cernes par lesquels on peut compter son véritable âge. Et ses longues feuilles de 60 cm, charnues et pointues révèlent qu'il est davantage apparenté à l'agave et au yucca qu'aux arbres à feuilles caduques que nous connaissons. Les jeunes dragonniers forment un tronc unique, sans embranchements, coiffé d'une masse de feuilles droites. C'est après la première floraison, constituée de petites fleurs blanches parfumées et qui n'a lieu que lorsque l'arbre a 10 à 15 ans, que la tête se divise enfin en branches. À chaque 10 ans par la suite, environ, il refleurit et se ramifie de nouveau, donnant éventuellement son port caractéristique en parasol.

Une magnifique plante d'intérieur

Depuis quelque temps, on commence à offrir le dragonnier comme plante d'intérieur. Ce sont de jeunes plants d'une dizaine d'années qu'on nous vend, à tronc unique, et facilement confondus avec d'autres Dracaena, mais distincts par leur tronc plus épais et dénudé, sans embranchement, coiffé d'une masse de feuilles longues au sommet.

Si le prix vous paraît exorbitant (après tout, on ne vous vendra pas un arbre de 10 ans à 20 $ !), vous pouvez aussi semer des graines de dragonnier, offertes notamment par Internet chez www.rarexoticseeds.com, rareseedsource.com ou même sur e-Bay. J'ai cultivé mon dragonnier, dont j'ai acheté les graines lors d'un voyage aux îles Canaries en 1999, à partir de semences et je l'ai trouvé facile à cultiver, du moins une fois la germination passée. Pour faire germer les grosses graines très dures, il faut en effet les «scarifier», i.e. les limer ou les couper pour provoquer une petite brèche. On peut, par exemple, faire une boule avec une feuille de papier de verre (côté rugueux vers l'extérieur) et la placer dans un bocal, y insérer les graines et passer quelques minutes à brasser le bocal, limant ainsi les graines.

La germination prend quand même deux mois et plus sous des conditions normales pour les semis (dans un terreau légèrement humide et à la chaleur) : il faut donc être patient. Après la germination, votre dragonnier ne demandera pour rester beau et pour grandir qu'un éclairage moyen à intense, des arrosages quand son terreau est sec et des fertilisations très faibles ainsi que des températures normales d'intérieur. Et si, après 40 ou 50 ans, il devient trop gros, vous pourrez lui couper la tête pour le forcer à repartir de plus bas. Bonne chance avec votre dragonnier!