Étendre, c'est un mode de vie. La corde à linge, c'est le miroir de notre personnalité. Y a-t-il geste plus révélateur que celui de suspendre ses sous-vêtements mouillés dehors, à la vue des voisins, ou de classer ses morceaux entre deux poteaux, par couleur et par ordre de grandeur?

Étendre, c'est un mode de vie. La corde à linge, c'est le miroir de notre personnalité. Y a-t-il geste plus révélateur que celui de suspendre ses sous-vêtements mouillés dehors, à la vue des voisins, ou de classer ses morceaux entre deux poteaux, par couleur et par ordre de grandeur?

 La corde à linge, inépuisable sujet. Elle évoque l'évasion pour cette superwoman qui refuse de sauver du temps en utilisant la sécheuse et qui préfère s'aérer le corps et l'esprit en manipulant 1000 épingles à linge.

 Pour cette personne tout à sa joie d'étendre rideaux et édredons, la corde à linge enfin déroulée annonce le printemps aussi sûrement que le premier merle. Et celle qui se «cherche du lavage» parce qu'elle trouve dommage de «gaspiller» un ciel si pur, une brise si parfaite, faut-il la taxer de maniaquerie ou d'épicurisme?

 Quelle satisfaction que de composer une «belle corde»! Stéphanie est aux oiseaux quand ses yeux vont aux microchaussettes de sa gamine, puis aux débarbouillettes, ensuite à ses petits pyjamas, après aux serviettes et, enfin, aux draps, dans un classement exemplaire et parfaitement inutile. Ce contentement ne s'explique pas.

 Annie prône la superposition des morceaux. «Ça fait économiser les épingles», commente cette maman de trois enfants qui, de cette manière, gagne aussi de l'espace sur une corde qui ne désemplit pas du printemps à l'automne. Elle suspend même ses serviettes, car elle aime l'effet gant de crin de la ratine rugueuse sur son épiderme. D'autres, au contraire, préfèrent la caresse des draps de bain passés au Fleecy. Deux écoles incompatibles...

Étendre même l'hiver, dehors

 Étendre l'hiver, dehors, par - 20°C? Cette activité est plus rare de nos jours. Mais quand nos mères avaient des lessiveuses à tordeur, bien après l'époque des Filles de Caleb, elles utilisaient la corde à linge à longueur d'année. L'odeur vivifiante qui se dégageait des chandails raidis par le froid dans leur gangue humide est impossible à oublier.

 La corde à linge survivra à tous les modes de vie et à toutes les époques.

 Elle ne donne pas le cancer, elle ne pollue pas, elle ne fait pas engraisser et elle ne cause pas d'accident, sauf peut-être si votre voisin trébuche dans le fil de sa tondeuse en fantasmant sur vos soutiens-gorge au vent.

 Le pire qui peut arriver, c'est de vous faire voler vos vêtements. Mais la police de Québec n'a encore jamais rapporté pareil larcin.

 Bon à savoir

 Au Québec, l'utilisation de la sécheuse électrique représente 3 % de la consommation d'électricité du secteur résidentiel. Une brassée d'environ 50 minutes consomme quelque 2500 watts-heure.

 Hydro-Québec permet aux citoyens de fixer leurs cordes à linge à ses poteaux, à la condition que les ancrages soient trois mètres plus bas que le fil électrique de distribution.

 

Photo Jean-Marie Villeneuve, Le Soleil

Une corde à linge pour chaque étage.