Les toits s'animent. Un peu partout en ville, barbecues, pavillons et mobilier de jardin se multiplient sur les terrasses aménagées en hauteur. Cet univers parallèle, pratiquement invisible au niveau du sol, est privilégié pour relaxer, mais aussi pour faire pousser légumes et fines herbes.

Les terrasses sur les toits des immeubles se multiplient. Dans certains quartiers centraux de Montréal, les nouvelles constructions de trois étages sont de plus en plus surmontées de mezzanines donnant sur une... ou même deux terrasses. Quant aux complexes en copropriété neufs de plus de cinq étages, ils ont pratiquement tous des espaces joliment aménagés sur le toit.

Lorsqu'elles sont privées, ces terrasses, véritables oasis urbaines, remplacent une cour. Quand elles sont communes, elles servent d'extension à des logements aux dimensions souvent réduites.

«L'aménagement de terrasses communes sur les toits ne coûte pas très cher et permet d'offrir de l'ensoleillement, tout en étendant l'espace de vie plus limité en copropriété, indique Mathieu Collette, directeur des études de marché du condo au sein du Groupe Altus. Les piscines sont plus dispendieuses. On les retrouve sur le toit d'immeubles où il y a un plus grand nombre de condos afin de répartir les coûts.»

Les terrasses se trouvant au 10e, 12e ou 15e étage ont tendance à être plus fréquentées que celles situées au 20e étage, à cause des forts vents qui y soufflent, souligne Mathieu Collette. «C'est plus frisquet, dit-il. Certains éléments du mobilier doivent être fixés au sol. C'est pourquoi les terrasses des tours de 40 et 50 étages autour du Centre Bell seront aménagées beaucoup plus bas, sur le toit des basilaires ainsi qu'au 8e, 9e ou 10e étage.»

Les diverses installations permettent aux complexes de se distinguer. «Chaque projet a tendance à trouver sa propre identité, souligne Olivier Legault, associé principal chez Béïque Legault Thuot Architectes (BLTA), qui a signé la conception et les plans de construction des complexes Icône Condos et Roccabella, et qui a signé les plans de construction de L'Avenue, tous trois en train d'être érigés près du Centre Bell.

«Chacun a ses trucs et ses recettes», précise-t-il.

Rester compétitif

Pour demeurer compétitif au centre-ville et dans le Triangle (près de la station de métro Namur), il faut offrir au moins une terrasse sur le toit et une piscine, intérieure ou extérieure, estime Richard Varadi, promoteur des Condos Vue au sein du Groupe Canvar. Plusieurs espaces communs destinés aux copropriétaires des phases 5 et 6 du complexe seront réunis sur le toit dans le Club SkyVue et seront probablement les plus élaborés réalisés par la firme.

«Chaque année, on en donne un peu plus, précise-t-il. Les copropriétaires aiment avoir l'option d'une piscine ou d'une terrasse sur le toit, même s'ils ne s'en serviront jamais.»

Au centre-ville, les acheteurs initiaux, qui s'avèrent en partie des investisseurs, tiennent les espaces communs pour acquis et n'apprécient pas nécessairement à leur juste valeur les diverses caractéristiques qui rendent leur complexe unique, constate Geoff Allan, vice-président développement du complexe Icône Condos, dont la première phase comprendra un court de tennis et une surface couverte de végétation, au-dessus d'une partie du basilaire. Il y aura aussi (entre autres) deux terrasses au 8e étage.

ILLUSTRATION FOURNIE PAR STATIONNEMENT MÉTROPOLITAIN

Les futurs copropriétaires du complexe Icône Condos, près du Centre Bell, pourront regarder les matchs de tennis qui se dérouleront sous leurs yeux.

«À long terme, quand tout sera fini et que ce sera plus tranquille, les deuxièmes et troisièmes acheteurs, qui voudront vivre au centre-ville, seront prêts à payer une prime pour en profiter, croit-il. On doit toutefois s'assurer que ces espaces communs seront efficaces à gérer et n'engendreront pas de grosses dépenses pour les copropriétaires.»

Prével a été l'un des premiers à créer des milieux de vie avec piscine et chalet urbain sur les toits de ses complexes dans Saint-Henri et Griffintown. Jacques Vincent, coprésident de l'entreprise, est particulièrement fier des terrasses réalisées sur les toits des quatre derniers immeubles du Lowney (phases 8 à 11), reliées par des passerelles. Chacune ayant sa propre atmosphère (avec piscine, lieu de rencontre, barbecues, plage, etc.), les copropriétaires ont l'embarras du choix. Dans un prochain projet, le concept des passerelles pourrait être poussé plus loin et faire partie d'un circuit de marche, révèle-t-il.

Devimco Immobilier, qui accorde aussi beaucoup d'importance aux espaces communs sur les toits, cherche également à innover. Marco Fontaine, directeur principal ventes et marketing du District Griffin, dans Griffintown, refuse de parler de surenchère.

«Il faut offrir des concepts originaux tout en respectant les besoins des gens qui habiteront les immeubles, afin que les services soient utilisés», explique-t-il.

La vague des terrasses sur les toits n'est pas près de s'essouffler.

PHOTO OLIVIER PONTBRIAND, LA PRESSE

Les terrasses privées aménagées sur les toits sont de véritables oasis.

Populaires, les terrasses

Certains règlements municipaux expliqueraient-ils la prolifération des terrasses sur les toits? Il semble que non. Celles-ci se multiplient parce qu'elles sont populaires, souligne-t-on aux arrondissements du Sud-Ouest et de Rosemont-La Petite-Patrie.

Le règlement d'urbanisme de plusieurs arrondissements, dont ceux de Ville-Marie, du Sud-Ouest et de Rosemont-La Petite-Patrie, exige tout de même que les projets résidentiels «qui occupent 85% de la superficie de leur terrain doivent réserver 10% de la superficie des logements à des fins d'espaces libres, que ces espaces soient à l'intérieur ou à l'extérieur», explique Anik de Repentigny, chargée de communication à l'arrondissement de Ville-Marie. Les espaces libres peuvent être des balcons, des terrasses, un gymnase, une piscine, etc. Or, ces dispositions ne sont pas nouvelles, puisqu'elles ont été adoptées par la Ville de Montréal (ancienne mouture) en 1994, bien avant l'engouement pour les terrasses sur les toits.

Toitures végétalisées: nouvelles règles

Les toits sont souvent verdis grâce à des cultures en pots ou en bacs. Ils peuvent aussi être végétalisés pour créer un îlot de fraîcheur et contribuer à combattre le réchauffement climatique. Pour encadrer la construction de toits végétalisés, qui gagnent en popularité, la Régie du bâtiment du Québec a publié à la fin du mois de mars un guide pratique. Située en bordure du Vieux-Montréal, la terrasse de la coopérative d'habitation Cercle Carré, pour artistes et travailleurs culturels, est une des premières à avoir été conçue et réalisée selon les nouvelles règles établies par l'organisme gouvernemental. «Cela n'a pas été facile», souligne l'architecte Owen Rose, qui a travaillé de concert avec Toiture Nature pour la créer. «Mais tous en sortent contents.»

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Sur une partie du toit du Saint M, dans le Vieux-Montréal, les copropriétaires profitent de leur piscine.

Trois aménagements entre ciel et terre

De plus en plus nombreuses, les terrasses en hauteur se distinguent les unes des autres. Qu'elles soient petites ou grandes, privées ou communes, elles ont au moins un élément en commun: elles permettent de profiter au maximum de l'été. Voici trois exemples.

Deux terrasses plutôt qu'une

Les propriétaires de cette terrasse, Alain Simard et Guy Collard, ont l'embarras du choix: de leur mezzanine, située au quatrième étage de leur immeuble, en périphérie du centre-ville de Montréal, ils ont accès à deux terrasses.

La plus spacieuse, se trouvant à l'avant et orientée vers l'est, offre la plus belle vue. C'est là qu'ils mangent le week-end et s'installent avec leurs parents et amis pour admirer les feux d'artifice.

Plus intime, la terrasse située à l'arrière, en plein soleil, invite quant à elle à la détente. Chaque année, depuis 11 ans, ils améliorent ces deux espaces de vie, dont ils profitent pleinement. Ils ne pourraient plus s'en passer!

PHOTO OLIVIER PONTBRIAND, LA PRESSE

Chaque année, Alain Simard et Guy Collard essaient d'innover. Cet été, ils n'ont pas couvert la pergola sur la terrasse orientée vers l'est, moins exposée au soleil. Résultat: la vue est plus dégagée.

Cultiver ses légumes sur le toit

L'an dernier, Carl Spence et Marie-Claude Giroux ont chacun emménagé au Vam (qui signifie Vivre à Montréal), dans Hochelaga-Maisonneuve.

Cet été, ils font pousser pour la première fois des tomates, des radis et de la laitue sur le toit de l'immeuble de quatre étages.

Dès le départ, ce concept leur a beaucoup plu. Ils ont joint leurs potagers pour diversifier leur récolte et profiter de l'expérience de Carl, qui a davantage le pouce vert.

Or, la terrasse est devenue un lieu de rassemblement où tout le monde se parle et échange des conseils. Des liens se tissent au même rythme que poussent les légumes.

PHOTO OLIVIER PONTBRIAND, LA PRESSE

L'idée d'avoir leur propre potager sur le toit du Vam a beaucoup plu à Carl Spence et Marie-Claude Giroux. Leur première expérience, cet été, est très positive.

Piscine et vue à couper le souffle

Situées au 20e étage, la terrasse et la piscine du District Griffin sur l'eau surplombent le bassin Peel, dans Griffintown.

Offrant des vues spectaculaires sur le centre-ville et le fleuve, elles attirent différentes personnes à divers moments de la journée.

Le médecin Michel Gauthier, par exemple, aime s'y asseoir en toute tranquillité le matin, après s'être entraîné dans la salle d'exercice voisine.

Les enseignantes torontoises Sabrina Medeiros et Nancy Cabral, qui passent l'été à Montréal, profitent quant à elles de la piscine dès qu'il fait beau. Le soir, elles se rendent souvent sur la terrasse avec une bouteille de vin. Elles ne sont pas les seules...

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, LA PRESSE

La terrasse et la piscine sur le toit du complexe District Griffin sur l'eau, dans Griffintown, sont particulièrement attrayantes quand il fait chaud.