Havre de paix, de lecture, de repas «sur le gril», de joyeuses réunions d'été... Là où on jardine avec les enfants, joue à la cachette, cueille des framboises, compose un bouquet de lilas... La cour est l'endroit de tous les possibles. Il suffit d'assumer son identité: urbain ou 450!

«En ville, explique l'architecte paysagiste Marc Morin (Solidago), il faut vraiment verdir le plus possible, y compris verticalement, pour contrer les îlots de chaleur. Le peu de place nous porte à associer des espèces qui occupent l'espace à différentes hauteurs ou à différents moments de l'été.»

On travaille également avec les microclimats, notamment si on a une cour du côté sud, protégée des vents froids. «Chez moi, reprend M. Morin, on est en zone 6 (sur la carte des zones de rusticité d'Agriculture Canada, NDLR), alors que Montréal se situe plutôt en zone 5b ou 5a (moins chaud).

Cela m'a permis de planter une glycine et un pêcher.»Pour aménager un potager en ville, si on doute de la qualité du sol, on travaille par-dessus, avec des membranes et des bacs.

En banlieue, les choses se présentent différemment. Il faut disposer d'une grande cour, par exemple, pour qu'une partie du terrain soit consacrée à la reconstitution d'un écosystème indigène, comme l'ont voulu les clients d'Alain Baillargeon, architecte paysagiste à Mont-Saint-Hilaire (Objectif paysage).

«Un mandat qui m'a rendu très heureux», confie-t-il. L'écosystème du mont Saint-Hilaire comprend l'une des dernières forêts anciennes intactes du sud du Québec, désignée par l'UNESCO Réserve de la biosphère. «La couche d'humus y est en place depuis le retrait de la mer de Champlain», fait observer M. Baillargeon. 

Six ans après l'aménagement, ce n'est pas encore la forêt tricentenaire, mais ça lui ressemble, en plus jeune!

Aménagement 101: planifiez!

La première chose à faire, c'est de rêver... et de noter vos aspirations d'aménagement extérieur: sainte paix, ambiance «cinq à sept», pergola, fontaine, potager, spa... Ensuite, la clé de la réussite, c'est une bonne planification, affirment d'une même voix les spécialistes, de l'excellent guide pratique Aménagement extérieur du magazine Protégez-vous jusqu'à la gourou américaine du jardinage, Marjorie Harris. Quelques tuyaux.

Définir l'objectif. «On s'assoit avec les membres de la famille et chacun exprime ses besoins, dit Alain Baillargeon, architecte paysagiste (Objectif paysage). Comment veulent-ils se sentir dans leur cour?» Un exemple parmi d'autres: «Pour que les enfants puissent cueillir des petits fruits, les parents demandent un bosquet de framboisiers ou des fraisiers en jardinières», affirme Marc Morin, également architecte paysagiste.

Le budget. On fait la liste d'épicerie avec une estimation des coûts: bassins d'eau avec cascades, remises, terrasse, luminaires, terre, arbres, arbustes, plantes, etc.

On peut dessiner soi-même un plan à l'échelle, ce qui nous prépare à rencontrer un professionnel. «Un plan grossier d'abord, conseille Marjorie Harris, indiquant les éléments existants, les zones d'ombre et de soleil, et les zones attribuées à différentes fonctions: plates-bandes, potager, terrasse, etc.» Un architecte paysagiste peut également dessiner le plan, et voir à sa réalisation. On le trouve par référence ou à l'Association des architectes paysagistes du Québec. Autre option: on achète le plan d'aménagement professionnel et on le concrétise soi-même, en quelques années. Pour les travaux, on peut faire appel à un entrepreneur paysagiste (Association des paysagistes professionnels du Québec).

On étudie la nature du sol, les vents, l'ensoleillement, le drainage, etc. Les centres de jardin peuvent nous renseigner sur la zone de rusticité et faire une analyse du sol. «Il faut bien comprendre son terrain, dit Marc Morin. Identifier les zones sèches, ombragées, celles où on mettra du couvre-sol ou des allées. Réservez le gazon pour les zones utilitaires piétinées. Lorsque le sol est ombragé et parcouru de grosses racines, le sedum âcre devient un couvre-sol approprié qui s'insérera dans tous les interstices. Si le terrain est un peu ombragé, on plantera des pervenches. Les lysimaques sont également un bon couvre-sol.»

Savoir ce qu'on veut conserver, éliminer ou transformer. «Veut-on ombrager une zone trop chaude? demande Marc Morin. Veut-on végétaliser la clôture?» «Mes clients voulaient conserver un févier déjà en place, relate Alain Baillargeon. On a fait passer la clôture juste à côté, et installé le coin dînette sous son ombre.»

Installez d'abord les structures lourdes. Elles sont très compliquées à ajouter après les plantations. Choisissez définitivement leur type: le muret de soutènement (en pierre taillée?), le système d'irrigation (souterrain?), le récupérateur d'eau de pluie, combien de composteurs, quel type de cabanon, quelle sorte de dalles, quelle essence de bois, etc.

Amendez le sol et plantez! Mais sans vous brûler. «Vouloir aller trop vite mène au découragement, dit Marjorie Harris. Étalez vos efforts et votre budget de plantation sur trois ans. La première année: 60% aux arbres et arbustes, 40% pour les vivaces, bulbes et annuelles.»

Une erreur fréquente consiste à ne pas tenir compte des dimensions de la plante à maturité, rappelle M. Morin. Mais les conditions d'aujourd'hui auront changé dans cinq ans. «Planifiez pour dix ans, quitte à changer d'idée ensuite», conseille Marjorie Harris.