La situation est différente chez les grands mille-pattes, généralement d'origine tropicale. Plusieurs ont un charme certain, une personnalité intéressante, bien que réservée. Ils sont même prisés comme animaux de compagnie. Mais ce n'est pas vraiment le cas des iules, qui mesurent deux ou trois centimètres, et qui ont parfois la mauvaise habitude de vouloir passer l'hiver dans nos sous-sols.

La situation est différente chez les grands mille-pattes, généralement d'origine tropicale. Plusieurs ont un charme certain, une personnalité intéressante, bien que réservée. Ils sont même prisés comme animaux de compagnie. Mais ce n'est pas vraiment le cas des iules, qui mesurent deux ou trois centimètres, et qui ont parfois la mauvaise habitude de vouloir passer l'hiver dans nos sous-sols.

Ce petit iule est un des myriapodes les plus fréquemment rencontrés dans nos jardins. (Photo prise par Claude Gélinas)

Ce rapprochement entre l'arthropode aux pattes multiples et le genre humain ne va pas sans heurts. Au cours de la dernière année, plusieurs lecteurs m'ont écrit pour manifester leur exaspération envers les mille-pattes. C'est le cas notamment de Marie Rhainds, de Saint-Basile-le-Grand, sur la Rive-Sud, qui demande comme se débarrasser de la bestiole. «Tout l'été, nous avons été aux prises avec ce genre de petit ver noirâtre, peu ragoûtant, qui se promenait près de notre porte principale, écrit-elle. Nous avons tout essayé pour nous en débarrasser: éliminer le paillis, utiliser de la poudre insecticide pour insecte rampant, arroser avec une solution d'eau de Javel. Rien n'y fit. Ils étaient toujours là, le soir venu. Je vois le printemps revenir avec appréhension.»

Les mille-pattes ou myriapodes ne sont pas des insectes à proprement parler, mais ils font partie du même groupe, les arthropodes, et sont plutôt associés aux homards, crevettes, écrevisses ou autres crustacés terrestres comme ces cloportes souvent appelés «bibittes d'humidité». Ils sont presque tous d'origine tropicale et on en compte autour de 10 000 espèces dans le monde, ce qui représenterait à peine 20% de la grande famille, explique Jean-Denis Brisson, taxonomiste spécialisé en entomologie, au ministère des Ressources naturelles et de la Faune. Au Québec, on en dénombre une trentaine et la moitié d'entre-elles ont été apportées d'Europe depuis la colonisation. Curieusement, même si elles sont arrivées chez nous depuis des lunes, les espèces européennes restent toujours localisées là où elles ont posé les pattes la première fois.

Le Québec compte aussi une autre espèce, Narceus americanus, une bestiole sympa qui atteint une quinzaine de centimètres, plutôt rare et que l'on retrouve dans le sud-ouest du Québec. Même si on les classe parmi les mille-pattes, nos petits iules ont seulement 40 à 60 pattes, à raison de deux paires de pattes par segment. Comme la plupart des membres de la famille, une paire de pattes s'ajoute à chaque mue, environ quatre à cinq par année au Québec, l'animal étant en état d'hibernation au cours de l'hiver.

En milieu tropical, la bête est en croissance continue, ce qui explique qu'on y trouve les plus longs spécicimens, certains pouvant atteindre 45 cm. Pourtant, en dépit de leur nom, aucun mille-pattes n'est pourvu de... 1000 pattes. Mais presque. Notre Narceus americanus en possède environ 220 et son cousin, le mieux pourvu à ce chapitre, en compte près de 800.

Les myriapodes ont le corps nu, mais souvent parsemé de poils épars, ce qui n'en fait pas une bête poilue pour autant. Les gros spécimens dégagent parfois une mauvaise odeur lorsqu'on les manipule. Ce n'est pas le cas de nos iules. Les mille-pattes mangent surtout de la matière organique en décomposition mais en serres, certaines espèces peuvent causer des dommages importants aux racines des jeunes plants. Certaines espèces peuvent aussi endommager des cultures en Afrique.

Chez nous, la bête se retrouve donc dans les tas de compost et dans les détritus végétaux, un milieu humide essentiel à sa survie. Elle ne mord pas, ne pique pas, ne transmet pas de maladie. En cas de défense ou si elle est manipulée maladroitement, elle s'enroule sur elle-même. Elle passe l'hiver en état d'hibernation et peut vivre environ trois ans.

En fin de saison, les petits mille-pattes peuvent parfois migrer et chercher à entrer dans les abris chauffés comme les garages ou les résidences. Aux États-Unis, ils sont parfois des multitudes à chercher un refuge pour l'hiver, mais cela reste l'exception et le phénomène ne s'est jamais vu au Québec. D'ailleurs, des invasions de mille-pattes se sont déjà produites à quelques reprises dans le passé au Japon, en Allemagne, en France et en Hongrie. À tel point d'ailleurs que les roues de locomotives n'avaient plus aucune prise sur les rails.

Au Québec, les iules, qui parviennent à s'introduire dans une maison, seront généralement dans le sous-sol à cause de l'humidité, mais ils mourront inévitablement de déshydratation. En guise de pré-vention, il faut colmater les fissures dans les fondations ou dans la structure de la maison. Jean-Denis Brisson conseille aussi de placer une bande recouverte de Tangle Foot, un produit très collant, aux endroits que le myriapode escalade habituellement pour pénétrer dans la maison. Évidemment, le tas de compost et toute accumulation de débris végétaux devraient être éloignés de votre résidence.

Si vous persistez à vouloir vous débarrasser de ces petites bêtes innocentes, Micheline Lévesque, l'auteure du Guide complet des pesticides à faible impact, conseille d'étendre de la terre diatomée sur le sol, car les aiguilles de silice provoqueront leur mort. Après une pluie, il suffit de passer un râteau sur la poudre blanchâtre pour qu'elle retrouve son efficacité. Vendue partout, mais à bien meilleur prix chez les dépositaires d'équipements de piscine, la terre diatomée est aussi très efficace contre les limaces. Mme Lévesque conseille également d'en déposer à l'intérieur de la maison, là où les iules se cachent. Le produit réussit aussi à éliminer les fourmis.

L'experte conseille également un produit appelé Orange aPEEL, à base d'écorces d'orange, vendu au rayon des produits naturels. Une substance naturelle, la D-limoneme, agit à la fois comme insecticide et comme insectifuge. Et il sent très bon, insiste-t-elle.