C'est à l'automne que la décision se prend. Serez-vous un jardinier forcené ou un jardinier paresseux? Car, pour le jardinier forcené, l'automne est une grosse saison de travail, alors que pour le jardinier paresseux, c'est une longue saison de farniente.

C'est à l'automne que la décision se prend. Serez-vous un jardinier forcené ou un jardinier paresseux? Car, pour le jardinier forcené, l'automne est une grosse saison de travail, alors que pour le jardinier paresseux, c'est une longue saison de farniente.

 Le «ménage» des plates-bandes

Le jardinier forcené, par exemple, tient à faire le grand ménage de ses plates-bandes. Il arrache toutes les annuelles et coupe les vivaces au sol pour que ses plates-bandes soient propres, propres, propres. Il faut, pour ce faire, se munir de sécateurs, d'un râteau et de beaucoup de sacs de plastique, car du stock, il en sort de son terrain. Après, il contemple avec satisfaction ses plates-bandes vides de tout ce qui pousse et il est content, car une plate-bande vide est une plate-bande propre et c'est ce qui compte.

Il est inutile de lui faire remarquer qu'il vient tout juste de faire un tort terrible à ses plates-bandes. En arrachant les annuelles, il vient de jeter à la poubelle de la belle terre, laissant de plus ce qui reste de la terre de ses plates-bandes exposé à l'érosion. De plus, la faune bénéfique du sol est terriblement perturbée... mais ce n'est pas grave, pense-t-il, car qui a besoin de champignons, de bactéries et d'insectes bénéfiques quand on peut appliquer des doses massives d'engrais?

En coupant les vivaces au sol, il expose les pauvres plantes aux pires rigueurs de l'hiver, car elles conservaient précieusement leurs tiges et leurs feuilles près d'elles pour s'abriter du froid.

Malheureusement, ces plantes vivaces sortiront de l'hiver affaiblies... si encore elles survivent, mais après tout, le ménage ne compte-t-il pas plus que la santé des plantes?

De plus, les insectes bénéfiques hivernent dans les feuilles et les tiges des vivaces et des annuelles qu'il vient d'envoyer aux ordures. Ainsi, l'année prochaine, il aura le plaisir de vaporiser maints pesticides sur sa plate-bande, vu que les insectes nuisibles, dont il vient d'éliminer les ennemis, proliféreront.

Le jardinier paresseux laisse et ses annuelles et ses vivaces sur place l'hiver. D'accord, les annuelles sont mortes, détruites par le gel, mais mêmes mortes elles jouent un rôle important dans l'écosystème, réduisant l'érosion et aidant à attraper la neige qui protégera les plantes vivaces avoisinantes. Il ne coupe pas non plus ses vivaces au sol. Pendant des millions d'années elles ont évolué pour que leurs tiges restent debout l'hiver et que leurs feuilles se recroquevillent sur leur couronne pour la protéger du froid.

Pourquoi défaire ce «plan de survie hivernale» de Dame Nature juste pour faire propre? Dame Nature n'est pas proprette, mais elle sait produire de belles plantes! Au printemps, il coupera au sol les tiges mortes... du moins celles qui restent (la majorité pourrissent au cours de l'hiver, enrichissant le sol et lui évitant le besoin d'appliquer de l'engrais), mais il aura très peu de ménage à faire. Presque rien, en fait, car Dame Nature s'occupe de presque tout quand on la laisse faire.

Attirer les oiseaux

Le jardinier forcené commence à installer ses mangeoires pour l'hiver. Elles lui coûtent très cher et il faut de plus payer encore et encore pour de la nourriture, mais il a les poches profondes et adore dépenser.

Le jardinier paresseux n'a pas besoin d'installer des mangeoires pour l'hiver. Les plantes qu'il n'avait pas coupées au sol (tournesols, échinacées, graminées, etc.) portent les graines qui seront la nourriture naturelle des oiseaux. Il aura autant de visiteurs ailés que son voisin forcené, mais il laissera Dame Nature faire tout le travail.

Protection hivernale

Dès le ménage terminé, le jardinier forcené s'empresse de tout emballer pour l'hiver. Rien ne lui échappe: il y aura des «momies» partout! Sa seule déception est qu'il n'arrive pas à emballer les grands arbres: il se contente d'emballer toutes les autres plantes à tiges ligneuses (arbustes, rosiers, conifères, jeunes arbres, etc.).

Il ne fait aucune confiance à Dame Nature pour protéger ses plantes contre les effets de l'hiver... d'ailleurs, comme il n'est jamais sorti de la ville de sa vie (du moins pas les yeux ouverts), il ne sait même pas que les conifères, les arbustes, les rosiers et les arbres qu'il protège avec tant de soins passent parfaitement l'hiver sans le moindre emballage dans la nature. Il emballe même ses conifères, qu'il avait pourtant achetés «parce qu'ils sont beaux 12 mois par année», mais que voulez-vous, il a toujours été un peu excessif!

En emballant ses plantes, il pense les avoir mises à l'abri du froid, car il est convaincu qu'une couche de toile ou de jute empêchera le froid de pénétrer dans ses végétaux. Or, il fait exactement la même température à l'intérieur de sa protection qu'à l'extérieur. En fait, tous ces emballages ne protègent nullement contre le froid, mais réduisent bien la force du vent... un peu!

Le jardinier paresseux n'emballe rien pour l'hiver. Il choisit plutôt des plantes selon son climat et ses conditions. Il s'informe notamment de la zone de rusticité des végétaux qu'il plante et évite les plantes des zones 5 et plus, se contentant des végétaux adaptés à sa région (zones 4 et moins). Si une plante brûle l'hiver, c'est qu'elle n'est pas bien adaptée à cet endroit. Il la remplace par une plante qui l'est. Ainsi, il plante ses rhododendrons à l'abri du vent et il évite de planter des arbustes ou des conifères près des jets de la souffleuse, où ils peuvent être brisés, car il sait que c'est le domaine des vivaces qui ne sont nullement dérangées par cet appareil.

Les feuilles d'automne

Le jardinier forcené ramasse au râteau toutes les feuilles d'automne sur son terrain et les met à la rue pour que la Ville en dispose: il sort souvent des dizaines et des dizaines de sacs de «déchets» de son terrain pour que ce soit très, très propre. Dès que le vent apporte encore quelques feuilles, il recommence. Décidément, jardiner, c'est un travail sans fin!

Le jardinier paresseux aussi ramasse les feuilles tombées sur son terrain, mais seulement celles qui atterrissent sur son gazon: il sait que les feuilles tombées dans les plates-bandes ne nuisent pas et vont même nourrir le sol. Le gazon, qui est un milieu hautement artificiel, ne tolère pas l'ombre des feuilles tombées. Il les ramasse alors, mais ne les jette pas. Il les ramasse avec une souffleuse-déchiqueteuse qui coupe les feuilles en miettes ou encore, il utilise sa tondeuse pour les ramasser et les déchiqueter. Et il ne jette pas ses feuilles. Une fois déchiquetées, elles font un merveilleux paillis gratuit qui ne part pas au vent et qu'il peut poser dans ses plates-bandes pour enrichir le sol tout en protégeant les couronnes des plantes du froid. Plus il en met, plus ses plates-bandes sont belles.

Et voilà! Serez-vous un jardinier forcené ou un jardinier paresseux? Ce sont vos actions au cours des prochaines semaines qui vont le déterminer!