Mon ami m'a expliqué qu'un beau matin, il s'est réveillé au son de la scie mécanique, parce que son voisin avait, sans le lui dire, engagé un émondeur pour enlever des branches dont les feuilles tombaient sur son terrain. Et ce, même si les branches étaient celles d'un arbre qui poussait sur le terrain de mon ami.

Mon ami m'a expliqué qu'un beau matin, il s'est réveillé au son de la scie mécanique, parce que son voisin avait, sans le lui dire, engagé un émondeur pour enlever des branches dont les feuilles tombaient sur son terrain. Et ce, même si les branches étaient celles d'un arbre qui poussait sur le terrain de mon ami.

Ce souvenir a énervé mon ami qui m'a raconté une histoire encore plus tordue. Le voisin émondeur habitait depuis des décennies dans sa maison et était très fier de sa belle haie de cèdres. Un jour, la propriété adjacente a été vendue et le nouvel acheteur s'est avéré être un ennemi des cèdres; il a constaté que la moitié de la haie de cèdres se trouvait sur son terrain et les a déracinés. Depuis, les deux voisins ne se parlent plus.

Ces deux anecdotes illustrent le pouvoir maléfique des haies. Leur potentiel de discorde est tel que la Grande-Bretagne s'y attaque directement, dans le cadre d'une loi sur les comportements antisociaux, récemment entrée en vigueur. La loi prévoit que les propriétaires qui laissent pousser leur haie plus de deux mètres de haut peuvent recevoir des amendes de 1000 livres (2500 $ CDN) s'ils refusent de la tailler malgré les demandes de voisins. Un groupe d'activistes anti-haies, Edgeline, qui représente les «victimes des haies», a même joué un rôle dans l'adoption de la loi.

Malgré ces embûches, les haies sont de plus en plus populaires, selon deux paysagistes à qui La Presse a demandé des conseils. «Les gens veulent de plus en plus avoir un espace privé», estime Daniel Robert, propriétaire de l'entreprise qui porte son nom. «Souvent, ils vont combiner clôture et haie, parce que les cèdres mettent quelques années à atteindre la hauteur voulue: 10 ans pour sept ou huit pieds, à raison d'un pied par an, à peu près.»

Le cèdre est souvent utilisé parce qu'il ne demande pas beaucoup d'entretien, est compact et se taille bien, selon M. Robert. Mais il existe aussi des haies d'arbustes qui fleurissent, comme le Spirea Van Houtte, qui forme de petits boutons blancs au printemps, ou le chèvrefeuille, dont certaines variétés sont très bien adaptées au climat québécois.

Une haie n'est pas nécessairement plus chère qu'une clôture, souligne Marie-Andrée Fortier, d'Arts et jardins, une entreprise située près de Saint-Hyacinthe. «Il faut concevoir à l'avance le but qu'on veut atteindre pour chaque côté du jardin: empêcher le passage, mettre du relief, donner une impression de profondeur, ou simplement préserver la vie privée. On n'est pas obligé non plus de faire toute une ligne d'arbres: on peut en planter quelques-uns devant la clôture, bien espacés, en zigzag, pour qu'ils donnent du relief au bout de quelques années.»

Mme Fortier ajoute un élément aux critères du choix de haie: veut-on un écran quatre saisons, ou seulement pour l'été? «Le cèdre est touffu toute l'année, mais pas les arbres feuillus. Le cèdre, aussi, attire les oiseaux l'hiver, parce qu'ils sont plus au chaud dans les haies. Mais il y a des gens qui n'aiment pas le cèdre, parce qu'ils trouvent que ça sent la boîte de carton.»

Un autre avantage des haies sur les clôtures, selon Mme Fortier: on peut les faire pousser à la hauteur qu'on veut (contrairement à ce qui se passe en Grande-Bretagne). «J'ai des clients à Saint-Bruno qui ont une haie de cèdres de 15 pieds. On ne peut pas faire ça avec les clôtures, qui sont souvent limitées, par règlement municipal, à six pieds.»