Dans bien des cas, les agronomes, trop occupés par l'immense secteur agricole, s'étaient tenus à l'écart du débat. Quelques-uns ont lancé un appel à la modération, mais ils n'ont pas fait le poids face aux groupes de pression. «On a fait une grave erreur en ne s'impliquant pas assez», déclare Donald Côté, président de l'Association professionnelle des agronomes du Québec.

Dans bien des cas, les agronomes, trop occupés par l'immense secteur agricole, s'étaient tenus à l'écart du débat. Quelques-uns ont lancé un appel à la modération, mais ils n'ont pas fait le poids face aux groupes de pression. «On a fait une grave erreur en ne s'impliquant pas assez», déclare Donald Côté, président de l'Association professionnelle des agronomes du Québec.

«On n'a pas vu venir la crise urbaine», renchérit Daniel Savoie, agronome éco-toxicologiste et porte-parole de l'Ordre des agronomes du Québec qui craint maintenant les effets pervers de ce qu'il qualifie de «surréglementation».

Pour le commun des mortels, la pelouse constitue un casse-tête majeur. Les agronomes craignent maintenant la délinquance et l'émergence d'un marché noir qui pourraient s'avérer pires qu'une lutte intégrée avec usage bien contrôlé de pesticides. Certains vont tout essayer pour se débarrasser de mauvaises herbes coriaces ou d'insectes ravageurs, estiment-ils. Les pesticides sont peut-être défendus, mais pas les solvants ou l'essence par exemple qui pourraient soudainement attirer un proprio désespéré. C'est sans compter le marché noir et l'usage de pesticides en cachette car, si le règlement impose des balises très serrées, les fonctionnaires qui pourraient jouer à la police sont plutôt rares. Plus draconiens, certains citadins ont carrément asphalté le devant de leur maison.

Ces agronomes ne sont pourtant pas des adeptes des pesticides. «Il n'y a aucune raison d'utiliser systématiquement des traitements herbicides», résume M. Côté. Il ne faut y avoir recours qu'en cas d'infestation et quand tout le reste a été essayé. Certains arroseurs de pelouse peu scrupuleux ou ambitieux ont commis maints abus et contribué à tuer le remède en même temps que leur gagne-pain.

Mais il est aussi insensé de bannir les pesticides que de les surutiliser ou de mal les utiliser. Au Canada, les pesticides sont encore plus réglementés que les médicaments, estime Normand Drapeau, agronome détenteur d'une maîtrise en toxicologie et auteur du mémoire présenté pour l'industrie des pesticides devant la Commission Cousineau.

De gré ou de force, les citadins devront se résigner à arracher manuellement les pissenlits et à voir des herbes courtes se mêler aux brins de gazon, se réjouit toutefois M. Savoie.

Selon lui, le principe de précaution extrême adopté par Québec et les villes n'est pas réaliste, surtout dans les cas d'infestations par le ver blanc ou la punaise. «Dans plusieurs cas, on a quelques jours pour agir. Quand les gens obtiendront leur permis de traiter... trois semaines plus tard, le mal sera fait.» Philosophe, M. Savoie se dit que le temps travaille pour lui: «On va laisser la réalité s'exprimer.»