«Avec la naissance d'un enfant, notre quête du meilleur milieu de vie possible s'est ravivée», confie la comédienne Sabine Karsenti, maman d'un petit garçon de 3 ans et propriétaire de la première résidence unifamiliale montréalaise à briguer la certification Leed platine. Un projet qui s'est avéré complexe, mais riche en expériences.

Sabine Karsenti et son compagnon, Carl François Durocher-Milani, ont d'abord voulu une habitation très saine, écologique et design. Une chose menant vers une autre, ils ont recherché le label Leed, puis décidé de partager sur le web leur expérience et leur carnet d'adresses. Enfin, désireux de faire avancer les pratiques de construction, ils ont mis sur pied la fondation Ecologia, qui se veut «un accélérateur en développement durable». La maison de Mme Karsenti en est le premier modèle.

Cour intérieure

Le bâtiment d'origine avait un périmètre de 23 pieds par 23, qui s'est agrandi, avec les rénovations, à 23 pieds par 70. L'étroite façade, face au mont Royal, borde un volume de 2600 pi2 (1300 pi2 par niveau), disposés en longueur.

Dès l'entrée, la cour intérieure charme et étonne, insérée dans ce déploiement longiligne, du côté attaché de la maison. C'est une voie royale pour la lumière, qui coule généreusement sur les grands espaces droits du rez-de-chaussée et de l'étage.

Dans toutes les pièces, les hauts plafonds sont couverts de poutres massives (sapin Douglas), rayures solides et chaleureuses qui contrastent avec la blancheur des murs.

Le nombre d'or

Le couple a demandé à Gervais Fortin, designer d'intérieur (Gestion Gervais Fortin), de dessiner leur logis suivant l'arithmétique du nombre d'or, ce canon de beauté, bien connu des peintres et des photographes, qui remonte à l'antiquité grecque. Pour ce faire, le designer a divisé la longueur de la propriété en multiples de 7: 21 pieds pour le salon, 21 pieds pour la cour intérieure, 21 pieds pour la cuisine-salle à manger et, une petite marche plus bas, un palier de 7 pieds menant à une terrasse de 14 pieds. On a totalement utilisé la limite de hauteur permise par la municipalité - 23 pieds - ce qui a donné un plafond à 10 pieds, au rez-de-chaussée, et à 9 pieds, à l'étage.

Enchanté par le résultat, M. Fortin n'en demeure pas moins ébahi par les nombreux éléments «marginaux» de cette maison, du jamais vu dans sa pratique habituelle. Par exemple: les murs et les plafonds couverts de peinture au graphite (pour bloquer la pollution électromagnétique); du sapin Douglas (BC Fir), au lieu du contreplaqué, sur les planchers (pour éviter les composés organiques volatils). Sans oublier le béton à 37% de matières recyclées (Holcim.ca), coffré dans du polystyrène lui aussi de matières recyclées (Nudura). Et les murs de chanvre... «Les occupants savaient ce qu'ils voulaient et ils y tenaient!» résume M. Fortin.

Murs de chanvre

Pour la finition, ce fut étrange de voir les murs recouverts entièrement de lattes à l'horizontale, comme on le faisait autrefois pour poser le plâtre. Cette fois, les lattes ont servi de support à l'enduit de chanvre, posé à la truelle (Art du chanvre). Deux semaines plus tard, temps nécessaire au séchage, le chanvre a été recouvert d'un fini «chaux et sable». Les murs cloisons, de leur côté, sont constitués de chanvre coffré, lequel a mis deux mois à sécher. «Le chanvre, rappelle Anthony Néron, artisan du chanvre et de la chaux, régule la température et l'humidité. Il a des propriétés insonorisantes, ignifuges et antifongiques.»

«La maison ne contient aucun panneau de placoplâtre ni peinture, affirme Mme Karsenti. Ces matériaux ne sont pas toxiques, mais nous leur avons préféré des éléments qui viennent de la nature.»

Un essai: le béton armé

Le béton des fondations est armé de... fibre de verre, au lieu des habituelles tiges d'acier, facilement conductrices d'indésirables ondes électromagnétiques. «Voilà une chose que nous ne referions pas», confient-ils. Il a fallu deux firmes d'ingénieurs pour réaliser les calculs de charge. Pire: l'armature de la fibre de verre a compliqué la pose de la tubulure chauffante des planchers. «Ça a coûté cinq fois plus cher, rapporte M. Durocher-Milani, alors que la tige de métal, dans les fondations, n'est peut-être pas si nuisible.»

Trois panneaux solaires thermiques (Distribution DVC) reliés à deux puits géothermiques (Géothermie Boréale) chauffent l'eau domestique. «Le chauffe-eau électrique ne s'est pas mis en marche de l'été, malgré les douches, bains et lavages de la famille», relate Mme Karsenti.

Habitat et bien-être

«Nous pensons qu'il y a un lien très fort entre l'habitat et le bien-être, soutient M. Durocher-Milani. Des proportions qui réconfortent l'oeil, des matériaux qui favorisent un air sain, de l'eau de qualité, l'abondance de lumière ainsi que la prise en compte des ondes électromagnétiques et des réseaux telluriques, tout cela nous paraît important. Ecologia veut démontrer les bienfaits d'une telle approche, recherches à l'appui, afin de proposer de meilleurs produits aux constructeurs et développeurs immobiliers.»

Développeur immobilier dans le passé, M. Durocher-Milani souhaite maintenant se consacrer à Ecologia et faire sa marque sous le nom de «F», comme concepteur de maisons saines et écologiques. «Nous devons préparer quelque chose de bien pour nos enfants. Des habitations saines, écologiques et abordables.»

Plus cher, l'approche Ecologia?

«Notre approche consiste en un design minimaliste et des matériaux durables, explique Sabine Karsenti. Nous préférons investir un peu plus maintenant et économiser à long terme. La toiture, par exemple, notre fils n'aura jamais à la changer.»

Et comment va la santé, après quelques mois à vivre dans cette maison? Très bien pour toute la famille, répond la dame de la maison. Mais ça a toujours été le cas! «Notre motivation est venue d'une prise de conscience et non d'un problème de santé», conclut-elle.

www.ecologiamontreal.com