La tendance à réduire son espace habitable est-elle une mode passagère? Les Québécois échapperont-ils au downsizing? Voici les observations de plusieurs experts.

Des logements comme des minivoitures

«La réduction de la surface habitable est inévitable en construction, en raison notamment de l'augmentation des coûts de la construction, de l'énergie et de la rareté des terrains. Sans compter la tendance au développement durable qui encourage la réduction des surfaces habitables. À l'instar des petites voitures performantes, pourquoi de petites habitations bien pensées n'auraient-elles pas autant de succès? Dans la foulée, l'apparition des ménages à personne seule a contribué au phénomène du downsizing, car ces derniers exigent moins d'espace et utilisent parfois leur appartement comme un simple pied-à-terre. Par exemple, dans les arrondissements du Plateau-Mont-Royal et de Rosemont-La Petite-Patrie, à Montréal, plus de la moitié des ménages sont à personne seule. En parallèle, il y a de jeunes propriétaires urbains qui agrandissent leur habitation en transformant leur duplex en cottage. Preuve que les solutions en matière d'habitation sont plus diversifiées que jamais.»

- François Renaud, conseiller stratégique à la Société d'habitation du Québec (SHQ).

Plus de condos, moins d'unifamiliales

«On observe un brassage du côté de l'immobilier et parmi les courants dominants, il y a la prépondérance de la copropriété dans la région métropolitaine. De fait, il se construit deux fois plus de condos que de maisons individuelles. Un record sera d'ailleurs atteint en 2011: selon nos données, plus de 11 000 unités mises en chantier dans le Grand Montréal seront des copropriétés.»

- Bertrand Recher, analyste principal de marché pour la région de Montréal à la Société canadienne d'hypothèques et de logement (SCHL).

La fin du rêve américain?

«Une petite habitation n'est plus associée à une condition modeste. Cette idée du rêve américain (grosse maison, grosse voiture) est en train de changer, en raison de l'instabilité économique et des profonds changements démographiques, comme l'augmentation des couples sans enfant et des personnes vivant seules.»

- Avi Friedman, professeur d'architecture et directeur du programme de la maison à coût abordable, à l'Université McGill.

À l'aise dans... 350 pi2!

«Lorsque le site répond à certains critères, il est possible d'offrir de très petites superficies. Nous avons d'ailleurs proposé des appartements de 350 pi2 au sein de la phase 3 du projet M9 et ils ont obtenu du succès auprès d'acheteurs dont l'âge variait entre 25 ans et 40 ans. La réduction de l'espace habitable est inéluctable à Montréal, car la métropole vient d'entrer dans le cercle des villes fortement inabordables. Le tout est accéléré par la lourde congestion automobile. Par conséquent, l'heure de gloire de l'édifice en copropriété (en hauteur) vient de sonner, car le condo devient la façon la plus avantageuse d'accéder à une propriété située dans les secteurs les plus convoités de l'île de Montréal. La copropriété se déploie également en banlieue, mais dans des bâtiments comportant moins d'étages, car les terrains y sont moins coûteux.»

- Louis Conrad Migneault, vice-président opérations chez DevMcGill.

Moins grand, mieux organisé

«Il y a 15 ans, un condo de deux chambres faisait 1100 pi2, alors qu'aujourd'hui, il en fait 850. Preuve que l'accession à la propriété passe, maintenant, par la réduction de l'espace. Au sein de notre projet Le Séville, nous avons même conçu des unités de 400 pi2, qui ont plu notamment à des acheteurs originaires d'Asie, familiers avec les espaces réduits. Autrement, nos clients acceptent de diminuer la superficie de leur unité (et du coup, son prix) lorsque son intérieur est très bien organisé et largement fenêtré.»

- Jacques Vincent, coprésident de Prével.

Donner une sensation d'espace

«Il faut mieux penser nos condos et donner une sensation de grandeur si on veut vendre nos petites unités. On n'a pas le choix! D'où l'importance, entre autres, de décloisonner les espaces de vie. Même s'il n'est pas encore généralisé - il y a encore des gens qui recherchent de grandes maisons -, le mouvement du downsizing est en marche au Québec.»

- Jean-François Voyer, directeur du développement des affaires chez Construction Voyer.

De la vaste résidence au condo de luxe

«Outre les maisons de prestige, nous sommes très actifs sur le marché du condo de luxe, dont les superficies oscillent entre 1800 pi2 et 4000 pi2, et où l'on observe une forme de downsizing. En effet, ce type de copopriété attire les propriétaires (baby-boomers) de vastes résidences qui ont envie de diminuer leur espace habitable et le fardeau de l'entretien.»

- David Carson, vice-président exécutif chez Sotheby's International Realty Québec et Canada.