On dira qu'ils sont un peu fous, mais que voulez-vous, quand on aime... Les amateurs de café, les vrais, les passionnés, font  une grande place au café dans leur chez-soi. Jusqu'à faire pousser la plante à la maison ou à dessiner leur propre moulin...

La passion du café occupe une place grandissante dans la vie de ce professionnel de l'audio. Il fait même pousser des caféiers rapportés du Costa Rica... dans sa salle à dîner! Lorsqu'il participe à des salons, il trimballe sa machine à espresso et entretient les gens autant de conception sonore que de café.

Hugo Larin a toujours aimé les choses bien faites. Il est à la fois épicurien et technicien. La recette parfaite pour en faire ce que plusieurs appellent un coffee geek!

«J'aime le café parce que ça vient de la terre, que c'est vrai, concret et fait avec beaucoup d'amour. Toutes les étapes de production du café sont importantes et demandent beaucoup de soins et de précision. Je viens d'un background technique. J'ai besoin de mesurer, de peser, de calculer. Mais j'aime que le café fasse aussi appel à tous mes sens. Ça m'amène à voyager, à visiter des producteurs, à échanger avec toutes sortes de gens.»

L'appel du café s'est fait entendre il y a environ cinq ans. Hugo a alors remplacé sa petite cafetière italienne par une semi-automatique Saeco - celle qui l'accompagne aujourd'hui dans les salons. Puis il a eu un coup de coeur pour une Pavoni Pub Series vintage. Deux ans plus tard, il a décidé d'investir dans une machine plus puissante (une Elektra Sixties Series), pour connaître une deuxième expérience de barista maison. Il s'amuse aussi avec des bidules manuels comme le Clever, l'Aeropress, la cafetière à piston, etc.

Sur le plan de l'équipement, Hugo Larin avait donc tout ce qu'il fallait pour faire un bon café. C'est à ce moment que la quête du grain parfaitement torréfié a commencé. «Contrairement à bien des passionnés, je ne suis pas un inconditionnel des cafés de troisième vague [NDLR: ces cafés de petits producteurs à torréfaction plutôt légère], que je trouve parfois un peu trop éclatants en bouche, trop acides. J'ai une préférence pour le côté réconfortant d'un café un peu plus foncé, avec des notes de caramel.»

Hugo se fait une fierté d'acheter localement, mais il est toujours à la recherche du torréfacteur québécois qui offrira rigueur et constance dans chaque livre de café.

Il a donc décidé de prendre les choses en main et de torréfier son propre café, en achetant des grains verts dans les coops de café, dans certaines brûleries et sur l'internet. Pour une centaine de dollars, il s'est acheté un petit torréfacteur à air chaud, le FreshRoast Plus 8.

Aujourd'hui, il fait sa torréfaction artisanale dans un Quest M3 à tambour, qu'il raccorde à son ordinateur pour enregistrer le profil de chacune de ses «fournées». Il garde dans son garde-manger plusieurs variétés et origines de café vert et songe à importer de petits lots pour partager sa passion.

La prochaine étape dans l'évolution de sa «caféinomanie» sera de suivre, à l'été, un cours pour devenir «Q-grader».

Ce titre du Coffee Quality Institute, organisation américaine, certifie les qualités d'évaluateur et de dégustateur de la personne qui le possède.

Yvan Marcoux

Il y a 10 ans, Yvan Marcoux ne buvait pas de café. Puis il a découvert le Caffè Art Java, sur l'avenue du Mont-Royal, qui fut vraisemblablement le premier café de troisième vague à Montréal. C'est là que les Anthony Benda (Café Myriade) et Luke Spicer (Café Névé), demi-dieux du «mondo espresso» de Montréal, ont fait couler leurs premiers espressos.

La curiosité de ce professionnel des télécommunications a été piquée par un ancien collègue. «Lorsque je l'ai entendu dire qu'il achetait un moulin à 800$, je l'ai traité de malade! Puis j'ai fait un peu de recherche et je suis tombé sur une communauté de baristas, d'acheteurs de café, de torréfacteurs passionnés.» Et c'est ainsi qu'Yvan Marcoux est devenu un buveur inconditionnel d'espresso.

«Au bureau, notre petit groupe s'est rapidement étendu. Nous faisions des achats de café vert en commun, car désormais tous torréfient leur propre café, à la maison. Nos heures de lunch étaient des moments fébriles d'échanges sur le sujet. Ce fut une période d'apprentissage vraiment extraordinaire!», se rappelle-t-il.

Il faut savoir qu'Yvan Marcoux est un curieux, un jusqu'au-boutiste. Avant de faire du café, il a fait son pain, son fromage, son beurre. «Mon trip, c'est de faire les choses de A à Z.» De plus, il a une fascination pour tout ce qui est manuel. Au début, il boudait les cafetières électriques. Il a d'abord étudié l'AeroPress, puis le «Bodum», l'Eva Solo, le siphon. Il possède même un bidule un peu étrange appelé le Mypressi Twist. «Une des machines avec lesquelles je me suis le plus amusé est la petite Presso. Mais il faut être prêt à investir au moins 15 minutes de son temps pour faire un bon café.»

Puis un jour, il s'est résolu à sortir du placard une petite Saeco électrique reçue en cadeau de mariage. Comme celle-ci produisait un café médiocre et qu'il voulait faire plaisir à sa femme moins manuelle, il a acheté une Saeco semi-automatique. Pour SE faire plaisir, il a ensuite investit dans une Bezzera à levier, la Strega.

Son plus récent achat est un outil de «course». Il s'est offert la superbe Speedster, du fabricant néerlandais Kees van der Westen. Il a dû attendre six mois entre la commande et la livraison, payer 1300$ de transport, six heures combinées de travail d'électricien et de plomberie, mais la magnifique chromée trône enfin sur son comptoir de cuisine.

«L'espresso, c'est mon jet fuel: puissant, complexe et délicieux. C'est aussi un éternel défi, une quête de la perfection, car même après la meilleure extraction, tout est à reprendre à la suivante. C'est d'ailleurs là qu'une Speedster se justifie, car par sa conception exceptionnelle, elle maintient coup sur coup un degré de stabilité thermique phénoménal, sans compter un contrôle de la pression et du débit d'une précision inégalée. Bref, ça rend tout plus facile, rapide et constant et ça, c'est le nerf de la guerre quand on recherche l'ultime espresso.»

La prochaine étape: un moulin compact à la hauteur de sa cafetière. Ne trouvant rien à son goût, il a décidé d'en dessiner un lui-même. La mouture sera ajustable au micromètre, pour pouvoir faire un café filtre le matin et un espresso deux heures plus tard. Il ne reste qu'un ou deux ajustements pour que son invention soit fonctionnelle.

Yvan Marcoux n'hésite pas à ratisser toute la ville pour trouver les cafés d'exception. Il n'achète jamais deux fois le même café et préfère les cafés d'origine simple torréfiés légers aux mélanges espresso. Pour lui, l'acidité est acceptable, mais pas l'amertume.

Owen Egan

«Je n'appellerais pas ça une collection. C'est plutôt une espèce de "débarras" à cafetières!», a prévenu Owen Egan, lorsqu'on lui a demandé si on pouvait faire des photos dans son appartement de Notre-Dame-de-Grâce. En effet, M. Egan «entrepose» une douzaine de machines à espresso chez lui. Une autre douzaine dort dans le sous-sol, dans l'attente de ses bons soins.

Le photographe a eu la piqûre du café lorsque, pour arrêter de dépenser des centaines de dollars chez Second Cup, il a acheté sa première machine à espresso sur eBay, il y a plus de 10 ans. C'était une Astoria commerciale qui, sur réception, produisait du mauvais café. Largué par un réparateur, il a décidé d'étudier la situation lui-même. L'internet et sa communauté naissante de coffee nerds furent d'un grand secours.

Enhardi par un premier succès, Owen a commencé à acheter des machines sur l'internet à prix dérisoires pour les rafistoler. «Je n'ai jamais été très manuel, mais bidouiller avec les machines à espresso, ça satisfait mon besoin de démonter et de remonter des objets, tout en produisant, au bout de l'exercice, une délicieuse boisson chaude!»

Ce passe-temps a également des arômes d'altruisme, car Owen a donné une bonne douzaine de «rescapées» à des amis qui n'avaient pas les moyens de s'acheter ET une cafetière ET un moulin à café. Car contrairement à ce qu'on pense, ce n'est pas la machine à espresso, mais le moulin qui est l'instrument le plus important dans la production d'un excellent nectar. Le café doit obligatoirement être frais moulu. Mieux vaut acheter une cafetière moins chère et investir au minimum 150$ dans un moulin.

Un des achats dont M. Egan est le plus fier est sans doute sa Marzocco Linea commerciale à trois têtes, achetée pour 940$ alors qu'elle vaut entre 12 000 et 15 000$. «À ses débuts, Starbucks avait équipé ses cafés de cette machine. Lorsque la multinationale est passée à des machines semi-automatiques, elle a écoulé toutes ses Marzocco sur l'internet. Il a fallu que j'aille chercher la mienne sur une ancienne base militaire de l'État de New York.» Il ne se sert pas de ce mastodonte à la maison, mais le prête à des professionnels, à l'occasion d'événements spéciaux.

Avec le temps, Owen Egan a considérablement approfondi ses connaissances du café, bien qu'il se considère encore comme un bien médiocre dégustateur. Sa plus récente fantaisie porte un titre: «Le projet Myriade». Le Café Myriade est considéré par plusieurs comme le meilleur en ville. M. Egan a donc décidé qu'il ferait une boisson aussi riche et complexe que celle servi par l'équipe de baristas d'Anthony Benda.

«J'étais près d'atteindre mon objectif. J'utilisais la même dose de café, la même pression, la même température d'eau, etc., mais il y avait encore un léger après-goût. J'en ai conclu que c'était l'eau. Pour mener mon projet à terme, je suis donc allé remplir un bidon d'eau au café et, tadadam! ça y était!»

Mais ne croyez pas que la quête s'arrête là! Bien qu'accaparé par son métier de photographe, Owen Egan rêve au jour où il pourra passer ses semaines à bricoler, bidouiller et réparer ses belles machines.