Le président palestinien Mahmoud Abbas a quitté lundi l'hôpital de Ramallah en Cisjordanie occupée après huit jours d'une hospitalisation qui a ranimé les spéculations sur son avenir et sa succession.

Agé de 83 ans, M. Abbas est sorti vers midi à pied de l'hôpital où il était soigné pour une pneumonie selon la présidence.

En apparente bonne santé pour quelqu'un sortant d'hospitalisation, il s'est auparavant adressé aux journalistes pour dire son intention de retourner travailler à son bureau dès mardi.

«Grâce à Dieu, je quitte l'hôpital aujourd'hui en bonne santé, et je retourne au travail demain», a-t-il dit, flanqué de ses deux fils, de ses collaborateurs et du directeur de l'hôpital.

«Je remercie les responsables politiques, les rois, les présidents, mes frères -arabes et non-arabes- qui ont bien voulu prendre de mes nouvelles», a-t-il ajouté, soulignant ses propos de gestes appuyés.

Connu pour être un grand fumeur, M. Abbas avait été admis à l'hôpital le 20 mai avec une forte fièvre. Quelques jours plus tôt, il avait subi une opération mineure à une oreille.

Ses symptômes avaient d'abord été présentés comme des complications liées à l'opération, avant que le directeur de l'hôpital n'indique que le président palestinien souffrait d'une «infection au poumon droit».

La sortie de l'hôpital de M. Abbas avait été repoussée de jour en jour, alimentant les conjectures sur la gravité de son état. Des photos de M. Abbas se promenant dans les couloirs de l'hôpital et lisant un journal avaient été publiées avec l'évidente intention de faire cesser les rumeurs.

La santé de M. Abbas est un motif d'alerte régulier. Interlocuteur principal de la communauté internationale dès lors qu'il s'agit des Palestiniens, M. Abbas n'a officiellement désigné aucun successeur.

Aucun nom ne se détache pour prendre sa relève et la mise à l'écart de M. Abbas ouvrirait une période incertaine et potentiellement dangereuse.

M. Abbas a été élu en 2005 pour quatre ans à la présidence de l'Autorité palestinienne, sorte de préfiguration d'un État palestinien, à la suite de Yasser Arafat. Son mandat n'a jamais été remis en jeu depuis, faute d'élections, en raison des dévastatrices divisions palestiniennes.

L'Autorité palestinienne a été chassée de la bande de Gaza par le mouvement islamiste Hamas en 2007 et tous les efforts entrepris par M. Abbas pour reprendre pied dans l'enclave censée faire partie un jour d'un futur État palestinien ont échoué.

«Plus un jeune homme» 

L'Autorité palestinienne n'exerce plus qu'un gouvernement limité à partir de Ramallah sur des fragments de Cisjordanie occupée par l'armée israélienne.

Elle est par ailleurs largement discréditée auprès des Palestiniens qui souhaitent majoritairement le départ de M. Abbas. Ce dernier, qui avait signé en 1993 l'historique premier accord d'Oslo jetant les bases d'un règlement israélo-palestinien, demeure pour la communauté internationale l'avocat reconnu d'une solution négociée et non-violente.

Mais cette solution dite «à deux États», passant par la création d'un État palestinien qui coexisterait avec Israël, paraît plus lointaine que jamais. L'effort de paix avec Israël est paralysé depuis 2014.

Et depuis 2017, l'Autorité essuie les coups infligés par l'administration Trump, culminant dans la reconnaissance par les États-Unis de Jérusalem comme capitale d'Israël. Les relations entre la direction palestinienne et les officiels américains sont gelées depuis.

M. Abbas a fait référence à la décision du président Donald Trump sur Jérusalem en quittant l'hôpital.

«Si la question de Jérusalem nous a conduits à l'hôpital, nous voulions en ressortir pour faire de Jérusalem la capitale de la Palestine», a-t-il déclaré.

M. Abbas doit présider mardi à une réunion du Fatah, son parti. Il devrait en profiter pour passer à autre chose en remettant l'opposition aux politiques israéliennes et américaines au coeur du débat, dit l'analyste politique Nour Odeh.

Cependant, «nul doute que les évènements récents (concernant la santé de M. Abbas) auront un impact. Le président n'est plus un jeune homme», dit-elle.

Diana Buttu, une ancienne collaboratrice devenue une critique vigoureuse de M. Abbas, estime que celui-ci devrait tenter de faire taire les bruits quant à sa succession.

«Il va faire comme si rien ne s'était passé, comme si un homme de 83 ans n'avait pas souffert d'une grave pneumonie», a-t-elle dit.

«Les autres savent que s'ils parlent de succession, ils seront débarqués», a-t-elle ajouté.