Les États-Unis ont accentué jeudi la pression sur le régime iranien, confronté à plusieurs jours de manifestations sur fond de revendications économiques, émaillées de violences et sévèrement réprimées par les forces de sécurité.

Après une semaine de protestations contre la vie chère, la corruption et le pouvoir, Téhéran et de nombreuses villes de province ont retrouvé le calme, au prix d'un quadrillage renforcé des forces de sécurité.

Les manifestations ont été marquées par des heurts meurtriers et des destructions de biens publics. Les violences ont fait 21 morts, dont une majorité de manifestants, et plusieurs centaines de personnes ont été arrêtées.

La contestation, qui rassemblait chaque soir depuis le 28 décembre jusqu'à plusieurs centaines de manifestants, est la première de cette ampleur depuis la «vague verte» de 2009. Des dizaines de milliers de personnes avaient accusé le pouvoir de fraudes massives lors de la réélection du président ultra-conservateur Mahmoud Ahmadinejad. Les manifestations avaient été violemment réprimées.

Réunion à l'ONU

L'administration américaine de Donald Trump, qui a apporté très tôt un soutien appuyé aux contestataires et condamné le régime iranien, sa bête noire, a effectué un nouveau pas jeudi en imposant de nouvelles sanctions contre des groupes industriels soupçonnés de participer au programme de missiles balistiques de Téhéran.

Le secrétaire au Trésor Steven Mnuchin a accusé l'Iran de «privilégier» son programme de missiles «au détriment du bien-être économique de son peuple».

Pour le département d'État, les responsables iraniens devront «rendre des comptes» pour la répression. Il a assuré que les États-Unis «n'oublieront pas les victimes» des protestations.

«Nous nous rappelons ce qui est arrivé aux Verts quand ils ont manifesté et comment le régime les a traités sans pitié», a relevé le ministre américain de la Défense Jim Mattis, assurant que «nous n'avons pas de problème avec le peuple iranien (mais) nous avons un gros problème avec le régime autoritaire iranien».

Le Conseil de sécurité des Nations unies a annoncé la tenue vendredi d'une réunion d'urgence, demandée par Washington, sur la situation en Iran.

Auparavant, les autorités iraniennes avaient porté plainte auprès de l'ONU contre les «ingérences» des États-Unis, les accusant d'avoir attisé les troubles.

«L'administration américaine a augmenté ses interventions d'une manière grotesque dans les affaires de l'Iran sous prétexte de fournir un soutien à des manifestations sporadiques», a affirmé le représentant iranien à l'ONU, Gholamali Khoshroo.

Face à la contestation, des dizaines de milliers d'Iraniens sont descendus jeudi pour le deuxième jour consécutif dans les rues de plusieurs villes du pays pour exprimer leur soutien au régime.

«Nous sommes tous ensemble, derrière le guide», l'ayatollah Ali Khamenei, le numéro un de la République islamique d'Iran, ont scandé les manifestants, selon des images de la télévision d'État.

Utilisant la phraséologie du régime, le commandant en chef de l'armée Abdolrahim Moussavi a remercié les forces de sécurité pour «avoir éteint le feu de la sédition». La veille, les Gardiens de la révolution -armée d'élite - avaient annoncé de la fin du mouvement de contestation.

Les autorités ont accusé les «groupes contre-révolutionnaires» et les Moudjahidine du peuple -opposition en exil - d'avoir profité des manifestations «légitimes» pour fomenter des troubles. Elles ont aussi mis en cause les États-Unis et l'Arabie saoudite, grande rivale régionale de l'Iran.

«Régler les problèmes»

La classe politique en Iran - réformateurs comme conservateurs - s'est positionnée contre les violences et les ingérences américaines, tout en soulignant la nécessité de résoudre les problèmes économiques, principalement le chômage qui atteint 30% chez les jeunes.

«La principale demande des gens aux responsables et au gouvernement est qu'ils règlent les problèmes économiques», a dit Ali Akbar Velayati, conseiller du guide suprême pour les affaires internationales, appelant à éviter «les divisions».

Le président iranien Hassan Rohani, un religieux modéré, a affirmé que son gouvernement était déterminé à «régler les problèmes de la population».

Réélu en mai 2016 pour un second mandat, il avait promis dès son élection en 2013 d'oeuvrer à l'amélioration de la situation économique et sociale, un espoir amplifié par l'accord sur le nucléaire iranien signé en 2015, et la levée de certaines sanctions internationales.

Mais les attentes des Iraniens ont été déçues avec le renchérissement du coût de la vie et le chômage.

Le Parlement a rejeté des augmentations voulues par le gouvernement, notamment une hausse de 50% du prix de l'essence, une mesure qui selon des experts aurait renforcé une inflation atteignant déjà 10%.