Quatre personnes ont été tuées vendredi lors d'affrontements entre les forces de l'ordre et une foule en colère exigeant la démission du gouvernement afghan après le sanglant attentat qui a frappé Kaboul mercredi.

La tension est vive dans la capitale, où la police a tiré à balles réelles pour disperser des centaines de manifestants qui tentaient de marcher sur le palais présidentiel après cet attentat ayant fait au moins 90 morts.

L'hôpital de l'ONG italienne Emergency, spécialisé dans la médecine de guerre, a indiqué que les corps de quatre personnes tuées dans les heurts lui ont été transférés. Emergency traitait également 15 blessés, dont certains se trouvaient dans un état critique.

La colère monte depuis l'attaque au camion piégé, qui a également fait des centaines de blessés, dans le quartier diplomatique de la capitale afghane, censé être ultra-protégé. Il s'agit du pire attentat qu'ait connu Kaboul depuis 2001.

Beaucoup d'Afghans se demandent comment les services de renseignement n'ont pu empêcher le camion piégé d'entrer dans un quartier bardé de barrages et généreusement pourvu en gardes de sécurité.

Les manifestants, dont certains armés de pierres, s'étaient rassemblés près du site de l'explosion, scandant des slogans antigouvernementaux, et « Mort aux talibans ».

La police a riposté en tirant à balles réelles, et utilisé des gaz lacrymogènes et des canons à eau quand plusieurs manifestants ont tenté de franchir un cordon de sécurité.

« Carnage »

« Nos frères et soeurs ont péri dans l'attaque sanglante de mercredi et nos dirigeants ne font rien pour mettre fin à ce carnage », a accusé Rahila Jafari, une militante de la société civile, au cours du rassemblement. « Nous voulons la justice, nous voulons que les auteurs de l'attaque soient pendus », a-t-elle ajouté.

Un autre manifestant, furieux, a assuré que les rassemblements allaient se poursuivre jusqu'à la démission du président afghan Ashraf Ghani et du chef de l'exécutif du pays, Abdullah Abdullah. « Jour après jour, des civils innocents sont tués par des terroristes. Si nos dirigeants ne peuvent pas ramener la sécurité, ils devraient démissionner », a-t-il dit.

Amnestie Internationale a jugé que le gouvernement afghan avait réagi de manière « excessive et meurtrière » à la manifestation. Les Nations unies ont, elles, fait part de leur « profonde inquiétude » et appelé à la retenue.

Le renseignement afghan a accusé le réseau Haqqani, un groupe armé allié des talibans à l'origine de nombreuses attaques contre les forces étrangères et locales en Afghanistan, d'avoir commis l'attentat, qui n'a pas été revendiqué à ce jour.

Les talibans, actuellement engagés dans leur traditionnelle « offensive de printemps », ont pour leur part nié toute implication.

Le président Ghani pourrait prochainement ordonner l'exécution de 11 prisonniers talibans et du réseau Haqqani en représailles à l'attentat, a appris l'AFP de source gouvernementale.

Les talibans de leur côté ont menacé de se livrer à de « dures et exemplaires attaques », y compris au meurtre d'otages étrangers détenus par eux, si le gouvernement exécute les 11 prisonniers, selon un communiqué sur leur site.

L'Université américaine de Kaboul, dont deux professeurs américain et australien ont été enlevés en août dernier ont appelé vendredi à leur « libération immédiate et inconditionnelle ».

Les talibans détiennent également depuis 2012 le Canadien Joshua Boyle et son épouse américaine Caitlan Coleman, ainsi que leurs deux fils nés en captivité.

Des manifestants ont pour leur part exigé vendredi l'exécution de Anas Haqqani, fils du fondateur du réseau, détenu par les autorités depuis 2014. Mais selon une source gouvernementale, il ne fait pas partie des 11 prisonniers susceptibles d'être exécutés.