Les révélations sur les informations sensibles que Donald Trump aurait communiquées à des responsables russes jettent une nouvelle ombre sur la prochaine visite du président américain en Israël, d'où proviendraient les renseignements au coeur de l'affaire.

Les responsables israéliens ont adopté un profil très bas devant ces informations qui lient le nom de leur pays au scandale depuis mardi soir, moins d'une semaine avant la venue du président américain attendu lundi.

Mais tous les commentateurs s'interrogeaient sur les conséquences que l'affaire pourrait avoir pour la coopération sécuritaire entre les deux pays et sur les risques qu'elle faisait courir à Israël et à ses activités d'espionnage.

M. Trump et le premier ministre Benyamin Néthanyahou se sont parlé par téléphone mardi pendant une vingtaine de minutes, a indiqué un porte-parole du chef du gouvernement israélien. «Le seul sujet de discussion a consisté dans la visite à venir», a-t-il dit.

Selon le Washington Post et d'autres médias, M. Trump a dévoilé la semaine passée lors d'une rencontre avec le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov et l'ambassadeur russe à la Maison-Blanche, des informations hautement classifiées et provenant d'un partenaire des États-Unis sur un projet de l'organisation djihadiste État islamique (EI) de piéger des ordinateurs portables susceptibles d'exploser à bord d'un avion.

M. Trump aurait même nommé la ville en Syrie, en territoire sous contrôle de l'EI, où le partenaire des États-Unis aurait détecté la menace, disait le Washington Post. Le partenaire n'aurait pas autorisé à communiquer des informations tellement sensibles que l'accès en était sévèrement restreint jusqu'au sein du gouvernement américain, ajoutait le journal.

Un responsable de l'administration américaine a confirmé mardi soir à l'AFP des informations du New York Times selon lesquelles le partenaire en question était Israël, grand allié des États-Unis, réputé pour l'efficacité de ses services d'espionnage.

Les responsables israéliens se sont bien gardés de commenter directement.

Le ministre de la Défense Avigdor Lieberman tweetait que «les relations sécuritaires entre Israël et les États-Unis, notre plus grand allié, sont profondes, importantes et sans précédent par leur étendue». «Cela continuera à être le cas», a-t-il ajouté.

Le ministre israélien du Renseignement Israël Katz exprimait sa «totale confiance dans la communauté américaine du Renseignement».

«Naïveté ou méconnaissance»

Les commentateurs s'alarmaient au contraire du coup qui serait porté à la confiance mutuelle entre deux pays dont la coopération dans le renseignement passe pour s'être renforcée ces dernières années. Ils évoquaient le danger que des méthodes ou des sources soient compromises et que des informations passent de la Russie à l'Iran ou au Hezbollah chiite libanais, deux ennemis d'Israël.

La Russie, l'Iran et le Hezbollah soutiennent militairement le régime de Bachar al-Assad, avec lequel Israël reste en guerre. Israël s'inquiète que l'Iran et le Hezbollah n'ouvrent une nouvelle ligne de front anti-israélienne en Syrie.

Israël, également préoccupé par le jihadisme, a un intérêt évident à s'intéresser de près à son voisin syrien, où l'EI sévit. Les moyens employés sont secrets. Le groupe ultraradical avait revendiqué en 2015 l'exécution d'un Arabe israélien accusé d'espionner pour le Mossad, les services secrets israéliens.

«Si Trump, que ce soit par naïveté ou par méconnaissance, a fait fuiter des informations auprès des Russes, des sources que nous avons passé des années à établir, (nos) méthodes de travail courent à présent un risque important», disait le quotidien populaire Yedioth Ahronoth citant une source au sein du renseignement israélien. Celle-ci exprimait la nécessité d'une réévaluation du partage d'informations.

En janvier déjà, avant l'investiture de M. Trump, le Yedioth avait rapporté que des membres du renseignement américain avaient conseillé à leurs collègues israéliens de se montrer prudents dans la transmission d'informations à la future administration américaine.

«Il ne fait aucun doute que la confiance israélienne a été ébranlée», dit à l'AFP Dan Shapiro, ambassadeur américain en Israël sous Barack Obama, à présent expert auprès du think tank Institute for National Security Studies à Tel-Aviv. Il s'attend à ce que l'affaire refroidisse le zèle israélien, «mais la relation est trop importante des deux côtés pour que le partage (d'informations) cesse».

La visite de M. Trump en Israël a déjà été précédée ces derniers jours par une controverse touchant au statut diplomatique de Jérusalem.