Israël a déclenché de vives critiques des Palestiniens et de la communauté internationale en approuvant jeudi soir la création d'une colonie en plein coeur de la Cisjordanie occupée, la première établie par un gouvernement israélien depuis plus 25 ans.

Le cabinet israélien est aussi passé outre aux appels récents de l'administration Trump à la retenue dans la colonisation.

Il s'agit de la première annonce par un gouvernement israélien d'une nouvelle colonie depuis 1991, a déploré la Paix maintenant, ONG israélienne opposée à la colonisation.

Cette colonie, surnommée Geulat Tzion, doit permettre de reloger une quarantaine de familles de la colonie d'Amona, démolie en février sur décision de la justice israélienne.

Amona a été à l'origine pendant des mois d'un psychodrame politique et humain. Le premier ministre Benyamin Nétanyahou, soumis à la pression du lobby des colons, avait redit jeudi, avant la réunion ministérielle, qu'il tiendrait la promesse de construire une nouvelle colonie pour ces quelque 200 à 300 Israéliens, malgré l'absence de précédent depuis un quart de siècle.

La Maison-Blanche n'a pas directement critiqué l'annonce de la nouvelle colonie, mais a réaffirmé vendredi que si l'existence de colonies n'était pas un obstacle à la paix, leur expansion pouvait l'être.

« Le président Trump a, en public comme en privé, exprimé ses inquiétudes concernant les colonies », a indiqué un responsable de la Maison-Blanche sous couvert d'anonymat. « Si l'existence de colonies n'est pas en soi un obstacle à la paix, l'expansion non contrôlée de ces dernières n'aide pas à faire progresser la paix », a-t-il ajouté.

Depuis plusieurs semaines, le gouvernement israélien recherche avec la Maison-Blanche un accord qui lui permettrait de continuer à construire dans les colonies.

L'arrivée au pouvoir de Donald Trump, considéré comme plus favorable aux positions israéliennes que son prédécesseur Barack Obama, a déjà donné lieu de la part d'Israël à cinq annonces d'extension de colonies portant sur plus de 6000 logements en Cisjordanie et à Jérusalem-Est occupées.

La Maison-Blanche, qui a finalement appelé Israël à la retenue, cherche actuellement les moyens de relancer l'effort de paix moribond.

De son côté, le numéro deux de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), Saëb Erakat, a accusé Israël de continuer « à détruire les perspectives de paix » en poursuivant « le vol de terres et de ressources naturelles ». Hanane Achraoui, autre dirigeante de l'OLP, a dénoncé la persistance israélienne dans la politique « de colonialisme, d'apartheid et de nettoyage ethnique ».

« M. Nétanyahou est l'otage des colons et place sa survie politique au-dessus des intérêts de l'État d'Israël », a renchéri la Paix maintenant.

« Extrêmement préoccupant »

Le gouvernement de M. Nétanyahou, considéré comme le plus à droite de l'histoire d'Israël, fait la part belle aux défenseurs de la colonisation. Son ministre de l'Agriculture Uri Ariel a salué la décision du cabinet, tout comme Yesha, principale organisation représentant les colons de Cisjordanie.

Yesha a prévenu qu'il veillerait « très étroitement » à ce que le projet se concrétise.

Environ 400 000 colons israéliens mènent une coexistence souvent conflictuelle avec 2,6 millions de Palestiniens en Cisjordanie occupée. Ces derniers revendiquent ce territoire comme faisant partie de l'État auquel ils aspirent.

La colonisation est illégale au regard du droit international. « Alarmé », le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a répété que pour les Nations unies la colonisation constituait un « obstacle à la paix » entre Israéliens et Palestiniens.

Il a condamné « toutes les actions unilatérales » qui « minent la solution à deux États », c'est-à-dire la création d'un État palestinien coexistant avec Israël, référence de la communauté internationale pour résoudre l'un des plus vieux conflits de la planète.

Paris a également dénoncé un « développement extrêmement préoccupant » qui « risque d'aggraver les tensions sur le terrain ».

La nouvelle colonie sera construite dans le secteur de Shilo, une colonie existante située près de l'ancien site d'Amona.

La localisation est d'autant plus problématique qu'elle se situe en plein territoire palestinien, continuant avec d'autres implantations à fragmenter le territoire et à compromettre la viabilité d'un futur État palestinien, a noté la Paix maintenant.

Le gouvernement israélien a également approuvé la mise en vente de 2000 logements dans des colonies de Cisjordanie, sur les 5700 dont la construction avait été approuvée il y a deux mois.

Il a en outre évoqué l'appropriation prochaine par l'État de 97 hectares de terres, ce qui va permettre la reconnaissance a posteriori de trois colonies construites sans autorisation des autorités israéliennes, a rapporté la Paix maintenant.