L'explosion mardi d'une voiture piégée a tué au moins six membres des services de sécurité et de l'armée à la frontière syrienne, un no man's land désertique où sont bloqués des dizaines de milliers de réfugiés syriens fuyant la guerre.

Cette attaque qui n'a pas été revendiquée jusqu'ici, accentue les inquiétudes du royaume, proche allié de Washington, qui exprime régulièrement des craintes de voir des jihadistes s'infiltrer dans le royaume depuis la Syrie voisine où Amman participe depuis 2014 à la coalition internationale contre le groupe Etat islamique (EI) conduite par les États-Unis.

Selon un premier communiqué de l'armée, la voiture piégée a explosé mardi à 5h30 dans la région de Rokbane , faisant «des morts et des blessés».

L'armée a précisé plus tard que l'attaque a fait six morts, 4 gardes-frontières, un membre des services de sécurité et un agent de protection civile, confirmant un bilan «provisoire» donné à l'AFP par une source des services de sécurité.

L'armée a indiqué avoir détruit des véhicules «ennemis» à la frontière, sans autres précisions sur les circonstances de l'attaque.

Mais une source des services de sécurité a précisé à l'AFP que le véhicule piégé était en mouvement au moment de l'explosion et venait du côté syrien de la frontière, ce qui fait penser à un attentat suicide.

Le ministre jordanien des Affaires étrangères, Nasser Judeh a condamné une «attaque lâche».

Deuxième attentat en 2 semaines

«Les terroristes frappent à nouveau cette fois-ci contre nos gardes-frontières (...). Ce mal sera vaincu», a écrit M. Judeh sur son compte Twitter.

L'ambassade des États-Unis à Amman a condamné un «acte terroriste lâche», réaffirmant dans un communiqué le «soutien indéfectible» de Washington aux forces armées jordaniennes.

L'attentat a eu lieu deux semaines après une attaque contre un bureau des services de renseignements près d'Amman, qui a fait 5 morts parmi ses membres, alors que la Jordanie a été relativement épargnée par les violences qui secouent ses voisins irakien et syrien.

Il s'est produit dans un no man's land désertique dans le triangle où se rejoignent les frontières de la Jordanie avec la Syrie et l'Irak et où sont massés plus de 60 000 Syriens souhaitant se réfugier en Jordanie, selon un dernier décompte des gardes-frontières datant du mois de mai.

Interrogé par l'AFP, le représentant en Jordanie du Haut-Commissariat de l'ONU pour les réfugiés (HCR), Andrew Harper, a indiqué qu'il n'y avait «pas d'informations sur d'éventuelles victimes parmi les demandeurs d'asile syriens».

Amman avait évalué le nombre de Syriens bloqués à la frontière à 16 000 en janvier puis à 50 000 à la mi-avril.

Le HCR avait exhorté les autorités jordaniennes à «cesser de bloquer les gens dans les zones frontalières reculées pendant des mois» et à «les transférer rapidement vers des centres de transit».

Mais Amman avance des «considérations sécuritaires» pour expliquer la lenteur de l'accueil des Syriens, affirmant craindre que des jihadistes de l'EI ne s'infiltrent parmi les réfugiés.

Près de 2000 Syriens parmi les réfugiés sont soupçonnés de collaborer avec l'EI, avait prévenu en mai le chef des gardes-frontières, le général Saber Al-Mahayra, ajoutant que des armes et des munitions avaient été saisies auprès de réfugiés.

La Jordanie accueille plus de 600 000 réfugiés syriens selon les chiffres de l'ONU, 1,4 million selon les autorités.

Durant les deux premières années du conflit syrien déclenché en 2011, 45 points de passage étaient ouverts sur les 378 km de frontière séparant la Jordanie et la Syrie. Aujourd'hui il n'y en a plus que cinq, dont trois réservés au passage des blessés.

Le conflit syrien a fait plus de 280 000 morts, poussé à la fuite plus de la moitié de la population et provoqué un désastre humanitaire.