L'ex-premier ministre Ehud Olmert, connu pour son goût du luxe, découvre depuis lundi pour 19 mois l'austérité de la prison après des années de soupçons de corruption, devenant le premier ancien chef de gouvernement israélien à aller derrière les barreaux.

M. Olmert, 70 ans, à la tête du gouvernement israélien de 2006 à 2009, s'est présenté à la prison de Ramleh, près de Tel-Aviv, pour y purger une peine de 18 mois pour des pots-de-vin touchés quand il était maire de Jérusalem (1993-2003), et un mois pour entrave à la justice.

M. Olmert est arrivé en voiture par l'arrière de la prison pour ne pas livrer son image en pâture aux dizaines de journalistes et techniciens qui retransmettaient l'évènement en direct. Il a marché d'un pas lourd dans la cour accompagné des gardes qui lui étaient assignés en sa qualité d'ancien premier ministre. Mais il est entré seul dans la prison où il reviendra dorénavant à l'administration pénitentiaire d'assurer sa protection.

Cet emprisonnement parachève la déchéance de celui qui fut longtemps un des hommes forts de la politique israélienne et que la justice, après des années de suspicion, finit par rattraper en 2014, jusqu'à sa condamnation définitive en décembre 2015 à 18 mois pour des dessous-de-table perçus dans le cadre du pharaonique projet immobilier Holyland.

L'ancien avocat d'affaires, réputé comme un bon vivant, grand amateur de costumes chic, de cigares, de bonne chère et de voyages en avion, sera incarcéré dans une aile, réservée à certains détenus, de la prison Maasiyahu. Le seul traitement particulier auquel il aura droit tient à sa sécurité et au fait qu'il est dépositaire d'informations sensibles, a indiqué une source pénitentiaire.

«Je vous laisse imaginer...»

Pour l'instant, l'aile, récemment réaménagée, n'enferme que cinq prisonniers. Mais elle a une capacité de 18 détenus, et à terme M. Olmert devra partager l'une des six cellules, avec sa douche, ses toilettes, sa table et quelques chaises et son poste de télévision avec un nombre restreint de chaînes.

Il devra se rendre dans le hall pour téléphoner. Il s'habillera comme il le voudra à l'intérieur de la prison, mais portera la combinaison orange des prisonniers s'il est appelé à sortir de prison, a dit la même source.

M. Olmert rejoint à Ramleh l'ancien président Moshé Katzav, qui purge une peine de sept ans de prison pour viols.

M. Olmert a défendu une dernière fois sa dignité humiliée dans une vidéo publiée juste avant de prendre le chemin de la prison.

«Je démens toutes les accusations de corruption portées contre moi», dit-il en chemise bleue, l'air abattu, dans cette vidéo tournée dans un intérieur apparemment privé.

«Je vous laisse imaginer combien ce changement est douloureux et singulier pour moi, ma famille, mes proches, mes partisans», dit-il.

«Au cours de ma longue carrière, j'ai moi aussi commis des erreurs, même si, à mes yeux, aucune d'entre elles n'était passible des tribunaux. Je paie cher pour certaines d'entre elles, peut-être trop cher», ajoute-t-il en sous-entendant qu'il aurait été visé par des manoeuvres politiques.

Une autre épée de Damoclès

«C'est le coeur très gros que j'accepte ma condamnation aujourd'hui. Personne n'est au-dessus des lois», dit-il.

La descente aux enfers n'est pas terminée pour l'ancien premier ministre de centre droit qui, après une longue carrière politique, prit le pouvoir en mars 2006 à la place d'Ariel Sharon, victime d'une attaque cérébrale.

Une autre épée de Damoclès pend au-dessus de sa tête. M. Olmert a été condamné en mai 2015 à huit mois fermes pour avoir perçu et dissimulé des dizaines de milliers de dollars de l'homme d'affaires américain Morris Talansky alors qu'il était ministre du Commerce et de l'Industrie (à partir de 2003).

Cette affaire doit encore être examinée en appel à une date non précisée.

L'affaire Holyland avait contraint M. Olmert à renoncer à se présenter aux primaires du parti Kadima et à quitter la tête du gouvernement, ouvrant la voie à l'avènement de Benyamin Nétanyahou, qui dirige Israël depuis 2009.

M. Olmert porte pour de nombreux Israéliens la responsabilité des ratés de la guerre contre le Hezbollah au Liban en juillet-août 2006.

Il est par ailleurs le dernier premier ministre à s'être autant investi dans des négociations, intensives mais infructueuses, pour tenter de résoudre le conflit israélo-palestinien. Favorable à la création d'un État palestinien, il était prêt à un retrait israélien de la plus grande part de la Cisjordanie occupée.

PHOTO MENAHEM KAHANA, AFP

Ehud Olmert est arrivé en voiture par l'arrière de la prison pour ne pas livrer son image en pâture aux dizaines de journalistes et techniciens qui retransmettaient l'évènement en direct.