Des heurts ont opposé lundi pour le deuxième jour consécutif Palestiniens et policiers israéliens sur l'esplanade des Mosquées à Jérusalem, après le début du nouvel an hébraïque qui voit les juifs affluer vers ce troisième lieu saint de l'islam.

Sur l'esplanade même, également révérée par les juifs comme le mont du Temple, les violences ont éclaté lorsque les policiers, entrés sur le site, ont essuyé des jets de pierres de la part de jeunes musulmans masqués, selon la police.

Quelques dizaines de jeunes, selon des témoins, avaient passé la nuit à la mosquée Al-Aqsa avec l'intention apparente de protéger l'esplanade contre le risque que les juifs attendus ne violent l'interdiction de prier sur les lieux et ne commettent un sacrilège à leurs yeux.

Les violences se sont propagées aux ruelles de la Vieille ville de Jérusalem. Les policiers ont dispersé à coups de matraque et de grenades assourdissantes des dizaines de manifestants, dont beaucoup de femmes âgées se proclamant «mourabitate» («sentinelles» en arabe) scandant «Dieu est le plus grand» et insultant les policiers.

Les policiers ont une nouvelle fois frappé des journalistes, parmi lesquels deux photographes de l'AFP. Un policier a poursuivi l'un d'eux et l'a fait tomber en le frappant violemment de sa matraque dans le dos et les jambes. Neuf personnes ont été arrêtées.

Les États-Unis ont «condamné tous les actes de violence» sur l'esplanade, appelant Israéliens et Palestiniens à éviter toute «action de provocation» et à «préserver le statu quo» de 1967.

Avertissement jordanien  

Le patron de l'ONU Ban Ki-moon a exprimé son «inquiétude face à l'escalade dans les lieux saints et aux autres violences, y compris la mort d'un Israélien» qui a perdu le contrôle de son véhicule probablement après des jets de pierres dans un quartier palestinien de Jérusalem selon la police.

Il a réitéré l'importance de relancer les négociations pour parvenir à un accord global du conflit israélo-palestinien.

A Amman, le roi Abdallah II dont le pays est le gardien de l'ultra-sensible esplanade des Mosquées selon le statu quo, a averti Israël que «toute nouvelle provocation à Jérusalem affecterait les relations» bilatérales.

L'esplanade, qui abrite la mosquée Al-Aqsa et le Dôme du Rocher, est révérée par les juifs comme le mont du Temple, lieu où se dressait le second Temple détruit par les Romains, dont l'unique vestige, le mur des Lamentations, est en contrebas.

Située dans la partie orientale de Jérusalem occupée et annexée par Israël, elle est régie par des règles tacites qui autorisent les juifs à visiter les lieux à certaines heures, mais pas à y prier.

Des juifs radicaux militent pour le droit d'y prier et certains rêvent d'y construire le troisième Temple. Les inquiétudes musulmanes ont été ravivées par des rumeurs persistantes sur un plan de partage de l'esplanade.

Mais le premier ministre Benyamin Nétanyahou a répété n'avoir aucune intention de remettre en question le statu quo.

Mardi soir, il réunira ministres et responsables de la sécurité sur la multiplication des attaques avec des pierres contre les Israéliens, et les heurts à Al-Aqsa seraient probablement évoqués.

L'esplanade et ses alentours avaient déjà été le théâtre de violences dimanche. Mais malgré les heurts, 650 juifs et touristes, bien plus qu'à l'ordinaire, ont effectué la visite dimanche et 500 lundi, selon la police.

«Guerre sainte» 

L'approche des festivités du Nouvel an juif a ravivé les tensions et la crainte des musulmans que le gouvernement n'accède aux revendications de certains juifs sur l'esplanade.

Cette crainte a été renforcée par des visites comme celle effectuée dimanche sur l'esplanade, selon les médias, par le ministre de l'Agriculture Uri Ariel.

«Le mont du Temple nous appartient. (Il) doit être ouvert à la prière à toute heure et pour tous les juifs», avait-il dit lors d'une visite en 2013 selon le Jérusalem Post.

«Nous sommes inquiets pour Al-Aqsa (nom donné par les musulmans à toute l'esplanade) car Israël veut la vider, comme il veut vider tout Jérusalem de ses musulmans. Nous n'allons pas prier au mur des Lamentations. Pourquoi devraient-ils prier à Al-Aqsa?» lance Sanaa Rajabi, une «mourabitate» voilée et vêtue d'une longue robe noire traditionnelle.

Israël a interdit les «sentinelles» accusées d'être «l'un des principaux facteurs de tensions».

Mais, a dit la dirigeante palestinienne Hanan Ashrawi, c'est Israël qui crée délibérément l'instabilité pour pouvoir «annexer» l'esplanade. Elle en a appelé à la communauté internationale «avant qu'Israël ne réussisse à provoquer une guerre sainte globale».