L'espoir d'une trêve humanitaire s'est évaporé au Yémen avec la poursuite dimanche des raids aériens et des combats, au désespoir d'une population durement éprouvée par le conflit entre rebelles chiites et forces progouvernementales.

La pause annoncée par l'ONU était destinée à permettre l'acheminement d'une aide humanitaire cruciale à des millions d'habitants. Mais entrée en vigueur vendredi à 23H59 locales (20H59 GMT) et censée durer jusqu'à la fin du mois de jeûne musulman du ramadan, le 17 juillet, elle a été aussitôt violée dans plusieurs régions du pays.

Dimanche, l'aviation de la coalition menée par l'Arabie saoudite a lancé une nouvelle série de raids aériens contre des positions des rebelles chiites Houthis, venant confirmer l'échec de l'ONU à instaurer une pause dans ce conflit qui dure depuis fin mars.

La coalition a visé à l'aube des rassemblements de rebelles à Saada, leur fief dans le nord du pays, d'autres positions au sud de la capitale Sanaa, qu'ils ont prise en janvier, et dans la région de Wahat dans la province méridionale de Lahj (sud), ont indiqué des témoins.

Dans la journée, les avions ont bombardé une base militaire dans le sud de la capitale et des positions rebelles dans la province d'Amrane, plus au nord, selon des témoins.

Un correspondant de l'AFP a rapporté qu'en raison de la tension, beaucoup d'habitants avaient renoncé à faire des emplettes pour la fête proche de l'Aïd el-Fitr, marquant la fin du mois de jeûne musulman du ramadan.

Aidés par des unités de l'armée restées fidèles à l'ex-président Ali Abdallah Saleh, les rebelles chiites ont lancé en juillet 2014 une offensive qui leur a permis de prendre de vastes régions. Ils ont ensuite pris pied à Aden (sud), la deuxième ville du pays, poussant fin mars le président Abd Rabbo Mansour Hadi à trouver refuge en Arabie saoudite.

Affirmant vouloir empêcher les Houthis de s'emparer de la totalité du pays et, par extension, l'Iran d'élargir son influence, Ryad a pris la tête d'une coalition arabe qui bombarde les insurgés depuis le 26 mars.

Au sol, rebelles et forces progouvernementales ont continué de se battre dans plusieurs régions du pays.

«Les rebelles tentent de déloger les adversaires de plusieurs quartiers du nord» de Taëz (ouest), a ainsi indiqué à l'AFP une habitante.

Les Houthis ont en outre bloqué les entrées de la ville, empêchant l'entrée de toute assistance humanitaire, et ne cessent d'y envoyer des renforts militaires, selon des habitants.

Convoi humanitaire bloqué

Les rebelles ont également envoyé des renforts à Mareb, à l'est de la capitale, et dans la province de Chabwa (sud).

À Habbane, dans le nord de cette dernière province, de violents combats ont opposé durant trois jours les Houthis aux forces de la «résistance» progouvernementales qui ont déploré, dans un communiqué, 21 morts et 36 disparus dans leurs rangs.

À Aden, les forces progouvernementales ont reconquis dimanche la région de Ras Amrane, à l'entrée ouest de la cité portuaire, après de violents combats contre les rebelles, a indiqué à l'AFP un général pro-Hadi, Fadhl Hassan.

En outre, deux civils ont été tués et 56 blessés depuis vendredi par des tirs des rebelles dans des quartiers d'Aden, a indiqué un responsable de la santé.

Les Houthis ont intercepté dans la nuit «à l'entrée nord d'Aden» un convoi d'aide humanitaire, formé d'une cinquantaine de camions en provenance de la ville portuaire de Hodeïda (ouest), a indiqué à l'AFP Adnane al-Kaf, porte-parole d'un collectif de secours.

En annonçant jeudi la trêve, l'ONU avait pourtant affirmé avoir reçu de tous les belligérants des assurances suffisantes et les agences humanitaires avaient tablé sur la pause pour secourir les populations dans les zones les plus durement affectées.

Dans un communiqué publié samedi, l'Organisation mondiale de la santé annonçait ainsi son intention, dans le cas où la trêve tiendrait, d'envoyer équipements et médicaments dans neuf régions yéménites où le système de santé s'est effondré.

Le Programme alimentaire mondial, qui a deux bateaux chargés de nourriture et de carburant au large d'Aden, espérait lui venir en aide à plus de 2 millions de personnes.

Au Yémen, 80% de la population -soit 21 millions de personnes- ont besoin d'aide ou de protection et plus de 10 millions ont du mal à se nourrir ou à trouver de l'eau, selon l'ONU qui précise que le conflit a fait plus de 3200 morts, dont une moitié de civils, depuis mars.