Les Palestiniens ont signé mercredi leur demande d'adhésion à la Cour pénale internationale (CPI) où ils pourraient poursuivre les dirigeants israéliens pour «crimes de guerre», durcissant encore la confrontation avec l'État hébreu après l'échec de leur initiative diplomatique à l'ONU.

Le président Mahmoud Abbas a tiré les conséquences du rejet mardi par le Conseil de sécurité du projet palestinien de résolution fixant un terme à l'occupation israélienne; il a mis à exécution une menace ancienne et signé à Ramallah la demande d'adhésion de l'État de Palestine à la CPI, créée pour poursuivre les crimes les plus graves - génocides, crimes contre l'humanité et de guerre.

L'appartenance à la CPI, rendue possible par l'obtention fin 2012 du statut d'État observateur à l'ONU, permettrait aux Palestiniens d'engager des poursuites contre des dirigeants israéliens, par exemple pour la guerre de juillet-août à Gaza.

Pour la dirigeante de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), Hanane Achraoui, après un vote «outrageusement honteux» à l'ONU, il faut désormais «protéger la Palestine et lui donner les moyens de forcer Israël à rendre des comptes». Poursuivre les Israéliens devant la justice internationale «est la prochaine étape, inévitable».

Dans cette optique, M. Abbas a signé 20 autres conventions ouvrant également la voie à l'offensive juridique que les Palestiniens entendent lancer contre Israël.

Arme à double tranchant 

Mais même l'arme de la CPI pourrait être aléatoire. C'est au procureur auprès de la cour de décider ou non d'entamer un examen préliminaire, étape préalable à l'ouverture d'une enquête.

Et les Israéliens ne se sont pas privés de souligner que la ratification du Statut de Rome, qui régit la CPI siégeant à La Haye, pourrait se retourner contre les Palestiniens eux-mêmes, dont certains pourraient aussi avoir à répondre de leurs agissements.

«Celle qui a le plus à craindre (de la CPI), c'est l'Autorité palestinienne, qui a formé un gouvernement avec le Hamas, une organisation reconnue comme terroriste et qui, comme l'organisation État islamique, commet des crimes de guerre», a réagi le premier ministre Benyamin Nétanyahou dans un communiqué.

«Nous ferons ce qu'il faut pour défendre les soldats de Tsahal, l'armée la plus morale du monde», a-t-il promis.

Après une telle adhésion et son échec à l'ONU, l'Autorité palestinienne de M. Abbas n'aura quasiment plus qu'une carte à abattre: la rupture de la coopération sécuritaire avec Israël qui pourrait signifier la dissolution de cette institution.

En convoquant un vote à l'ONU à 48 heures seulement d'un renouvellement - a priori favorable à leur cause - du Conseil de la sécurité, les Palestiniens ont essuyé un double échec après quatre mois d'efforts qui laisse observateurs et diplomates perplexes par la stratégie palestinienne.

Les Palestiniens n'ayant obtenu que huit voix sur 15 (sur les neuf votes nécessaires), les États-Unis n'ont même pas eu à utiliser leur veto.

L'ambassadeur français convoqué 

Ce veto, un symbole sur lequel M. Abbas entendait capitaliser, notamment après l'échec d'un énième round de négociations sous l'égide des États-Unis, leur a échappé à une voix près: celle du Nigeria qui s'est abstenu alors qu'il s'était engagé, assurent les Palestiniens, à voter le texte.

«Nous sommes déçus par l'abstention du Nigeria. D'autres pays, comme la France et le Luxembourg, ont tenu leurs promesses», a affirmé un porte-parole de l'OLP, Ashraf Khatib.

Israël a convoqué pour vendredi l'ambassadeur de France à Tel-Aviv pour qu'il «explique le vote» français.

La Russie et la Chine ont voté en faveur du texte, alors que l'Australie et les États-Unis ont voté contre. Cinq pays, dont le Royaume-Uni, se sont abstenus.

Washington, pour qui le conflit ne peut être résolu que par des négociations directes, a dénoncé une résolution qui encourageait «les divisions» et posait «des délais arbitraires».

Avant le vote, les Palestiniens avaient apporté des modifications à leur texte pour contenter l'opposition intérieure à M. Abbas, mais cela n'a pas suffi.

«Décision unilatérale» d'un président ayant «pris en otage le processus de décision palestinien», a fulminé le Hamas, tandis que le Jihad islamique rappelait avoir «été contre depuis le début».

Dans un nouveau signe des tensions entre l'Autorité palestinienne et le Hamas, des centaines de fonctionnaires relevant du mouvement islamiste à Gaza ont décrété une grève générale après avoir appris que 50 000 d'entre eux ne pourraient conserver leur poste qu'en fonction des «besoins» du gouvernement.