Des affrontements entre tribus sunnites et rebelles chiites ont fait 20 morts vendredi dans le sud-ouest du Yémen, où les rebelles tentent d'étendre leur emprise faute d'autorité étatique, ont rapporté des responsables locaux.

Douze rebelles chiites, dits houthis, et huit membres de tribus ont été tués dans ces combats pour le contrôle d'Ibb, ville majoritairement sunnite prise par les rebelles cette semaine.

Des témoins ont fait état d'explosions dans la ville, alors que les rebelles étaient attaqués à la roquette par les combattants tribaux massés aux alentours.

Ces combats interviennent au lendemain d'une manifestation de centaines de membres de tribus réclamant le départ des rebelles.

Dans un communiqué diffusé par l'agence Sana, le gouverneur de la province d'Ibb a appelé «tous les groupes armés à quitter la province» ou les autorités «prendront les mesures nécessaires pour restaurer la sécurité».

Les rebelles chiites n'ont toutefois rencontré jusque là qu'une faible résistance des forces armées. Après la capitale Sanaa il y a près d'un mois, ils ont pris le contrôle mardi le port stratégique de Hodeida, sur la mer Rouge et ont depuis progressé vers le centre du pays, notamment Dhamar et Ibb.

Ils se sont par ailleurs emparés vendredi de Radah, dans la province centrale de Baïda, déployant leurs blindés dans cette ville mixte, sunnite et chiite, après des affrontements contre des combattants d'Al-Qaïda.

Les heurts entre houthis et Al-Qaïda, qui durent depuis mardi dans cette province, avaient fait des «dizaines» de victimes à Radah dans la nuit de jeudi à vendredi, selon des sources tribales et de sécurité.

La prise de cette ville s'est cependant effectuée vendredi sans grande résistance des forces d'Al-Qaïda, ont rapporté des sources militaires, tribales et de sécurité.

Les conquêtes des rebelles chiites ont plongé le Yémen dans l'impasse politique et déclenché une contre-offensive du réseau extrémiste, qui s'est emparé jeudi d'Udayn, sous-préfecture de la province d'Ibb.

Al-Qaïda, qui recrute parmi les sunnites, majoritaires au Yémen, a juré de livrer une guerre sans merci aux houthis depuis leur montée en puissance.

Le réseau a multiplié les attentats contre les rebelles chiites, dont le plus sanglant a fait 47 morts le 9 octobre à Sanaa.

Par crainte d'attaques d'Al-Qaïda, les rebelles ont d'ailleurs commencé jeudi à démanteler des campements qu'ils avaient établis depuis août dans la capitale, selon des experts.

Cela «ne veut pas dire que la révolte est terminée», a toutefois expliqué l'un des organisateurs de ces campements de protestation, Khaled al-Madani.

Malgré ce démantèlement, des habitants de Sanaa ont affirmé que la présence des houthis était renforcée depuis jeudi dans la capitale, où ils ont établi de nouveaux barrages et contrôlent la circulation des véhicules.

Le président Abd Rabbo Mansour Hadi, qui a désigné lundi un nouveau Premier ministre conformément à l'accord de paix du 21 septembre parrainé par l'ONU, s'est entretenu vendredi par téléphone avec son homologue américain Barack Obama sur la situation au Yémen, a indiqué l'agence Saba sans plus de détails.

Le nouveau Premier ministre Khaled Bahah, ancien ambassadeur du Yémen à l'ONU, semble avoir obtenu l'assentiment des rebelles chiites.

Dans le sud du pays, sept partisans du mouvement séparatiste ont été blessés dans une confrontation avec l'armée à proximité du sit-in qu'ils observent depuis mardi à Aden, ont rapporté des médecins et des témoins.

Des dizaines de milliers de personnes, profitant de l'affaiblissement de l'autorité centrale, se sont mobilisées dans cette ville pour réclamer l'indépendance du sud du Yémen, qui formait un État autonome jusqu'en 1990.