Un kamikaze taliban, au volent d'une voiture piégée, a tué trois soldats de l'OTAN - deux Américains et un Polonais -, et blessé une quinzaine d'autres personnes mardi à Kaboul, la première attaque depuis plusieurs semaines dans une capitale afghane en pleine paralysie politique post-élection présidentielle.

Un responsable du Pentagone ayant confirmé la mort de deux Américains, qui s'exprimait sous le couvert de l'anonymat, n'a pas précisé si les deux Américains étaient des civils ou des soldats. L'armée polonaise a, elle, confirmé que la troisième victime était l'un de ses soldats.

L'explosion, massive, a secoué le centre-ville vers 8 h (23 h 30 lundi, heure de Montréal) à l'heure de pointe du trafic matinal sur la route de l'aéroport, près du vaste complexe fortifié de l'ambassade des États-Unis, dans un quartier qui abrite également la Cour suprême, une base militaire et d'autres ambassades.

La forte détonation, qui a déclenché les sirènes de l'ambassade des États-Unis située à proximité, a projeté sur le côté et détruit au moins un des véhicules du convoi.

Sur les lieux, des soldats américains et polonais de la force internationale de l'OTAN (ISAF) ont donné les premiers soins à leurs camarades blessés, alors que les habitants du quartier emmenaient les civils blessés à l'hôpital, a rapporté un photographe de l'AFP.

«C'était un attentat-suicide à la voiture piégée qui visait le convoi de l'ISAF», a déclaré à l'AFP Hashmat Stanikzai, porte-parole de la police de Kaboul.

«Au moins trois soldats de l'ISAF ont été tués dans cette attaque ennemie», a de son côté annoncé la force de l'OTAN dans un communiqué, sans préciser comme d'habitude leur(s) nationalité(s), laissant ce soin à leur pays d'origine. Parmi les victimes, un soldat polonais a été tué et deux légèrement blessés, a ensuite indiqué à Varsovie, un porte-parole de l'armée polonaise.

«13 civils ont également été blessés» dans l'attentat, qui a également endommagé 17 véhicules civils, a indiqué M. Stanikzai.

La crise politique exploitée par les talibans?

L'attentat a aussitôt été revendiqué via Twitter par les rebelles talibans, qui luttent depuis fin 2001 contre le gouvernement et ses alliés de l'ISAF, dirigés par les États-Unis. «La puissante explosion a détruit un véhicule militaire et tué ou blessé plusieurs terroristes américains», a ajouté le porte-parole taliban, Abdulqahar Balkhi.

L'ISAF, qui compte aujourd'hui 41 000 soldats, dont 29 000 américains et 300 polonais, a prévu de retirer toutes ses troupes de combats du pays d'ici la fin de l'année, après 13 ans de présence qui n'ont pas permis de vaincre la rébellion menée par les talibans.

Une force plus modeste de quelque 12 000 soldats étrangers, en très grande majorité américains et chargés en principe de soutenir et former les forces locales face à la rébellion, devrait rester dans le pays en 2015.

L'attaque de mardi intervient alors que la classe politique afghane tente de mettre fin au blocage entre les deux candidats du second tour de la présidentielle de juin dernier, Abdullah Abdullah et Ashraf Ghani, qui revendiquent chacun la victoire.

Les deux rivaux négocient pour tenter de trouver une issue à ce scrutin censé désigner le successeur de Hamid Karzaï, seul homme à avoir gouverné le pays depuis 2001 avec l'appui des Occidentaux, mais entaché par les fraudes.

Abdullah Abdullah s'est de nouveau déclaré vainqueur lundi face à Ashraf Ghani, désigné victorieux par les résultats préliminaires officiels et que nombre d'observateurs voient comme le prochain chef de l'État.

La nouvelle charge d'Abdullah a douché les espoirs que l'audit des bulletins de vote en cours, destiné à écarter les bulletins frauduleux, permette de lever rapidement l'impasse.

Le blocage persistant alimente les craintes de violences politico-ethniques dans un pays toujours fragile et menacé par la rébellion.

La paralysie du gouvernement qu'elle engendre fait également craindre que les talibans ne profitent de la situation pour intensifier leurs attaques et gagner du terrain face à des forces afghanes souvent décrites comme fragiles sans le soutien de troupes de l'OTAN.

Les États-Unis attendent un successeur officiel à Hamid Karzaï afin qu'il signe un accord bilatéral de sécurité censé maintenir une présence militaire américaine après le retrait de la grande majorité des forces de l'OTAN à la fin de cette année.

En août, quatre civils avaient été tués et au moins 35 blessés dans un attentat similaire contre un convoi de l'OTAN à Kaboul, où aucun soldat n'avait péri.

Par ailleurs, l'OTAN a annoncé mardi la mort d'un autre de ses soldats, tué la veille par un homme portant un uniforme de l'armée afghane dans l'ouest du pays. Ces «attaques de l'intérieur» perpétrées par des soldats ou policiers afghans contre leurs formateurs de l'OTAN ou par des rebelles infiltrés nourrissent la méfiance entre les forces étrangères et afghanes, qui devront en principe affronter seules les talibans à partir de 2015.