Les autorités libyennes ont mis en garde lundi contre une «catastrophe» à Tripoli, où un incendie ravageant un immense dépôt de stockage d'hydrocarbures n'a pu être maîtrisé en raison de violents combats, le gouvernement appelant les habitants à quitter la zone.

Face à une situation qui s'aggrave, poussant notamment des ressortissants étrangers à quitter la Libye, les dirigeants allemand, américain, italien, français et britannique ont «réclamé» lundi «un rôle plus important de l'ONU dans la crise libyenne.

L'incendie a été déclenché dimanche soir par l'explosion d'une roquette sur un réservoir contenant plus de 6 millions de litres de carburant.

Le réservoir se trouve sur un site de stockage contenant au total plus de 90 millions de litres de carburant outre un réservoir de gaz naturel.

Ce dépôt de stockage d'hydrocarbures est situé sur la route de l'aéroport de Tripoli, où des combats opposant des milices rivales ont déjà fait en plus de deux semaines au moins 97 morts et 400 blessés, selon un dernier bilan officiel.

La Compagnie nationale libyenne de pétrole (NOC) a annoncé en milieu d'après-midi que l'incendie était désormais «hors de contrôle», le feu s'étant déclaré dans un deuxième réservoir contenant plus de 10 millions de litres de dérivés de pétrole, selon son porte-parole, Mohamed al-Hrari.

Le gouvernement a mis en garde contre «une catastrophe humaine et environnementale aux conséquences difficiles à prévoir».

«Les pompiers ont quitté le site définitivement» en raison des combats qui se poursuivaient à proximité, a précisé M. al-Hrari.

Le porte-parole de la NOC craint une propagation des flammes aux réservoirs de gaz ménager. «Une grande explosion risque alors de se produire et provoquer des dégâts sur un rayon de 3 à 5 km», a-t-il prévenu.

Le gouvernement a demandé de l'aide à plusieurs pays, qui ont annoncé leur disposition à envoyer des canadairs. Mais certains comme l'Italie ou la Grèce ont posé comme condition l'arrêt des combats entre milices rivales, a déploré M. al-Hrari.

Selon un photographe de l'AFP, des roquettes Grad ont atterri à la mi-journée à proximité du réservoir en feu.

Les étrangers sur le départ

Face à ce chaos, le gouvernement libyen a mis en garde vendredi contre «l'effondrement de l'État», et plusieurs pays européens dont la France, le Royaume-Uni et l'Allemagne ont enjoint leurs ressortissants de quitter la Libye.

Les États-Unis, dont l'ambassade est située sur la route de l'aéroport, ont évacué leur personnel diplomatique samedi.

Certains pays comme l'Italie ou Malte ont affrété des avions pour évacuer leurs ressortissants, selon une source diplomatique. Plusieurs expatriés travaillant pour des compagnies occidentales ont également été évacués par la route, via la Tunisie voisine.

Ces départs risquent de paralyser davantage le pays. Le ministère de la Santé a déjà mis en garde contre une pénurie en personnel médical, notamment après l'annonce des Philippines de l'évacuation de leurs ressortissants, dont 3000 médecins et infirmiers.

Les dirigeants allemand, américain, italien, français et britannique ont «réclamé» lundi «un rôle plus important de l'ONU dans la crise libyenne», lors d'un entretien téléphonique, selon un communiqué de Berlin. Ils «se sont accordés à dire qu'un cessez-le-feu immédiat entre les milices à Tripoli était nécessaire».

Londres a aussi rendu compte de cette conversation: «ils se sont accordés à dire que les Nations unies avaient un rôle essentiel à jouer pour faciliter le processus politique» afin de restaurer la stabilité en Libye.

Incertitudes autour du Parlement

Les affrontements autour de l'aéroport ont éclaté le 13 juillet après une attaque menée par des combattants islamistes et d'ex-rebelles de la ville de Misrata (200 km à l'est de Tripoli) qui tentent de chasser de l'aéroport leurs anciens compagnons d'armes venus de Zenten.

Considérés comme le bras armé de la mouvance libérale, les ex-rebelles de Zenten (170 km au sud-ouest de Tripoli) contrôlent l'aéroport de Tripoli et plusieurs autres sites militaires et civils du sud de la capitale.

Le gouvernement a maintes fois appelé à l'arrêt des combats mais les espoirs se tournent vers le nouveau Parlement, issu des élections du 25 juin, qui pourrait imposer un arrêt des combats.

La nouvelle Chambre doit entrer en fonction le 4 août et siéger dans la ville de Benghazi, chef-lieu de l'est libyen.

Mais des incertitudes planent déjà sur la capacité des élus à se réunir alors que Benghazi est le théâtre d'affrontements quasi-quotidiens. Ainsi, 38 personnes ont été tuées durant le week-end dans de nouveaux combats entre l'armée et des milices islamistes.

Photo MAHMUD TURKIA, AFP