Les parlementaires irakiens ont choisi un politicien kurde d'expérience, jeudi, pour remplacer Jalal Talabani comme président du pays, plus récente étape des démarches visant à former un nouveau gouvernement. Mais une série d'attaques ont fait des dizaines de morts et des extrémistes islamistes ont détruit un monument religieux, soulignant les importants défis auxquels fait face le pays divisé.

Fouad Massoum, 76 ans, l'un des fondateurs de l'Union patriotique du Kurdistan dirigé par le précédent président, a accepté le poste après avoir remporté les deux tiers des voix au Parlement, tout en disant constater «les énormes tâches en matière de sécurité, de politique et d'économique» auxquelles devra s'attaquer le prochain gouvernement.

L'Irak fait face à sa pire crise depuis le retrait des troupes américaines en 2011, à la suite d'une offensive-éclair lancée le mois dernier par l'État islamique, un groupe extrémiste qui s'est emparé de vastes pans de territoire dans l'ouest et le nord du pays, y compris la deuxième plus grande ville irakienne, Mossoul. Les militants ont également conquis des zones en Syrie près de la frontière irakienne, avant d'imposer leur interprétation rigoriste du Coran.

Alors que M. Massoum était nommé président, les extrémistes ont fait sauter un lieu de pèlerinage à Mossoul. Plusieurs maisons entourant la mosquée ciblée ont aussi été endommagées, ont confié des témoins à l'Associated Press.

Cette mosquée a été bâtie sur un site archéologique remontant au huitième siècle avant notre ère, et serait le lieu où est enterré Jonas, dont le nom est cité dans la Bible et dans le Coran.

À Bagdad, deux attentats à la voiture piégée ont ébranlé le quartier commercial de Karradah, alors que les gens se réunissaient à la brunante pour célébrer le repas de rupture du jeûne du Ramadan, tuant 21 personnes et en blessant 33 autres.

Plus tôt dans la journée, des militants ont tiré des obus de mortier contre une base militaire abritant des suspects accusés de terrorisme à Taji, à environ 20 kilomètres au nord de Bagdad. Alors que les prisonniers étaient évacués par autobus pour éviter une évasion, les militants ont attaqué avec des engins artisanaux, déclenchant une fusillade qui a provoqué la mort de 52 prisonniers et de huit soldats, ont indiqué des responsables, avant d'ajouter que huit autres soldats et sept prisonniers avaient été blessés.

Il n'était pas immédiatement possible de savoir si les prisonniers avaient été tués par des soldats ou des militants, ou si l'État islamique était impliqué. L'attaque n'a pas été revendiquée.

L'importante armée irakienne, formée et équipée par les États-Unis, a largement disparu face à la déferlante de l'État islamique, sapant le moral et la confiance du public en sa capacité de repousser l'assaut, sans parler de la reprise du territoire perdu au profit des extrémistes.

À la suite d'une rencontre tenue jeudi avec le premier ministre Nouri al-Maliki à Bagdad, Lloyd Austin, le chef du commandement central américain, a mis en garde contre le fait qu'«en l'absence d'un mouvement politique, tout appui que le gouvernement américain pourrait envisager risquerait de n'avoir que des effets limités à court terme».

Le poste de président de l'Irak est largement symbolique, mais l'élection de jeudi représente une étape vers l'atteinte d'un consensus chez des rivaux politiques, consensus essentiel si l'Irak veut prendre la crise de sécurité à bras-le-corps.

La prochaine étape, dans la transition politique irakienne, consistera pour M. Massoum à sélectionner un candidat pour le poste de premier ministre, qui aura la tâche de former un nouveau gouvernement.

En visite en Irak, jeudi, le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, a pressé les parlementaires de «trouver une position commune» pour qu'ils puissent s'attaquer à la crise déclenchée par l'État islamique, dont l'offensive menace de faire éclater le pays.

Les États-Unis félicitent Fouad Massoun

Les États-Unis ont félicité jeudi le nouveau président irakien Fouad Massoum et lui ont demandé de former un «gouvernement solidaire» pour combattre les insurgés sunnites dans le nord du pays.

«En franchissant cette étape capitale, le Parlement irakien a montré son engagement pour unifier le pays en appliquant la Constitution», a déclaré la porte-parole adjointe du département d'État, Marie Harf.

«Les dirigeants irakiens doivent à présent passer à l'étape suivante en choisissant un Premier ministre et en formant un gouvernement», a-t-elle ajouté alors que les autorités irakiennes tentent d'enrayer l'avancée de jihadistes sunnites qui se sont emparés de vastes pans du pays dans le nord.

«L'Irak ne pourra affronter efficacement ses défis sécuritaires et humanitaires qu'avec un gouvernement solidaire qui représente tous les Irakiens», a encore dit Mme Harf.

Lors d'une conversation téléphonique jeudi, le vice-président Joe Biden a félicité M. Massoum. Les deux hommes ont souligné combien l'«unité des Irakiens est nécessaire pour s'attaquer à la menace» des djihadistes de l'État islamique, selon un communiqué de la Maison-Blanche.

La première tâche de M. Massoum sera de choisir un premier ministre qui devra tenter de sortir le pays de sa plus grave crise depuis des années.

Il choisira un premier ministre au sein du bloc de l'actuel chef du gouvernement Nouri al-Maliki, arrivé largement en tête lors des législatives d'avril mais sans majorité claire.