Au lendemain des funérailles de trois jeunes Israéliens trouvés morts dans un champ d'Hébron, un jeune Palestinien a été enlevé et tué hier. L'annonce de sa mort a déclenché des émeutes dans les territoires palestiniens. Le point sur un nouveau cycle de violence qui ravive des plaies profondes.

Q: Que sait-on sur le meurtre d'hier?

R: Un jeune Palestinien de 16 ans, Mohammed Abu Khdeir, a été enlevé dans le quartier de Shuafat à Jérusalem-Est dans la nuit de mardi à hier. Des inconnus l'ont forcé à monter dans une camionnette alors que le jeune homme prenait un repas avec des amis avant la prière de l'aube du ramadan qui marque le début du jeûne quotidien. Quelques heures plus tard, un corps a été retrouvé sans vie dans un bois de Jérusalem. Les autorités n'ont pas dévoilé hier de qui il s'agissait, mais les parents du jeune Abou Khdeir disent avoir eu la confirmation que c'était leur fils. L'annonce a été à l'origine de violentes émeutes dans le quartier où a eu lieu le l'enlèvement, faisant plus de 50 blessés.

Q: Qui est responsable de cet assassinat?

R: Le président de l'Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, a vite attribué l'assassinat à des colons juifs en Cisjordanie et a affirmé que le gouvernement israélien devait en être tenu responsable. De son côté, le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou a demandé l'ouverture immédiate d'une enquête sur les circonstances de la mort du jeune Palestinien et a enjoint aux Israéliens et aux Palestiniens de ne pas se faire justice eux-mêmes. Plusieurs s'inquiètent d'une récente vague de violence attribuée au mouvement Price Tag, un groupe de juifs extrémistes qui promet «oeil pour oeil, dent pour dent» aux Palestiniens qui s'opposent à la colonisation juive en Cisjordanie. D'ailleurs, hier, un graffiti de Price Tag affirmant que l'assassinat était une vengeance de la mort des adolescents israéliens a été découvert sur le mur d'une mosquée palestinienne. «Ce groupe de colons extrémistes croit que les Palestiniens comprennent seulement le langage de la violence», note Rabi Khoury, analyste de l'Université américaine de Beyrouth.

Q: En a-t-on appris davantage sur l'assassinat des trois jeunes Israéliens trouvés morts lundi?

R: Enlevés le 12 juin alors qu'ils faisaient du stop pour rentrer des yeshivas (des écoles religieuses) de Cisjordanie où ils faisaient leurs études, les trois jeunes hommes auraient été kidnappés par des hommes au volant d'une Hyundai. Après le rapt, l'une des trois victimes a réussi à appeler la police israélienne. L'enregistrement de l'appel a été rendu public. On y entend des coups de feu et des cris de réjouissance en arabe. Les autorités israéliennes sont depuis à la recherche de deux suspects: Amer Abu Aisha, 33 ans, et Marwan Qawasmeh, 29 ans. Israël croit que ces derniers agissaient au nom du Hamas et a promis d'en faire payer le prix à l'organisation islamiste qui fait maintenant partie du gouvernement d'union palestinien. Dans la nuit de mardi à hier seulement, 42 Palestiniens ont été arrêtés en lien avec l'affaire.

Q: Y a-t-il des preuves que le Hamas a ordonné ces trois assassinats?

R: «Un des principaux suspects appartient à une famille très connue liée au Hamas, note Rex Brynen, professeur de sciences politiques à l'Université McGill. On ignore s'ils ont eux-mêmes décidé de kidnapper les trois adolescents ou si les ordres venaient de plus haut. Je ne serais pas surpris que l'acte ait été posé sans assentiment du leadership du Hamas.» L'expert du Moyen-Orient rappelle cependant que si le Hamas n'a pas revendiqué les assassinats, il ne les a pas condamnés non plus. «Le fait que le Hamas ait patiné tout autour de cet événement facilite la tâche d'Israël, qui l'accuse des meurtres» et du même coup, remet en cause la place du Hamas dans le gouvernement d'union, ajoute M. Brynen. Le gouvernement israélien n'a jamais vu d'un bon oeil la réconciliation des deux plus grandes factions politiques palestiniennes.

Q: Quelles sont les réactions après les funérailles des trois jeunes Juifs?

R: De l'aveu des experts, la réaction est plus véhémente qu'à l'habitude des deux côtés du conflit. Si des émeutes ont éclaté parmi les Palestiniens, des manifestations d'une rare violence ont aussi eu lieu en Israël dans la foulée des funérailles. Des centaines de manifestants de droite criaient «mort aux Arabes» et ont attaqué des passants palestiniens. Plus de 40 manifestants juifs ont été arrêtés mardi. Sur Facebook, plusieurs messages de haine circulaient hier. «Ce qu'on voit de manière plus globale, c'est le coût d'un conflit qui n'est pas réglé. Le désespoir se transforme en violence et en contre-violence», conclut Rex Brynen.